Chapitre 21

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Il ne reste plus qu'à traverser ce rideau brumeux, celui présent dans la faille qui se dresse devant nous. Même si ce n'est pas la première fois que j'en vois une, je reste toujours sans voix face à ça, tout comme l'armé silencieuse présente tout autour moi et qui se contente de l'observer, avant que tout les yeux se rivent sur Rick, s'avançant, n'étant qu'à quatre ou cinq mètres du voile blanc.

Rick : Alors nous y sommes...

Il finit par s'arrêter et se tourner dans notre direction, armé de sa lourde épée faisant presque sa taille. Je jette alors un regard à Victoria et Bret qui sont à ma gauche.

Rick : Notre vengeance arrive enfin à son terme.

Son regard est vide et la manière dont il tient son arme, la laissant traîner au sol, ne dégage rien d'autre que de la haine pure, destructrice.

Rick : Finissons-en.

Sans rien dire de plus, il entre dans la faille, ne devenant qu'une silhouette dans la brume avant de disparaître, laissant le silence derrière lui. Personne ne bouge, seuls quelques regards s'échangent mais rien de plus. C'est après de longues secondes d'hésitation que, du coin de l'œil, je vois Victoria s'avancer, elle aussi pour faire face à l'armé.

Victoria : Qu'est ce que vous attendez ?!

Ses paroles attirent l'attention de tout le monde, alors qu'elle nous fait face.

Victoria : Vous vous êtes battu pendant tout ce temps pour rester planté là ?!

Quelques voix, plutôt discrètement, s'élèvent petit à petit derrière moi.

Victoria : On ne peut plus faire place au doute, on ne peut plus reculer !

Le bras tendu vers ce faux ciel, son arc à la main et un sourire sur le visage, elle inspire profondément avant d'hurler de toute ses forces.

Victoria : Rentrons chez nous !

S'ensuit un cri de guerre si puissant et uni qu'il en fait trembler mes organes et agresse mes tympans. Chaque vibration venant de chaque personne, je les ressens...

Bret : Rick a tort.

En me tournant vers lui, je me rends compte que le vide qu'arboraient habituellement ses yeux n'est plus là et a été remplacé par intense vivacité, fixant le bras de Victoria encore levé que l'on voyait à peine à cause du monde fou qui venait de s'élancer en direction de la faille.

Bret : Il ne peut pas gagner.

Au même moment, des sortes de lignes grises apparaissent petit à petit sur ses bras pendant que du métal sous forme liquide sort de la paume d'une de ses mains.

Bret : Mais...

Le métal prend peu à peu la forme d'une masse qu'il finit par prendre en main.

Alea : Bret ?

Il m'ignore, se contentant d'observer droit devant lui, avec ce même regard perçant.

Bret : Je veux le voir.

Sans prévenir, il s'élance lui aussi, se mêlant ainsi à la foule qui déferle tout autour de moi et qui s'engouffre dans la crevasse.

Alea : Bret !

A peine ai-je le temps de crier son nom qu'il disparaît.

Alea : Bret ! Bret !

Sans réfléchir, je m'élance moi aussi à sa recherche. Qu'est-ce qu'il lui a pris sérieusement mais surtout, qu'est ce qu'il s'est passé ? Ces lignes parcourant son bras et ce métal sortant de sa peau... Je repense à une légende que m'avait raconté mon grand-père il y a longtemps, sur des gens ayant la capacité d'utiliser du "mana" présent dans leurs corps sauf que ces personnes ont disparu avec le temps.

Alea : Comment est-ce que c'est possible ?

Alors que j'avais pris bien soin de ne toucher personne en gardant un minimum de distance avec les autres malgré le chaos de cette mer humaine déferlant vers l'entrée dans la faille vient compliquer tout ça, formant un entonnoir me forçant à être encore plus attentive. La brume est tellement intense que je n'arrive pas à voir ce qui m'entoure. Je me retrouve à marcher dans la peur, petit pas par petit pas, m'aidant du bruit. Pour la première fois de ma vie, j'ai cette terrifiante sensation que chaque pas que je fais peut être le dernier sans que je ne m'en rende compte. Le moindre mouvement fait de travers, la moindre hésitation, le moindre bruit que je n'aurais pas pris en compte et la marque viendra faucher ma vie dans une longue agonie. J'ai peur... J'ai peur mais il faut que j'avance au plus vite pour passer le moins de temps dans cet enfer. Des cris et de lointains bruits de combat se font entendre alors que la brume, de base si blanche et lumineuse, change lentement au fur de mon avancée devenant plus sombre, signe de mon arrivée dans la cité d'Asha, avant que je finisse par en sortir.

Alea : Bret !

La faible lumière souterraine de la cité, produite par ces orbes de lumineuses accrochées au plafond, est bien là, elle n'a pas changé, tout comme ces bâtiments, contrairement au calme qui y régnait. Les deux grandes portes en pierre qui bloquaient habituellement la faille sont grandes ouvertes, laissant déferler un flot d'hommes et de femmes voulant retrouver leur maison. Les gamins qui jouaient dans les rues ont été remplacés par les soldats de la cité et les combats. Au sol jonchent des corps, flottant parfois dans leur propre sang lorsqu'ils ne sont pas dans une longue agonie à demander de l'aide en utilisant leurs voix qui se fondent parmi les chocs des armes.

Encore une fois, cette même odeur me parvient. Je la déteste, au plus profond de moi, tout comme ce que je vois. Malgré la puissance de celle-ci, je me bouche le nez avec une de mes mains pour ne plus la sentir et enfin me mettre à le chercher. Où est-il ? J'ai beau tout balayer du regard, je ne le vois pas. Ma marche s'accélère progressivement. Je dois le retrouver, je ne peux pas attendre. Et c'est ainsi que ma course commence, passant d'une rue à l'autre tout en essayant de ne pas attirer l'attention sur moi, jusqu'à sortir de ce groupement de ruelles où se déroulent les combats.

Je m'arrête dans une de ces rues vides, seule, me rendant compte qu'il ne peut pas être ici, il n'a pas pu arriver jusque là, personne n'a pu le faire. En me retournant pour faire demi tour, je tombe nez à nez avec un homme qui m'approche, tenant fermement une hache. C'est moi qu'il veut...

Inconnu : Ca ne sert à rien de fuir ma grande.

Alors que ses pas accélèrent petit à petit, je m'engouffre dans une petite ruelle qui était sur le côté.

Inconnu : Reviens là !

Oui, je ne peux pas m'arrêter. En jetant un coup d'œil derrière moi, je le vois me poursuivre, alors je cours, le plus vite possible, de toutes mes forces. Je ne peux pas m'arrêter, je n'ai pas le droit. Je change à nouveau de direction à la première occasion qui se présente, tournant dans une énième ruelle vide, chose qu'il fait aussi en étant encore plus proche qu'avant, jusqu'à ce qu'il me rattrape. Maintenant dans mon dos, alors qu'il pouvait simplement me pousser pour me faire perdre l'équilibre, il décide d'attraper mon poignet et de me tirer vers lui. Le mouvement est si violent qu'il me fait tomber en arrière. Je suis à sa merci et il me le fait bien comprendre en agrippant sa hache à deux mains et en la levant bien au-dessus de sa tête, prêt à l'abattre d'un coup, mais quelque chose l'arrête. A ce moment, un hurlement lointain se fait entendre et vient me glacer le sang.

Inconnu : C'est quoi ça ?

Déstabilisé, il regarde autour de lui en baissant son arme.

Alea : Elle arrive.

Inconnu : Quoi ?

Notre bourreau arrive.

Alea : La marque... Elle vient pour nous.

Pitié... Non... Pitié... Je ne veux pas revivre tout ça.

La Pyramide de DieuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant