Chapitre 67

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Mon cœur, qui battait déjà beaucoup trop vite, double sa cadence. À ce rythme-là, il va finir par lâcher avant la fin de l'heure. Voire de la demi-heure. Mes mains tremblent comme des feuilles et une sueur froide dégouline le long de mon dos. 

Que vais-je bien pouvoir répondre ?! Je pourrais tenter quelque chose comme : "ce n'est pas moi. C'est un autre garçon fée". Mais je doute que cela passe. Et si je balance Hector et ses agissements - ce qui me ferait infiniment plaisir, croyez-moi - il s'empressera ensuite par vengeance de dévoiler le rôle joué par Morgane, j'en suis sûr. Et ma jumelle a déjà des ennuis !

Je reste donc figé un long moment, les yeux fixés sur la vidéo qui tourne en boucle, la bouche entrouverte et l'esprit désespérément vide.

M. Marlin se racle la gorge et me reprend son portable, comme s'il craignait que je l'éclate soudain sur le sol pour faire disparaître la preuve. Ce qui serait idiot. Je ne suis pas un vieux. Je sais bien que la vidéo est en ligne et non sur l'appareil.

— Et alors, Vivien ?

Je relève très difficilement mon regard vers lui. Son expression reste neutre, comme si nous discutions d'un sujet sans grande importance et non du fait que j'ai apparemment dévoilé sur internet l'existence des créatures surnaturelles. 

— C'est juste que... que... Ces derniers temps... mes pouvoirs... je crois que... que... que je souffre de maginélose.

Et soudain, je me rends compte que mes yeux sont remplis de larmes. Lesdites larmes ne se contentent bientôt plus de mes yeux et entreprennent de dégouliner sur mes joues. Je voulais rester digne, et voilà que je m'en révèle complètement incapable ! Et le pire dans tout cela est que je n'ai plus de mouchoir parce que j'ai refilé le dernier à Morgane, à cause de son saignement de nez.

Heureusement, les proviseurs semblent habitués à ce genre de scène, car M. Marlin pousse vers moi d'un geste expert une énorme boîte toute remplie. Avec toute cette réserve, j'ai de quoi sangloter pendant des heures. Mes pleurs s'interrompent cependant presque aussitôt, par pur esprit de contradiction. Je me contente bientôt de n'être plus secoué que d'un hoquet ou deux de temps en temps. Je prends quand même un mouchoir, au cas où.

— Je... Des ailes roses me sont apparues alors que je n'en avais jamais eu avant. Et des pouvoirs chelous, et... Et... Et tous ces boutons...

Ma voix se brise.

— Vous n'êtes pas atteint de maginélose, Vivien, m'assure le proviseur en soupirant.

Je lui jette un regard agacé. Pourquoi est-ce que personne ne me croit jamais ? 

— Qu'est-ce que vous en savez ? Je sais, pour les boutons, c'est apparemment Titania. Mais comment son philtre d'amour raté aurait-il pu me donner des pouvoirs et des ailes ?

Je sais, je devrais parler d'un ton plus respectueux, compte tenu des ennuis dans lequel je suis moi aussi plongé jusqu'au cou. Mais je suis beaucoup trop tendu pour mesurer mes paroles. Et puis, une personne qui peut exploser à tout moment finit par ne plus faire attention à ce qu'elle dit. Finalement, j'imite le comportement de Morgane que je critiquais il y a même pas cinq minutes. Nous ne sommes sans doute pas jumeaux pour rien.

Oh, et je tiens à ajouter pour ma défense qu'un loup-garou qui embrasse comme un dieu est un train de se lier pour toujours à le femme de sa vie. Une femme qui n'est pas moi, bien sûr, puisque je suis un homme (logique). Le bus doit être arrivé à Marseille, à l'heure qu'il est.

M. Marlin ne paraît heureusement pas se formaliser de mon insolence.

— Vos pouvoirs sont juste en train de se développer un peu tardivement. C'est quelque chose qui n'est pas si rare. Surtout compte tenu de votre nature si particulière.

Le lycée des Surnaturels (bxb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant