A partir de mes dix ans, lorsque mes parents ont commencé à se disputer violemment, j'ai commencé à faire de nombreux cauchemars et développer une peur bleue des cris, les simples haussements de voix et tant de peurs que même auprès de Luis, je ne paraissais plus qu'une véritable trouillarde, comme il disait. Et lorsque j'en ai eu onze, et que mon frère à atteint ses quatorze ans, mon père nous amené, un jour d'absence de la part de notre mère afin d'éviter tout problèmes, à WaterFalls.
Arrivés, en voiture, à la rive que nous avions l'habitude de fréquenter il nous ordonna de nous approcher. Cette année-là, nous étions en plein hiver, un jour de janvier, et la rivière était gelée. La neige recouvrait la pelouse et les arbres nues de la forêt. Il faisait si froid que j'étais pour sûre convaincu à mon jeune âge, qu'en restant trente de secondes dehors de plus après être sortie de la voiture, je me gèlerais. Littéralement.
Après avoir contourné la voiture et soulevé le coffre de celle-ci, il en sorti une pelle. Puis il retourna à nos côtés, enfin, devant nous. Je me souviens qu'il a commencé à marcher sur la rivière figée et que j'ai crains le souffle coupée que la glace ne se brise et qu'il tombe dans l'eau glacé. Mais la glace était trop épaisse que sa arrive, et si bien que lorsqu'il avait commencé à la heurter avec la pelle, il mit bien trois longues minutes à créer un large trou d'environ soixante-dix centimètres. Il frappait encore et encore. Le bruit du métal résonnait contre celui du gel craquant, crissant.
— Rapprochez-vous.
Très jeune, bien que je n'eusse jamais connu grand-chose de mon grand-père, duquel mon père avait toujours eu du mal à parler malgré mon harcèlement constant d'enfant, j'appris que ce dernier ne faisait pas son éducation comme les autres. Et qu'il avait fait quelque chose de similaire à ce que notre père ce jour-là nous fit faire, pour les mêmes raisons. Paige, notre mère aurait surement hurlé en nous voyant faire, mais Major y tenait.
— Allez, insista-t-il d'un mouvement de la main dans sa direction.
Nous étions avancés un regard entendu entre mon frère et moi et le cœur battant, nous demandant ce qu'il voulait que nous fassions et quel en était la raison. Je me souviens aussi m'être pleins du froid de la neige sous mes pieds nus, car il nous avait demandé de retirer nos chaussettes et nos chaussures. Et lorsqu'il m'invita avec Luis à plonger dans l'eau froide hivernale, j'avais compris l'utilité de retirer ses chaussures ainsi que les chaussettes...
L'instant d'après, plus tardive que Luis, je m'étais accroupie près du bord hésitante, avant de me décider finalement à plonger. Mes pieds rencontrèrent l'eau glacé venu des vents du nord les premiers puis mon corps tout entier, jusqu'au milieu de mon cou. Et quand je fus plongée, alors que le vent s'était soudainement mit à souffler soudain plus fort comme s'il me narguait, mon corps ne s'était jamais senti aussi souffrant.
Le froid me paralysait et mon corps tremblait tout seul sans que je ne puisse l'arrêter. Si froid. Si froid que mes dents claquaient. Si froid que j'eu l'impression de bruler, comme ces moments où le froid devient si glacé qu'il en paraît chaud. Si froid... que je regardais avec des yeux suppliant, au milieu des blocs de glaces, mon père d'accepter que nous arrêtions cette torture. Mais à la place, il se contenta de me regarder avec des yeux inexpressifs avant d'ouvrir la bouche et nous dire à mon frère et moi :
— Luis... Valentina.
Il ferma un instant les lèvres puis les rouvrit :
— Il fait froid, n'est-ce pas ? Vous voulez fuir, sortir, mais vous ne pouvez pas. Dans ce cas, il vous faut l'affronter, affirma-t-il alors en s'accroupissant devant nous. Mais dans ce cas... Comment fait-on à votre avis, pour affronter une eau si froide que l'on en souffre ?
Ce jour-là, j'ai au milieu de ce lac gelé, mon père nous a apprit une chose importante qui m'a suivit plusieurs années, mais que j'ai aussi souvent oublié à maintes reprises...
« — Devenez encore plus froid... et vous résisterez. »
Deviens plus froid et tu ne ressentiras plus la froideur qui t'entoure. Devient plus fort que ce qui t'entoure et tu ne souffriras pas. Honnêtement, ça n'avait pas marché souvent, même pour lui, mais c'était une situation qui marchait dans le pire du pire, car s'effondrer était de loin la seule chose à ne pas faire. S'effondrer c'était mourir. Avec ça, j'avais appris le courage. Celui d'affronter les choses et ne jamais les éviter. Lutter.
À présent, je devais devenir plus froide que mon propre corps. Me protéger de ce qui se voulait une conséquence de mes propres choix. Le poids du destin qui m'avait été imposé et que je voulais affronter. Alors, si je devais tomber dans la froideur littérale d'un corps qui me rejetait, je devais l'affronter et y résister afin de ne plus en souffrir. Bien que ce ne soit pas en guérir...
Car on ne pouvait pas en guérir...
Des âmes-sœurs.
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HYDRA - the torn souls
Mystery / ThrillerAu croisement de leurs âmes, là où leurs cœurs se sont égarés. « Étouffer. Noyer. Tuer. » C'est ainsi que pourrait décrire la relation auquel met fin Valentina Mahon. Et ce n'était pas elle la victime de la tragédie. Mais désormais il est tro...