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- Bouh !

- Aaaaaah !

Aimée sursaute jusqu'au plafond, ou plus justement, pour rester dans l'hyperbole, jusqu'au ciel ! Autour d'elle, les élèves qui sortent du lycée ne prêtent aucune attention à sa bizarrerie. Sauf un. Son assaillant.

Aimée se retourne, s'attendant comme la dernière fois à retrouver son prince charmant... quand soudain, elle tombe des nues. C'est bien un prince qui se tient devant elle. Petit, à défaut d'être aussi charmant que Corey. Paul le Petit Prince.

— Tu es décidément une grande froussarde, dit-il sur un ton neutre pour adoucir sa pique.

— C'est toi qui es trop silencieux ! rétorque Aimée. On ne t'entend jamais arriver.

— C'est tout l'art de la discrétion. Face aux prédateurs, les proies doivent user de ce stratagème pour survivre. On peut dire que j'ai pas mal d'expérience dans ce domaine...

Aimée fronce les sourcils en réaction à sa dernière phrase. Elle hésite à demander à Paul si les prédateurs dont il parle sont en fait ses anciens harceleurs. Rien ne lui indiquait avant qu'il aurait pu subir du harcèlement, mais le fait qu'il ne vienne pas souvent à en cours à cause d'une évidente phobie scolaire le laisse fortement entendre. Aimée se dit au dernier moment que ce n'est sûrement pas un sujet que Paul aimerait aborder, d'autant plus qu'ils ne se connaissent pas encore beaucoup. Certes, sa première image d'Aimée était très intime, en pleine crise d'angoisse et dans une position vulnérable, mais quelque chose en lui laisse penser qu'il ne se dévoilera pas aussi facilement. Son ton léger quand il évoque des sujets sensibles semble bien trop factice.

— Tu es déçue de me voir, constate Paul en fixant Aimée de ses yeux couleur myosotis.

La jeune fille se mord la lèvre en frissonnant.

— Non, tu n'y es pour rien... Je pensais que c'était Corey, mon copain, mais il termine les cours plus tard de toute façon...

— Tu l'aimes beaucoup.

— Ah ça oui... Je te le présenterai, un jour. Tu verras, il est merveilleux.

Un sourire rêveur fend les lèvres d'Aimée. Elle repense à vendredi dernier, la discussion qu'elle a eue avec son frère, la promesse qu'il lui a faite. Elle sait qu'il la tiendra. Que tout s'arrangera entre lui et Corey. Que rien ne dégénérera. Loni est quelqu'un de fiable. Jamais il ne trahirait un serment du petit doigt.

— Bon, puisque je suis là pour une fois, ça te dit qu'on se pose dans le café d'en face ?

Aimée tourne la tête vers l'enseigne lumineuse de « Doux & Corsé ». Elle a aussitôt un rire nerveux que Paul ne comprend pas, puisqu'il hausse un sourcil.

— C'est mort, refuse-t-elle, catégorique. Désolé, mais je ne retournerai jamais dans ce café. C'est là que j'ai fait ma dernière crise d'angoisse. En plus, c'est le repère des trois pestes qui m'ont humilié devant tout le monde.

— Bah, raison de plus pour y aller ! riposte Paul sans hésiter.

Aimée le dévisage avec de grands yeux à la fois surpris et effrayés.

— Euh... tu m'as bien écouté, Paul ? J'ai fait une crise dans ce café. Ça me terrifie d'y retourner. Je vais sûrement retomber sur des gens qui me détestent. Je... je pensais que tu me comprenais...

— Je te comprends, mais fuir n'arrangera rien, répond Paul avec conviction. Si tu fuis aujourd'hui, tu auras peur toute ta vie d'aller dans ce café. Et pour quelle raison ? À cause de trois pauvres connes qui se prennent pour les reines du monde ? Tu vas voir, on va leur rendre la pareille. Il faut éradiquer l'angoisse avant qu'elle s'enracine. Crois-moi, je sais de quoi je parle.

La Symbiose Où les histoires vivent. Découvrez maintenant