La Prophétie des Surnaturels ~ 1. Maudite

Prologue

[Chapitre corrigé]

Les yeux pleins de larmes, je l'observai dormir. Mon Ange, l'homme que j'aimais. Son visage était paisible, sa bouche légèrement entrouverte, son corps étendu sur le sol, de côté, une main tendue vers moi. D'ailleurs, à bien y regarder, la mienne était juste en dessous, et je ne me sentais pas de l'enlever.

Si je m'en allais, c'était fini. Si je m'en allais, il pouvait continuer à vivre normalement, entouré des siens. Il n'était pas un monstre – c'était moi qui l'était.

- Ariana ?

Je lui souris, mais ça ne pouvait pas cacher ma tristesse. Il la verrait, dans tous les cas – il voyait toujours tout, c'était mon âme-sœur, non ?

- On en a déjà parlé, mon Amour...

- Je dois aller affronter mon Père, tu le sais ! On ne peut pas continuer comme ça indéfiniment !

D'un seul coup, il était réveillé, redressé, prêt pour la millième fois à argumenter, à se battre contre moi, alors même qu'il ne lâchait pas ma main.

- Par les Astres, ce n'est pas seulement ta décision ! Tu ne peux pas choisir d'effacer ma mémoire comme ça !

- Effectivement, intervint une voix, ce serait dommage que tu me prives de mon fils.

Mes yeux s'écarquillèrent et je virevoltai pour faire face au second Astre le plus puissant. Lucifer, créateur des Damnés et de ses monstres difformes qu'étaient les Cauchemars – mais qui étais-je pour juger. Un sourire carnassier aux lèvres, il m'attrapa pour glisser un de ses ongles couvert de poison sous mon cou. Si la moindre goutte pénétrait mon organisme, Immortelle ou pas, j'en succomberais.

Mon âme-sœur se leva doucement, magnifique avec ses ailes blanches striées de noir.

- Ça faisait longtemps, commença le Dieu.

- Jamais assez, crachai-je.

Il fit mine d'être offensé avant de me barbouiller le cou de poison noir. La frustration se lisait sur le visage de celui que j'aimais, mais ni lui ni moi ne pouvions bouger.

- Devinez qui m'envoie ! s'exclama d'une joie malsaine Lucifer. Ce cher Jehovah, mon frère bien aimé ! Ah, non, attendez... Je ne parle pas d'amour – je ne suis pas défaillant, moi.

La colère bouillonna en moi, et je me dégageai de lui sans même savoir comment, perdant quelques instants le contrôle de mon esprit. Mon Ange me positionna derrière lui.

- Oh, mes petits... Vous savez déjà que vous êtes finis. Vous pensiez réussir à vous cacher indéfiniment ? Peut-être que sans ma petite voix qui chuchotait à l'oreille de Jehovah, il ne nous aurait jamais ordonné de venir vous récupérer, mais... Quel dommage que je sois là.

- Tu es un monstre ! hurlai-je.

Il ricana.

- Mais regarde-toi, Ariana ! Tu vas provoquer ta chute et celle de celui que tu... aimes.

Répugné, il désigna son propre fils de sa griffe, et leva l'autre main, raide, dans un signal qui rameuta des dizaines et des dizaines de Damnés, des sortes d'anges diaboliques, noirs comme l'encre des cheveux aux ailes. Les feuilles bougèrent, et en plus d'être encerclés dans les airs, nous l'étions à terre par les Cauchemars. Des larmes envahirent mes yeux quand je compris que je ne pourrais même pas le sauver.