A la lune
Ö lune gracieuse, je me souviens,
Que l'an passé, sur cette même colline,
Je venais, plein d'angoisse, t'admirer :
Et tu pendais alors sur ces bois
Que tu éclairais, comme tu le fais maintenant.
Mais nébuleux et brouillé par les larmes
Qui montaient à mes cils, se montrait
À mes yeux ton visage, car tourmentée
Etait ma vie : et elle l'est, ni ne change,
0 lune, mon amie. Et pourtant il m'est cher,
Ce souvenir, et le dénombrement
De ma douleur. Oh qu'il est doux,
Au temps de la jeunesse, lorsque s'étend encore
La voie de l'espérance et qu'est courte la mémoire,
De se ressouvenir des choses passées, encore
Qu'elles soient tristes, et que l'angoisse dure !Giacomo Leopardi
Il me tient dans ses bras alors que la lune se décroche et tombe des cieux, dévale les nuées, avale d'emblée toutes les étoiles, recrache des astres poussiéreux, à demi-digérés, vomit des contrées. Il me tient dans ses bras alors que je continue de me vider, que je me laisse crever, que je me sens amoindri par un monde atténué, je deviens cendres et braises déblayées, je suis champs et fleurs écrasées, je suis neige grisée, je suis flocons tamisés, je suis ville dénudée, lumière habillée, maison abandonnée et pont habité, je suis homme qui saute, lapin qui court, je suis début et fin et fin et début. Je suis poésie cabossée, romanesque découverte d'un monde abimé, je suis ouvrage et reliage et mots et lecture morne, je suis en sang, encens, en cent, je suis début et fin d'un univers éclaté, monde étoilé, créature astronomiquement miniature, minusculement gigantesque.
J'étais à demi-vide dans ses bras quand Athena nous a aperçu, yeux écarquillés de l'amie surprise par les faits. Hector a tenté de se justifier, j'ai bafouillé, j'me suis emmêlé dans mes mots, pinceaux aux manches cassés, j'ai glissé dans l'aquarelle, dans la peinture, dans la souillure de mes phrases, elle a rit, elle a sourit, elle a rougit, et j'ai su que c'était accepté.
Notre duo ensoleillé était validé.
Secret dévoilé, fin d'une aventure ancrée dans un esprit mensonger, j'avais le droit de l'apprécier, de le regarder, j'avais le droit de ne plus me cacher, j'avais le droit de tracer, absent, sa peau de mes doigts, j'avais le droit de brûler, ouvertement, j'avais le droit d'être incandescent, flambant, j'avais le droit de laisser les flammes lécher mes doigts, lécher mon coeur, happer mes heurts, j'avais le droit de me faire avaler par l'incendie de l'amour.
Douce et claire est la nuit et sans un souffle,
Et calme sur les toits et dans les jardins
Se pose la lune, et elle révèle au loin,
Sereines, toutes les montagnes.Tu accroches la lune dans le ciel, pâte à fixe maladroite, tu l'accroches entre les brûlantes étoiles, tu tentes tant bien que mal de la rendre équilibrée, elle qui semble sur le point de se décrocher. Tu es sur la pointe pieds sur ton escarbot d'escargot. Je t'observe, yeux étoilés, sourire espacé de l'astronome qui ne peut s'empêcher d'admirer ce jeu des sonorités que tu ne cesses de jouer, dés lancés entre les astres dénudés, mutiques désirés, désirs muets. Ikea abimé, meubles décapités, têtes ressoudées, tu répares mon monde, un coup de marteau à la fois, un coup de coeur à la fois, une oeuvre écoulée, étoilée, à la fois.
Je t'embrasse devant elle, manière maladroite de prouver que je suis là, que j'existe. Je n'existe pas sans ton toucher, je n'existe pas sans tes lèvres, je n'existe pas sans tes doigts dorés, sans ton alchimie de la sensation, sans tes flammes, sans ton feu, sans ta crinière bronzée. Ton corps de bronze me fait chavirer, me déchire l'âme, délicieuse souffrance, torture doucereuse.
Son regard guerrier me conforte dans mes lubies assiégées, lèvres embrassées, feu dans la poitrine. Mon cerveau risque d'imploser, cage thoracique trop étirée.
Lune bancale, nuées rivales, rêve astral.
Hector, Hector, Hector.
Muse bronzée.
Son bouclier jette un éclat pareil à celui de la lune
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Achille
RomanceIcare brûle, Icare s'enflamme, mais le soleil l'acclame. Icare aime le soleil d'un amour éternel