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Anxiété. Musique qui bat son plein. Soirée de retrouvailles.

Roman effleure le dos d'Athena quand il entre dans l'appartement. J'ai l'impression de voir un inconnu. Il a une épaisse barbe brune et son crâne est fraichement rasé à la GI Joe. Il arrive en premier. Je vois entre eux les effluves d'une relation. Ils n'ont pas duré, pas longtemps, ils savaient qu'ils n'étaient faits que pour être amis. Je suis persuadé qu'ils couchent encore ensemble. Après lui arrivent Styx et Farah, les deux joli.es princes.ses. Styx a les cheveux en mullet blond et un liner à couper au couteau et Farah a les cheveux longueur épaule, d'un brun ténébreux. Iel.les se tiennent par la taille et sourient. Un point repère qui me fait chaud au coeur et me rappelle l'époque où tout allait bien. Où on riait tous.tes à coeur joie. Quand Hector m'a ouvert son monde. Nike ne viendra pas. Elle n'a pas pardonné que je me suis remis avec Tom, celui qui avait détruit Fred, son ancien meilleur ami. Et je comprends. Et je m'en veux.

Hector a un sourire jovial. Ses cheveux sont attachés dans une queue de cheval digne d'un héros, il me fait penser à un Hercules adorable. Heraklès, mon amour. Il porte un t-shirt moulant à l'effigie du café où il bosse. Ses bras— les muscles de ses bras me donnent l'eau à la bouche. Je détourne le regard. Je m'en veux de saliver sur lui. C'est mon meilleur ami. Et je ne veux pas le briser. Pas encore.

Je tiens un gobelet empli de punch dans la main. Je sais que mes mains tremblent, j'ai pris de quoi me relaxer avant de venir mais je crois que le médoc ne fait pas effet— et j'ai du mal à calmer les vagues d'angoisse qui m'assaillent. Je sirote le punch en espérant que l'alcool suffira pour calmer mes nerfs.

Quand Styx me voit, iel se rue sur moi pour m'enlacer de ses bras de mec de la salle. Iel m'agrippe avec énergie, un sourire si large affiché sur son visage que je me sens moi même sourire par réflexe.

" Achille! Tu m'as trop manqué mec!"

Je souris, béas, et je l'enlace de plus belle.

" Tu m'as manqué aussi, Styx."

" Tiens, Farah, viens voir mon coeur, y'a Achille, il est enfin de retour!"

Farah arrive, ses talons claquant sur le sol. Elle porte une robe d'été qui glisse autour de ses jambes avec délicatesse.

" Salut, Achille!"

Les deux me dirent alors mille et une choses— les études, le boulot, le café-noisette qu'Hector fait ( " il est trop bon, je t'assure, j'ai jamais gouté un café aussi réussi de ma vie, et en plus cet amour ne nous fait pas payer, vraiment il est génial mon p'tit Hek"), son opinion sur mon dernier livre ( " j'étais un peu inquièt.e, tu écris merveilleusement bien mais vu que je sais que quand tu écris tu craches ton âme, ce que tu disais m'as fait très peur"), ainsi que l'annonce que le couple a adopté un chat qu'iel.les avaient appelé Stonks. J'écoute, en silence, le coeur gros comme une patate, et je me laisse emmener dans le courant de leurs vies avec le sentiment d'être à nouveau chez moi. Avoir des ami.es me manquait. Avoir quelqu'un d'autre qu'un seul pillier pour être heureux me manquait. Dépendre de quelqu'un précédemment connu pour être un menteur manipulateur ne me manquait pas.

Les deux m'entrainent jusqu'à Roman, que je félicite pour sa barbe et sa coupe. On échange des banalités, il me parle de fatigue et de livres ( " en ce moment je lis du Marx, j'avais la foi"), puis il me parle brièvement d'Athena, après qu'il ait remarqué mon regard appuyé quand elle vient lui amener un gobelet de bière ( " oui je sais. Elle m'a quitté parce que j'habite loin, en ce moment, et je lui ai dit qu'honnêtement on est mieux en tant qu'amis. Sauf que je suis revenu sur Paris et que bon.. Oui. Bref"). J'ai l'impression de revoir de la famille, de la famille que j'aime, pour la première fois depuis mille ans. Je me sens bien. Mon anxiété s'atténue enfin, peu à peu.

Je rejoins Hector dans la cuisine. Il est en train de se servir un verre de punch. Il a les joues rosies par l'alcool, et une mèche pend hors de sa queue de cheval. Doucement, je la défais pour le recoiffer. Je passe ma main dans ses cheveux, rameutant sa tignasse dans un bun semi-serré. Il a l'air d'un hippie irlandais. Je ris doucement. Je vois sa peau rosir de plus belle.

" Merci"

Je souris.

" Je suis vraiment content d'être là. Merci de m'avoir invité."

Il sourit à son tour. Des fossettes apparaissent dans l'océan de constellations qui marque sa peau laiteuse.

" Je suis content que tu soies là aussi, Achille. Tu leur manquais vraiment."

AchilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant