Voilà plusieurs semaines que nous sommes installés dans une bicoque en Thaïlande. Le type avec qui je travaille pour obtenir informations et faux papiers m'a expliqué il y a quelques jours que ma tête était mise à prix sur le darknet. Nina est recherchée. Nina fait peur. La chose à laquelle je ne m'attendais pas, c'est que par ma faute, de nombreux enfants de l'infini sont assassinés. J'ai malheureusement eu accès aux photos mises sur le net. Je suis dans un cauchemar qui ne peut pas se terminer ou alors seulement si je meurs.
– C'est quoi la suite Nina ? Me demande Zed en nous rejoignant sur la terrasse de notre petite case en taule non loin de la plage.
– On pourrait rester ici, mourir ensemble, souffle Mily. C'est beau ici.
Adam ne dit rien. Nous regardons tous le soleil se coucher à l'horizon. L'endroit est paisible, presque paradisiaque. Mais je sais que le paradis n'existe pas, en tout cas, pas pour nous.
– Je vais au Japon seule. Vous restez ici.
Personne ne me contredit. De toute manière, ils savent que je dois exécuter mon contrat sinon papy me tuera. Ce n'est pas seulement parce que ma tête est mise à prix, mais depuis quelque temps maintenant, nous sommes suivis. Je le sais. Je ne sais pas si les autres s'en sont aperçus. Je pense que papy me met la pression. Je dois me rendre au Japon, je dois tuer son fils et son petit-fils. Je n'ai plus le choix.
En quittant notre logement pour me rendre à l'aéroport, je n'ai plus de doutes. Une voiture suit mon taxi, puis des hommes m'observent et me suivent presque jusqu'à mon terminal. Des asiatiques, Japonais donc. Papy. Peut-être s'impatiente-t-il ? Moi aussi, je suis fatiguée de jouer. Je veux que tout cela s'arrête.
Je monte dans l'avion qui me conduit vers le pays de celui que mon cœur refuse d'oublier, Eichi. Qu'est-il devenu ? A-t-il eu des enfants avec sa femme ? La tristesse m'envahit, la solitude aussi. Je me sens si seule et je m'endors avec cette douloureuse pensée dans l'attente de poser le pied au Japon.
Mon arrivée au pays du soleil levant est étrange. Je me sens épiée de partout. Et ce n'est pas une simple imagination de mon esprit. Des hommes en costumes m'attendent devant l'entrée de l'aéroport. Je commence à paniquer. Je ne suis pas prête pour la suite, que va-t-il encore m'arriver ?
La peur me fait bêtement me diriger vers un policier, je bredouille quelques mots en japonais mêlés à mes mots anglais et je le suis quand il me demande de me diriger vers un bureau.
Sauf que ce n'est pas un bureau ordinaire, c'est une simple pièce vide, totalement murée et à peine sommes-nous entrés que derrière nous s'engouffrent d'autres hommes que j'ai rapidement le temps de distinguer. On me met un sac noir sur la tête, je hurle de peur. On me menotte, me bouscule et surtout on m'entraîne vers la sortie. Je sens un petit peu l'air frais au travers du tissu, peut-être mon dernier bol d'air ?
Le moteur d'une voiture, des voies masculines, j'ai peur. Nous roulons. Papy s'est-il impatienté ?
Et puis soudain, le choc. Le véhicule est percuté, semble-t-il, je ne vois rien, j'entends simplement les bruits : les carrosseries qui se percutent, les balles, les hommes. Je suis bousculée, puis tirée de force hors de la voiture, mise dans une autre voiture, je crie, je pleure. Le fait de ne rien voir est une horreur. Je ne sais plus où je suis, ni avec qui, je ne reconnais plus rien, même plus les mots prononcés.
Mon calvaire dur, le véhicule dans lequel je suis, roule un long moment et puis il stoppe. On m'oblige à sortir de la voiture, je tente de poser des questions, mais personne ne répond. On me force à avancer, où ? Je ne sais pas.
Je termine assise sur une chaise que je reconnais à son bruit métallique. Je distingue enfin la lumière quand on ôte le sac de ma tête, je reconnais surtout Kanta, le frère d'Eichi, un peu plus marqué par le temps et les cicatrices, mais c'est bien lui. Que se passe-t-il ?
– Bienvenue au Japon sale pute, me dit-il en anglais avec un sourire cruel. Et dire que tu es encore en vie.
Il s'agite devant moi, tourne en rond en me parlant, je suis seule dans une sorte de hangar, enfin seule, pas vraiment, il y a des hommes partout et tous armés. Où est-ce que j'ai merdé pour atterrir ici ?
– Je pensais sincèrement que tu crèverais, mais non, tu tiens bon. Pour une pute, bravo. On va dire que le vieux t'a bien formée, ricane-t-il. Ton petit numéro en Italie a été parfait, remarquable.
Je l'observe. Il est nerveux. Mais comment sait-il tout ? Je tente de comprendre, mais la peur me tient et m'empêche de réfléchir.
– Tu pensais sincèrement que les agissements de mon sénile de grand-père allaient rester secret ? Je l'ai toujours eu à l'œil ce vieux timbré. Il veut prendre la place de mon père, il veut reprendre la place qui lui revient, crie-t-il amusé vers les autres hommes qui se mettent à rire. Vieux fou comme il est ! Il se voit Dragon !
Et là, je comprends. Kenta est persuadé que papy veut prendre la place de son père donc il ne soupçonne pas la vérité. Il sait que je travaille pour papy, mais il ne sait pas pourquoi. Il n'a pas compris. Une infime lueur d'espoir naît dans ma tête, mais elle me paraît bien inutile en cet instant.
– Et que fait-il pour y parvenir ? Il engage une pute. Une pute. Tu l'as sucé aussi le vieux ? Vient-il me demander en s'approchant de moi. Tu suces n'importe qui n'est-ce pas ? Le grand-père, le petit-fils... Tu aimes ça sucer ?
– Va te faire foutre.
Et la gifle est partie en faisant saigner ma lèvre. Je suis dans un pétrin sans nom, impossible de me sortir de là. Je sens les larmes venir, je tente de refouler ma peur, ma tristesse, mais rien n'y fait, elles coulent sur mes joues, en les voyant Kanta se marre.
– Tu as raison d'avoir peur. Tu vas crever.
Et puis, le bruit de crissements de voiture retentit dans le hangar, des portières, des voix et des hommes qui s'approchent. C'est là que je le reconnais. Marchant avec colère et détermination. Ce n'est plus le jeune homme de mes vingt ans. Il a beaucoup changé, mais mon cœur ne se trompe pas, c'est bien Eichi qui s'avance vers son frère. Même taille, même gabarit, le petit frère a rattrapé le grand. Il ne me regarde même pas. M'a-t-il oubliée ?
VOUS LISEZ
NINA
Художественная проза"Kocham cię" répétait ma maman pendant que je la regardais mourir. Papa aussi a brûlé dans les flammes de l'enfer. J'avais 6 ans. Et puis, ILS ont fait de moi un objet. ILS m'ont tout pris, mon enfance, ma dignité, mon nom... ILS pensaient que j'al...