Chapitre 47

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Après deux correspondances, je finis par sortir de la gare de Saint-Malo, d'humeur toujours aussi morose. Un énième coup d'œil à mon téléphone m'apprend qu'Auguste ne m'a envoyé aucun SMS. Même pas pour me demander si j'étais bien arrivé. Qui sait, l'un de mes TGV aurait pu dérailler ? Ou j'aurais pu me tromper de train et me retrouver seul dans un endroit étranger. Comme... comme Brest. Croyez-le ou non, je n'ai jamais mis les pieds à Brest et je serais bien capable de m'y perdre. Mais bon. Ce n'est visiblement pas quelque chose qui préoccupe mon actuel petit ami.

Je sors sur le parvis venteux et regarde à droite et à gauche sans voir Maman. Tout autour de moi, des parents et amis sont venus accueillir les autres voyageurs. Ils s'en vont tous ensemble en papotant joyeusement. Je finis par être le seul encore planté là.

Je fronce les sourcils. Vais-je devoir rentrer à pied ? J'avais pourtant envoyé mon horaire d'arrivée. C'est que ma valise est lourde, avec tous les vêtements que j'y ai mis ! Enfin... C'est agréable d'être attendu avec une telle impatience par sa propre famille après avoir été rejeté par son petit-ami.

En plus, il pleut. Des gouttes fines s'écrasent devant moi comme pour me narguer. 

J'attrape la poignée de ma valise avec résignation et m'apprête à me mettre en route à pied, tel le malheureux que je suis, lorsque j'entends un :

— Ohé, Vivien !

Je tourne la tête et aperçois un type inconnu en train de me faire de grands signes depuis une petite voiture blanche à la carrosserie cabossée.

Je m'approche avec circonspection. C'est un humain ordinaire, j'en suis presque certain.

— Euh... Bonjour ? Qu'est-ce que... ?

L'homme ouvre la portière et extirpe son corps interminable. C'est un gars tout maigre qui a l'air d'avoir été étiré vers le haut. Il doit faire trois bonnes têtes de plus que moi. Il me tend une main que je serre par réflexe. Je remarque au passage qu'il porte des bracelets de force avec des pointes et un piercing sur le menton.

— Salut ! Allez, hop, allons-y avant d'être trempés !

Il récupère sa longue main et l'enroule autour de la poignée de ma valise. Stupéfait, je le regarde la soulever et l'enfourner dans le coffre.

— Euh... Mais qui êtes-vous, monsieur ? je bredouille.

Il ouvre la bouche. Il a aussi un piercing sur la langue.

— Je suis Léon, ton futur beau-père.

Clac !

Il referme le coffre.

— Mon... Mon futur beau... Oh, Maman doit avoir un nouvel Envoût... euh... petit-ami !

Il se fourre cependant le doigt dans l'œil s'il s'imagine que ma mère va un jour l'épouser. Enfin, laissons-le rêver. Il arrive que les Envoûtés s'enflamment un peu, au début.

Le dénommé Léon m'adresse un sourire lumineux.

— Oui, c'est ça ! J'avais hâte de faire ta connaissance, Viv'. Ta Maman parle très souvent de toi.

Viv' ? Bon, c'est toujours mieux que "garçon fée", je suppose. L'envoûtement de Léon le rend cependant mentalement incapable de percevoir ma nature, même si je me mettais soudain à agiter mes ailes toutes neuves juste sous son nez. Mais, comme ce n'est pas le cas des autres humains présents dans la gare, je m'en abstiens.

Je m'installe à l'avant à côté de lui. Un petit squelette en plastique pendouille devant mon nez. Ce type-là semble encore plus fan d'Halloween que les loups-garous. Qui décore sa voiture pour ça ?

Le lycée des Surnaturels (bxb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant