Chapitre 14

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Quand j'ouvre la porte de ma chambre, je manque d'entrer en collision frontale avec Jérémie qui s'apprêtait à en sortir.

— Tu es prêt ? me demande mon colocataire après avoir réussi à s'arrêter in extremis. Je ne savais pas si je devais t'attendre ou non.

Je cligne des yeux.

— Prêt pour quoi ?

Le triton tire sur sa fermeture éclair de la veste légère qu'il a enfilée par-dessus ses vêtements civils. Je remarque qu'il a mis du fond de teint sur le visage pour camoufler ses écailles.

— Pour la fête, bien sûr !

— Oh... Tu y vas, toi aussi ?

Il paraît surpris.

— Bien sûr que oui. C'est la tradition, non ?

— Hum... Pour ma part, je passe mon tour.

Mon colocataire ouvre de grands yeux.

— Vraiment ?

Je vais m'asseoir devant mon bureau.

— Vraiment.

Je sors mon manuel de mathématiques pour montrer ma détermination. M. Markovitch nous a donné quelques exercices à faire. Autant m'y mettre tout de suite pour ne pas prendre du retard. C'est en remettant tout au lendemain qu'on finit par se laisser déborder.

Comme je m'y attendais, la vue du livre paraît agir comme un repoussoir sur le triton qui recule vivement en direction de la porte.

— À plus tard, alors, me lance-t-il avant de se précipiter dehors et de fermer la porte derrière lui.

Je ferme les yeux un instant, savourant ma solitude. J'aime beaucoup Jérémie, mais cela me manque de ne pas avoir un espace juste à moi, comme ma petite chambre à la maison. Bon, certes, il s'agissait d'une tranquillité toute relative, car ma mère et mes sœurs ne se sont jamais gênées pour débarquer sans frapper à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit. Les fées considèrent le respect de la vie privée comme un élément très secondaire. Surtout lorsqu'il s'agit de ma vie privée. Parce que vous imaginez bien que Morgane pousserait de grands cris si je débarquais dans sa chambre sans prévenir.

Je bâille en observant mon manuel de mathématiques d'un œil vitreux. Sa couverture jaunâtre n'est pas très engageante. On y voit deux jeunes gens, un garçon et une fille (des humains), en train de résoudre ensemble une équation avec un air beaucoup trop enthousiaste pour être naturel.

Je me gratte la tête. Ai-je vraiment besoin de me donner tout ce mal ? Mon prochain cours de maths a lieu après le week-end et ce sont les seuls devoirs qu'on nous a donné à faire pour le moment.

Je range le livre dans mon sac. Tout le monde sait qu'il est important pour la santé mentale de se détendre de temps en temps. Je ne vais jamais réussir à tenir toute l'année scolaire, sinon. Et rien de mieux pour se détendre que de se plonger dans l'univers de The Witcher 3. Si j'ai encore de l'énergie d'ici une heure ou deux, j'installerai peut-être d'ailleurs mes posters. Ils vont finir par se froisser, si je les laisse roulés trop longtemps.

Mon ordinateur portable - trop vieux - met des heures à s'allumer. J'en profite pour me changer et enfiler des vêtements plus confortables que mon uniforme et je retourne m'avachir sur mon fauteuil. L'appareil mouline toujours. Je tourne sur mon fauteuil à roulettes pour m'occuper comme je le peux.

On frappe à la porte. Persuadé qu'il s'agit de Morgane qui cherche à nouveau à me faire changer d'avis, je grogne :

— Quoi encore ?

Le lycée des Surnaturels (bxb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant