Le lycée des Surnaturels (bxb)

Chapitre 9

Quand je retourne dans ma chambre, les joues toujours cramoisies d'embarras, je remarque que mon colocataire est là, assis devant son bureau. Il se retourne en m'entendant entrer. Il s'agit bien d'un triton doté d'une magnifique peau sombre. Il porte ses cheveux noirs longs jusqu'à la taille, comme le font le plus souvent les représentants de son espèce.

— Salut, me dit-il avec un sourire chaleureux. J'ai pris le lit de droite. J'espère que ça ne te dérange pas ?

Je dépose ma serviette sur ma chaise de bureau.

— Non, pas du tout. Je m'appelle Vivien Guyonvarc'h, au fait.

Il me sourit de plus belle.

— Enchanté Vivien. Je me nomme Jérémie Kérébou. Euh... Est-ce que tu es un magicien ?

Sa question n'est pas complètement dénuée de sens. J'ai enfilé mon t-shirt The Witcher et je ne porte donc pas cette horrible veste verte qui montre à tout le monde que je suis ce fameux "garçon fée".

Pendant une seconde ou deux, j'ai la tentation de répondre que, oui, je suis un magicien, pour éviter toute réaction agaçante (et puis parce que les magiciens sont cools, je trouve). Mais ce Jérémie finira bien par savoir la vérité, alors je m'oblige à répondre :

— Non. Je suis une fée.

Le triton sursaute. Je vois ses yeux se baisser en direction de ma poitrine, cherchant visiblement à y distinguer quelque chose. Puis il semble se rendre compte que son comportement n'est pas des plus appropriés et il se met à son tour à rougir comme une pivoine.

— Oh..., balbutie-t-il finalement. Euh... Tu n'es pas une fille, n'est-ce pas ?

Je me laisse tomber sur mon lit en soupirant.

— Pas à ma connaissance.

Il faut croire que la rumeur de mon existence n'était pas encore parvenue à toutes les oreilles. J'ignore s'il faut m'en réjouir ou non. Disons que oui.

Nous passons l'heure suivante à ranger nos affaires dans le placard. Il ne reste bientôt plus que mes posters que je n'ai pas le courage d'installer. Il est de toute façon l'heure d'aller dîner.

Jérémie et moi nous mettons en route.

Je me laisse entraîner dans mes pensées en chemin. Peut-être reverrai-je le loup-garou de tout à l'heure ? Cette pensée provoque en moi des bouffées de honte et... et un autre sentiment que je réprime aussitôt. C'est ridicule. Je n'ai pas envie de me faire remarquer encore plus en commençant à sortir avec un autre gars (en imaginant qu'il en aie aussi envie). Et surtout pas avec un alpha. Maman nous a bien dit qu'ils étaient pénibles (je suppose qu'elle parle d'expérience). Sans compter que je ne l'ai croisé qu'une seule seconde. Si j'ai perdu la tête, c'est uniquement à cause de sa ressemblance avec Geralt de Riv. Et puis, je suis allergique à lui, ce qui met fin à toute discussion. Voilà. Je vais oublier cet épisode et m'efforcer d'éviter ce type jusqu'à la fin de ma scolarité. Ce qui ne sera sans doute pas nécessaire. C'est un loup. Il participera un jour ou l'autre à sa cérémonie de la Grande Lune, y rencontrera son âme sœur et passera le reste de sa vie à ses côtés et oubliera que nos lèvres se sont un jour accidentellement posées l'une sur l'autre. Voilà, voilà. L'incident est définitivement clos, quoi qu'en pense la savonnette changeuse de destin qui a trouvé drôle de me faire tomber sur lui.

Sur ces sages conclusions, nous arrivons au réfectoire situé dans une immense rotonde. Des tables rondes également sont installées çà et là sans que je ne puisse y discerner une organisation quelconque. Avec le lustre immense accroché au plafond, on se croirait plus dans un restaurant de luxe que dans une cantine.