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Tout était noir, enfin, elle voyait ce qui l’entourait uniquement derrière le tissu noir qui lui recouvrait les yeux. Elle était privée de sa vue, de sa parole car elle était ligotée et bâillonnée. Karleen savait cependant qu’elle était transportée dans une voiture qui finit par s’arrêter.

      Quelqu’un la tira hors de la voiture, elle put enfin sentir le vent frais lui fouetter le visage et éteindre le feu dans ses poumons. Privée de sa vue, elle suivit ses tortionnaires à l’aveuglette mais les oreilles aux aguets. Pourtant il n’y avait que la poigne de fer et les pas lourds qui lui indiquaient qu’il s’agissait d’un homme.

Où allait-on l’emmener ? Allait-on la tuer, la vendre ?  Elle ou ses organes étaient ciblés ? Son cœur cognait douloureusement contre sa poitrine et ses larmes dévalaient ses joues.
 
Karleen aurait voulu questionner l’homme qui la tirait mais le bâillon qui pressait sa langue ne lui permettait que d’émettre des grognements incompréhensibles.

Ils s’arrêtèrent un moment puis, celui qui la tenait l’abandonna.
       Ne sachant pas quoi faire ; Karleen se mit à se frotter les poignets pour essayer de retirer le tissu qui la ligotait. Mais au lieu de sentir les liens se desserrer, ses poignets commençaient à s’écorcher ce qui la stoppa dans son élan.
   Le découragement l’envahissait en plus de la peur qui l’étouffait c’est alors qu’elle sentit une main chaude s’enrouler autour de son bras et une odeur de savon bon marché lui piquer les narines.

-« Allez suis-moi hayati n’aies pas peur. » La voix était chaude et semblait pleine de bonnes intention mais Karleen ne baissa pas sa garde pour autant.

La dame l’attira quelque part, puis referma une porte.

-« Je vais retirer ton bâillon, il a dû te faire souffrir ! » Et elle le fit. Karleen se massa les poignets en regardant la dame d’un œil mauvais.

-« Où suis-je, qui êtes-vous ? Que voulez-vous de moi ? » Demanda Karleen en se massant les poignets.

-« Moi je suis Sana. Pour les autres questions, désolée mais je ne peux y répondre. Maintenant douchez-vous et quand vous aurez fini je vous prierai de mettre les vêtements que j’aurai laissé sur le lit. » Elle sortit non sans refermer la porte à clé.

    Karleen jeta un coup d’œil à la pièce, une grande chambre décorée luxueusement dans les teintes rouge et or.
    Elle se rapprocha d’une porte au fond de la chambre certaine qu’elle mènerait à la salle de bain. Lorsqu’elle l’ouvrit, elle ne fut pas surprise de voir une baignoire de marbre aux contours dorés et des produits de soins neufs.

     Paniquée à l’idée de désobéir dès le premier jour, elle se dévêtit et entra dans la baignoire.
L’eau chaude qui ruisselait sur son corps ravivait les images de la matinée, qui aurait cru que cette journée finirait ainsi. Elle aurait sûrement ris aux éclats si quelqu’un l’avait prévenu ; c’était si inattendu.
    Elle se rappela de l’odeur âcre de la drogue, le goût salé du corps en sueur qu’elle avait mordu pour tenter de fuir, le bourdonnement dans ses oreilles. Ses parents, ses amis, sa vie... tout était bouleversé juste parce qu’un sale type l’avait décidé.
   Ses larmes se mêlaient à l’eau tiède qui ruisselait sur son corps couleur chocolat.

   Habillée dans une robe de flanelle blanche qui virevoltait au moindre de ses pas, elle attendait anxieuse le retour de Sana.
   Son sort sera scellé, elle savait que la personne qui l’attendait était celle qui l’avait fait enlever. Son cœur pourtant prévenu, loupa un battement lorsque la porte s’ouvrit sur Sana.
    Celle-ci resta sur le pas de la porte et semblait l’attendre. Aussi, Karleen la suivit hors de la chambre dans un dédale de couloirs tapissés.
La marche silencieuse les a conduites dans un grand salon peint avec des couleurs froides, tout comme l’atmosphère qui y régnait. Karleen vit que Sana s’en allait la laissant seule à sort.

-« Sana ne partez pas. Vous êtes le seul visage familier que j’ai ici ! » Elle savait pertinemment qu’ici personne n’est de son côté mais elle osait espérer que la servante malgré ses traits sévères serait prise de compassion.

-« Passez une bonne fin de soirée. » C’est tout ce que répondit la servante avant de partir sans demander son reste.

   Un lourd pas fit craquer le parquet et Karleen déjà sur le qui-vive sursauta. Elle leva la tête et vit un sexagénaire, les cheveux grisonnants, il était cintré dans un smoking noir. Il s’avança vers elle un sourire suffisant pendus aux lèvres. Son regard gris perçant la scrutait toute entière perversement.

Elle comprit ce qui l’attendait.

Les yeux clos [ TOME I ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant