Chapitre 6

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Nous sautons dans notre train juste à temps. Il arrive à Paris en fin d'après-midi. Nous nous levons en même temps que tout le monde et nous faisons la queue un long moment dans le couloir. Quand nous parvenons enfin à sortir du TGV, nous trouvons le quai noir de monde. Des milliers de personnes se dirigent vers la même direction en tirant leurs bagages derrière elles dans un grand vacarme de bruits de roues.

Une fois dans le hall de la gare de Montparnasse, je tapote sur l'épaule de ma jumelle pour la faire se retourner.

- Les taxis sont sur la gauche, je suis obligé de crier pour me faire entendre.

Morgane me toise.

- Nous allons plutôt prendre le métro, comme les vrais Parisiens. Comme cela, en plus, nous pourrons garder les vingt euros pour un autre usage.

Je hausse un sourcil.

- Comme faire du shopping ?

Elle me sourit.

- Excellente idée. Je te remercie pour la suggestion, p'tit frère.

Puis elle continue à avancer allègrement sur ses talons hauts. Je peine à la suivre. Je me fais bousculer à plusieurs reprises sans que personne ne prenne la peine de s'excuser ou même de me regarder. À croire que je suis devenu invisible ou que je me suis métamorphosé en poteau. J'aimerais bien avoir ces pouvoirs, mais même les fées les plus puissantes ne peuvent transformer leur propre corps. Je peux changer la couleur des cheveux de n'importe qui, sauf les miens, par exemple. C'est l'une des règles idiotes de la magie. Non que je rêve de me tendre les cheveux en blonds, bien sûr. Pas même pour ressembler à Geralt de Riv (qui technique a d'ailleurs les cheveux blancs).

C'est la première fois que nous mettons les pieds à Paris et je dois avouer que toute cette agitation ne me met pas très à l'aise, d'autant que je ne comprends rien aux sens de circulation. Morgane elle-même ne fait plus autant la fière, tandis qu'elle essaie de fendre la foule dense pour essayer de trouver l'endroit où on prend le métro. Elle fait mine de savoir où elle va, mais je sais bien qu'elle est aussi paumée que moi.

Il n'est pas facile de tirer une valise énorme tout en portant un cactus dans l'autre main. J'essaie de ne pas trop le secouer. Je ne voudrais pas qu'il meure dès le premier jour. Maman en ferait toute une histoire.

- Tu es sûre que tu ne veux pas plutôt y aller en taxi, je demande à Morgane à un moment où une ouverture me permet de la rattraper en me faufilant entre un employé en costume cravate et une jeune fille aux cheveux couleur de l'arc-en-ciel.

Je n'ai pas beaucoup d'espoir, parce que ma sœur est du genre têtue et qu'elle tient vraiment à agrandir sans arrêt sa garde-robe, malgré le peu d'argent que nous avons. Je la vois cependant se mordre la lèvre, regarder la foule, et dire :

- Bon, d'accord.

Croyez-le ou non, ici, il faut même faire une longue queue pour monter dans un taxi. Ce n'est qu'une bonne demie heure plus tard que notre tour vient.

- Nous souhaitons nous rendre à l'institut Excalibur, s'il vous plaît, dit Morgane.

- Vous allez au lycée des surdoués ? demande le chauffeur en soulevant non sans peine la valise pleine à craquer de Morgane. Qu'est-ce que vous avez donc comme talent spécial ?

Apparemment, nous lui semblons des ados tout ce qu'il y a de plus ordinaires. C'est à la fois flatteur pour notre déguisement d'humain, et en même temps un peu vexant.

Ma sœur lui adresse son plus beau sourire. Celui qui l'a fait passer pour une jeune fille bien sous tous rapports. Pas celui qu'elle réserve à ses futures proies. Je veux dire, aux garçons qu'elle souhaite envoûter.

Le lycée des Surnaturels (bxb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant