La Pyramide de Dieu

Chapitre 43

Je le fais pour elle, pas pour toi.

Woe : Je l'ai bien compris, ne t'inquiète pas.

Tout comme moi, il observe les longues et immenses colonnes vertes, luminescentes, qui viennent parfois éclairer ce faux ciel plongé dans les ténèbres. On l'admire, assis sur un bout de falaise au bord d'une montagne perdue parmi tant d'autres autour de nous. Les crépitements produits par le feu se trouvant derrière nous, réchauffant le sommeil de Mady, sont si apaisants que j'aimerais rester ici à admirer un tel spectacle pour le reste de ma vie.

Woe : Elle n'a pas grandi ?

Alea : Pas dans sa tête.

Woe : D'ailleurs, c'est étrange que vous n'ayez pas tant changer.

Alea : Il faut croire que le temps ne s'écoule pas partout de la même manière.

Il reste un moment plongé dans le silence.

Alea : Tu penses sincèrement que la Pyramide te montrera qui étaient tes parents ?

Woe : Oui, sinon à quoi bon risquer ma vie ?

Il n'était pas aussi ignorant et tête brûlée que je le pensais, à moins que ça soit à cause de sa disparition.

Alea : Depuis que je t'ai rencontré, j'ai toujours eu du mal à te considérer comme autre chose qu'humain.

Woe : C'est parce que c'est une humaine qui m'a élevé, avec leur culture, venant de l'extérieur de la Pyramide.

Alea : Notre culture...

Woe : Tu ne veux toujours pas accepter le fait que tu es une création de la Pyramide, comme moi ou Mady ? Tu ne veux pas accepter que tu ne viens pas de l'extérieur ?

Alea : Non.

Il me lance un regard, l'espace de quelques secondes, qui le détourne de toutes ces lumières présentes dans le ciel.

Woe : Alors, qu'est-ce que tu es ?

Alea : Je cherche encore la réponse.

Il finit par s'allonger.

Woe : Et qu'est ce qui t'empêche de la trouver ?

Qu'est ce qui m'en empêche ?

Alea : Ma peur.

Woe : Peur ? De quoi as- tu peur ? De la perdre elle aussi ? Qu'il soit mort pour rien ?

Alea : Oui...

Woe : Tu n'as pas à avoir peur, Alea... Affronte ta peur, affronte la Pyramide et tu verra, tu te rendras compte que tu n'as rien à perdre.

L'affronter... Dit comme ça, ça parait si simple mais, en vérité, je n'ai aucune idée de comment m'y prendre. Comment est-ce que je peux affronter ou même battre quelque chose pareil ? Il se lève, secouant un peu ses habits pour enlever la poussière qu'il avait sur lui.

Woe : Je n'ai pas l'impression que cet endroit dispose d'un cycle de lumière, contrairement aux autres.

Alea : Tu veux que j'aille la réveiller ?

Woe : Oui, pourquoi pas. On va pas tarder à reprendre la route.

On reprend la route ? Encore ?

En repensant à ces mots, un frisson parcourt mon dos alors que j'avance seule avec la brume de la faille qui m'entoure. Je m'arrête, regarde derrière moi pour être sûre que personne ne nous suive... Pour être sûre qu'Il ne soit pas derrière moi... puis reprends ma route avec comme seul repère une lointaine lumière troublée par le brouillard. Au fur et à mesure, cette lumière devient de plus en plus nette et claire jusqu'à briller de mille feux, faisant fuir toute cette brume. Le vent vient, pour la première fois depuis longtemps, caresser ma peau alors que, du haut de cette colline, mes yeux se posent sur cette vue extraordinaire donnant sur un horizon infini et un petit village bien familier dans une vallée en contrebas. C'est en levant ma tête que je l'aperçois enfin, le ciel, aussi grand et bleu qu'il l'à toujours été. J'étire mes bras, profitant de la chaleur du soleil et de la fraîcheur de la brise. Cependant, une sensation étrange m'attrape et me ramène à la réalité. En me retournant, j'aperçois Mady et Woe sortir bouche bée de la colonne brumeuse qui servait de faille et qui disparaît lentement au sommet de cette colline.