Chapitre 28

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                                                                                          Malone


Il est un peu plus de minuit trente quand nous arrivons au Five. Une clameur se fait entendre quand nous descendons de la berline qui nous dépose devant l'entrée de service. Je salue des fans en signant des autographes, puis je m'engouffre à l'intérieur où nous attend le garde du corps de Sebastiàn. Jaden, si ma mémoire est bonne. Nous le suivons jusqu'à la loge que l'on nous a attribuée et je ne peux détourner mon regard des escaliers quand nous passons à proximité. Pas de fille brune qui les monte...

Ce soir, c'est le grand soir. Nous allons mixer dans la plus prestigieuse discothèque de New-York. Notre notoriété n'est plus à faire, nous avons eu la chance d'avoir du succès rapidement. Mais avoir un créneau pour faire un set ici, c'est le saint Graal. Je ne sais pas comment notre connard de producteur y est arrivé mais il l'a réussi. Je ne vais pas lui sauter dans les bras, il serait capable de bander ce gros dégueulasse mais je lui tire mon chapeau. C'est bien suffisant.

Une fois que nous sommes installés et prêts à aller mettre le feu, Sebastiàn débarque dans la loge pour nous saluer et s'informer si tout est ok de notre côté.

C'est Neal qui commence, toujours, ensuite vient Hugo et enfin je termine la session en augmentant le rythme. Tout est bien rodé depuis des années maintenant. Pourtant ce soir une sensation étrange ne veut pas me quitter. Au dernier moment, je décide de changer un de nos morceaux par celui de The Weeknd, save yours tears. J'en informe Hugo. S' il paraît étonné, il valide quand même ma lubie, sans plus de commentaires.

Quand vient mon tour, je prends place derrière la table de mixage, la cabine est en hauteur par rapport à la piste de danse, ce qui permet de voir si la sauce prend. Et pour le moment c'est carton plein. Hugo a super bien fait son taf comme toujours. Je peux enchaîner tranquillement, avant d'envoyer le son qui fera battre leurs cœurs plus vite, qu'ils aient la sensation que leurs corps soient transportés par la musique. Comme si un doppler géant vous envoyait des décibels. Le casque à moitié sur une oreille, je suis en train de lancer le morceau que j'ai changé à la dernière minute, quand mon regard est distrait par un éclat brillant venant de la piste. Des escarpins scintillent me renvoyant des flashs. Machinalement, mes yeux suivent le chemin de deux jambes interminables, aux cuisses que je devine fuselées, l'échancrure de la robe le laisse deviner, j'arrive au niveau d'une taille fine, un décolleté discret qui laisse le loisir d'imaginer le galbe parfait de cette poitrine, pour enfin terminer sur deux iris verts qui me transpercent... et me transportent... dans un passé pas si lointain.

Astrid est là. Immobile au milieu des autres danseurs qui s'agitent. Elle a arrêté de danser. Le mec à ses côtés lui parle, elle lui répond sans me lâcher du regard. Dans le sien, je peux lire de la tristesse, de la colère, alors que le mien doit faire transparaître de l'étonnement de me retrouver en face d'elle, mais il doit aussi briller d'excitation... pas top, quand je réalise que c'est la fille que j'ai aimé le plus au monde, et que j'ai salement abandonner. Mais quand je l'ai dévisagé, je ne savais pas que c'était elle.

Excuse minable.

Le temps de ma réflexion et Astrid fait demi-tour pour partir en courant. Sans réfléchir, je fais signe au mec qui doit prendre la relève de me remplacer et je dévale les escaliers sans me poser de questions. Arriver sur la dernière marche, je vois une éclaircie verte se diriger vers la sortie de secours. Je me remets en marche rapide pour l'atteindre et sort par la porte en métal. Une fois dans la ruelle, je regarde à droite vers l'avenue, mais pas de fille qui court, par contre sur la gauche, j'entends une respiration et un sanglot étouffé.

Save Your TearsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant