IV

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La porte s’ouvrit encore une fois sur Sana. Elle semblait hésiter à parler, son regard était fuyant et elle lissait nerveusement les plis de sa jupe.

-« Tu peux sortir… Pour te rendre dans le jardin à l’arrière. Ce n’est pas dehors, mais c’est déjà beaucoup mieux que de croupir dans cette chambre. »

C’était à peine croyable, Sana qui se décidait enfin à parler ! Encore mieux, à faire quelque chose de bien ! Cette bonne dame avait finalement des émotions. Karleen en restait muette de surprise.

-« Pourquoi ne me l’avez-vous pas proposé plus tôt ? »

-« Pour éviter que toutes pensées de fuite ne naissent dans ta petite tête noire. »

Karleen fit un sourire crispé. Etre gentille plus de deux minutes était visiblement impossible pour Sana. Son air taciturne reprenait vite le dessus.

-« Je vois… » Murmura Karleen.

Aucune pensée de fuite n’avait jamais effleuré son esprit. Elle se disait déjà prise au piège, sans issue. C’était comme si on l’avait tellement empêchée de respirer que malgré qu’on la libérait, elle n’y arrivait plus.

Déjà heureuse de pouvoir marcher dans un jardin, elle se leva de son lit, abandonnant le plateau. Comme toujours, elle portait une robe volante. Aujourd’hui elle était jaune moutarde et dénudait ses épaules, laissant ses clavicules désormais saillantes à la vue de tous.

Suivant Sana, elle se retenait de faire du bruit ou un quelconque geste que sa surveillante pourrait trouver déplacé. Karleen ne s’était pas encore promenée librement dans le manoir, elle découvrait de nouveaux couloirs et de nombreuses pièces pour finalement aboutir à une porte en verre qui laissait entrevoir de la verdure de l’autre côté.

Sana poussa la poignée de la porte et à peine l’ouvrit-elle qu’une bourrasque de vent leur fouetta le visage. Karleen se sentait à nouveau respirer. Un pied après l’autre, elle sortit prudemment. Le vent faisait plier les herbes et faisait grincer les branches des arbres. Devant elle un immense ciel bleu s’étirait à l’infini, et le soleil trônait, baignant dans sa lumière.

Les rayons chauds caressèrent la peau de Karleen. Une sensation qu’elle ressentait tout le temps avant, mais dont elle avait fini par perdre l’habitude.
 
   Sentir les rayons du soleil emplirent son cœur d’une douce chaleur et d’un sentiment qu’elle avait refoulé depuis son arrivée. L’espoir. La nostalgie aussi.
Elle s’abaissa, les herbes lui chatouillaient les mollets. Des larmes silencieuses dévalèrent ses joues creuses.

-« Sana… Ma famille me manque. Je veux rentrer chez moi… Je n’ai rien fait de mal ! Pour-quoi alors suis-je autant malchanceuse ? » Les sanglots étouffaient sa voix, les larmes obstruaient sa vue. Et Sana qui restait silencieuse s’approcha et se mit à son niveau.

-« Je ne t’aime pas. »

Les yeux clos [ TOME I ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant