La Prophétie des Surnaturels ~ 1. Maudite

70. Sans émotions

Je crus défaillir.

- Non... Cam, c'est impossible.

Il haussa les épaules.

Je ne ressens rien. Pas le moindre soupçon d'émotions.

- Et... A l'instant, tu étais pourtant... démonté ?

- Je ne sais pas ce que j'ai fait, Aria. Et je ne comprends toujours pas ce qui m'est arrivé.

- Mais... et Mila?

J'essayais de me persuader que c'était faux. Ça ne pouvait pas être vrai.

- Elle me troublait légèrement, c'est vrai. J'avais l'impression de ressentir des choses, presque, mais non. J'avais envie de la protéger, rien de plus. Je ne ressens rien d'autre que de la colère, juste de la colère, ou rien. Que du négatif.

Oh. Mon. Dieu.

Il n'en a jamais rien à faire des autres, car il ne ressent rien. Rien. RIEN.

- Mais pourtant, parfois...

C'était pour ça que quand je cherchais dans son esprit, il n'y avait que du vide, de la lassitude. C'est pour ça qu'il n'en avait rien à faire de toutes les filles. Et personne n'était au courant.

- Laura met ça sur le compte de la mort de Mila, et je t'avoue que j'aimerais vraiment être triste par rapport à elle. Mais je n'y arrive pas.

Et moi je n'arrive pas à y croire.

Le trouble qu'il ressentait pour Mila... Ce n'était pas de l'amour. C'était une simple envie de protéger. D'essayer.

- Pourquoi as-tu embrassé Mélina, alors?

Nouveau haussement d'épaules.

- Elle aussi trouble mon organisme. Je ne comprends pas pourquoi... Mais j'ai senti quelque chose avant de l'embrasser. Je ne sais pas ce que c'est. Après tout, je suis un débutant, non ? Les seuls moments où j'aurais pu éprouver de l'amour, celui-ci était interdit et considéré comme une maladie.

De l'envie. Du désir. Sans doute. J'hallucinais totalement.

Je me relevai, déglutis péniblement.

- OK, Cam. Je vais y aller.

- Attends ! Aria... Il faut que...

J'observai ses blessures à la main qui avaient du mal à commencer à cicatriser.

- Viens avec moi. On va te soigner.

Il rit, sans joie. Il ne la ressentait donc jamais, la joie?

- J'aurais cica...

- Tu viens, point.

Mon ton était sec et cassant. Mais Cam, à ma grande surprise, suivit. Je retins les larmes de couler, je n'allais pas pleurer, je ne pouvais pas. Mais c'était tellement triste ! Je les chassai, et nous arrivâmes devant la porte de Mélina. J'entrai sans même frapper. Laura et elle parlaient activement, et Mélina pleurait, les yeux et les joues rouges. Elles se turent en nous voyant. Un éclair de... panique – je ne savais pas quoi penser, du fait qu'il ne ressente rien – passa dans les yeux de Cam. Peut être qu'il y avait encore de l'espoir pour lui faire ressentir les choses, pour le faire tomber amoureux, même après plus de huit siècles où il avait perdu le peu qu'il restait de son humanité.

- Il faut le soigner, déclarai-je à Mélina. Accélérer le processus de guérison.

Mélina hocha la tête. Je me pris un verte d'eau et commençai à boire. La guérisseuse sécha ses larmes, et Cam s'approcha en soupirant. Et, bon sang, je n'arrivais pas à imaginer que tout ce qu'on avait cru qu'il ressentait était en fait inventé. Ses sourcils se froncèrent.