Les yeux clos [ TOME I ]

X

Karleen se tourna brusquement.

Son souffle s’accéléra. Elle avait un peu peur, mais malgré tout elle ne pouvait pas crier.

La personne s’approcha d’elle et l’attrapa. Karleen se retint de crier et se contenta de suivre cette personne.

C’était certainement un homme, il était légèrement plus grand qu’elle et sa poigne était solide. Dans la pénombre de la nuit, elle n’arrivait pas à voir son visage.

Il l’attira derrière des buissons, ils rasaient les murs qui faisaient office de clôture jusqu’à arriver à une guérite où les gardiens étaient endormis.

Une faible lumière les éclaira et Karleen put enfin voir le visage de son ‘’sauveur’’.

C’était un adolescent. Ses cheveux en pagaille débordaient de sa capuche.

-« Nous sortirons d’ici et je vous mènerai jusqu’à une gare. »

Karleen sentit un poids s’ôter de sa poitrine. Pouvait-elle bénéficier d’autant de chance ? Des larmes de joie et de peur mêlés se mirent à dévaler ses joues creuses.

-« Je… Je vous remercie. Je vous remercie. C’est donc fini ? »

-« Chut, ne réveillez pas les gardiens ! J’ai déjà assez de problèmes sur le dos. »

Karleen renifla et hocha vigoureusement la tête.

L’adolescent sortit un badge de sa poche et le passa dans un scanner. Le bip manqua de réveiller les gardiens, mais il n’en fut rien.

La porte de la guérite s'ouvrit.

C’est alors que dans par une nuit sombre, sans étoiles, Karleen réussit à quitter le manoir où elle était enfermée.

C’était le début d’une vie, la fin d’un chapitre. Reverra-t-elle un jour Sana ? Comment lui exprimer sa gratitude ?

Elle a pourtant été si grossière avec elle. Le vent caressait ses cheveux et séchait ses larmes. A toute allure, elle courait derrière l’adolescent qui l’avait aidé.

C’était si bon, la liberté. Elle avait toujours été libre, et c’est aujourd’hui qu’elle en sentait le doux parfum. D’autres personnes se trouvaient-elles aussi dans a situation ? Non, ce n’était pas le moment de penser à ça.

L’avenir était devant, pas derrière les grilles du manoir.

Au bout de quelques mètres, ils s’arrêtèrent essouflés dans un super marché pour s’acheter de quoi reprendre des forces.

Une bouteille d’eau à la main et une barre protéinée de l’autre, Karleen marchait lentement aux côté de l’adolescent.

-« Merci petit. » Lança Karleen.

-« J’ai un prénom »

-« Et c’est ? »

-« Meryl, et le tien ? »

-« Karleen, enchantée ! »

L’adolescent souleva son pouce.

-« Je n’ai jamais rien vécu d’aussi excitant de toute ma vie ! »

-« N’est-ce pas ? » Karleen se mit à rire. C’était comme si tout cela n’avait été qu’un mauvais rêve. Ce genre de chose qui n’arrive qu’aux autres.

Meryl se mit à rire avec elle.

-« Qu’est-ce que tu y gagne toi ? » Demanda Karleen en jetant l’emballage de sa barre dans une poubelle.

Meryl ne répondit pas. Il continua de marcher mais son regard se fit plus triste.
Elle put même voir des larmes se former aux coins de ses yeux noirs. Comme elle, il avait une peau chocolat et des cheveux frisés.
Et il semblait cacher un lourd secret.

-« Tu n’es pas obligé d’en parler, mais… moi j’ai bien envie de partager ce qui m’est arrivé. Tu sais, ça soulage de parler. Tu auras l’impression que quelqu’un d’autre t’aide à porter le fardeau qui te pèse sur le cœur. »

-« … »

-« Eh bien, comment tout cela a-t-il commencé… Ah oui ! Veux-tu écouter depuis le début ? »

Meryl hocha la tête. De toute façon, ils étaient libres, et la gare était encore assez loin…