XIX

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Un nouveau jour commença. Une routine reprenait.

Injection le matin. Jus de fruit comme petit-déjeuner. Sana qui lui lançait des regards meurtriers.
Mais Karleen restait silencieuse. Peu importe ce qu'elle pourrait dire, personne ne l'écoutait.

Comme à son habitude, Karleen sortit dans le jardin pour regarder le soleil se coucher. C'était devenu une habitude pour elle. C'était aussi la seule activité qu'elle avait à part passer ses nuits pour satisfaire les envies perverses de son tortionnaire.

Elle arriva dans le jardin, rien ne changeait. Les herbes, les arbres...

Face à elle, le soleil chaleureux essayait de la consoler avec ses rayons chauds. Elle pourrait courir, marcher, s'en aller loin... être libre.

Mais tels les barreaux d'une prison, les grilles qui fermaient le manoir la maintenaient captive, loin du reste du monde. Elle ne pouvait qu'imaginer la sensation.
Dans ses yeux noirs, la lueur de l'espoir s'était éteinte.

Karleen restait là, pendant des heures debout dans l'herbe à contempler les arbres, le soleil couchant, les oiseaux. Son souffle se mêlait au vent sec et froid.
Elle ne se sentait plus capable de poser un pied devant l'autre.

Elle se sentait si vide, si fragile...

**************

En arrivant dans le jardin, il ne s'attendait pas à avoir une telle vision. La silhouette la plus gracile qu'il ait jamais vu se dessinait dans la lumière du soleil taquin.

Elle se tenait debout, mais il avait l'impression qu'elle allait s'effondrer. Serait-ce une fée ou un djin tout droit sorti d'un conte fantastique et tragique ? Car sa détresse s'éparpillait tout autour d'elle.

Il s'approcha lentement, sans détourner les yeux de la fille qui se tenait dos à lui.

-« Qui êtes-vous ? » Murmura-t-il d'une voix étrangement sereine.

Elle ne semblait pas avoir entendu car elle ne bougea pas pendant un moment.

Il s'avança encore et alors, elle se retourna. Les larmes qui roulaient sur ses joues étaient emportées par le vent comme s'il essayait de la consoler.

Leurs regards se croisèrent un instant.
Il la trouva belle.

Mais elle s'effondra aussitôt dans l'herbe.

Ramené à la réalité, il s'avança près de son corps écroulé sur le sol.

Pris d'une crainte qu'elle ne s'évapore à son contact, il se garda de la toucher mais s'abaissa à son niveau pour mieux l'observer.

Prudemment, il l'effleura, la chaleur de son corps le rassura. Alors il l'emporta dans sa chambre.

Il posa son précieux fardeau sur son lit et il put enfin, avoir tout le loisir de regarder la fée qu'il avait trouvé.

Son teint chocolat, Ses cheveux noirs et frisés dans un chignon, ses lèvres pulpeuses, elle était une jeune fille dont la beauté était discrète mais enivrante.

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Karleen ouvrit brusquement les yeux mais la lumière l'obligea à les refermer. En les rouvrant, elle découvrit sans grande surprise qu'elle était dans une chambre.

-« Vous êtes réveillée enfin ! » Tonna une voix grave.

Et Elle le vit.

Des yeux émeraudes, des lèvres couleurs pêches, un teint crémeux qui se jouait de la lumière du jour.
Un sourire envoûtant étirait les commissures de ses lèvres et sur sa tête des cheveux noirs en bataille.

Il avait l'air bon, mais en ses yeux brillait la flamme du désir de domination qu'elle avait lu en l'homme qui la retenait captive.

Son admiration pour sa beauté se transforma en révulsion. Son corps se contracta de peur. Prise de panique elle se releva brusquement.

-« Qui êtes-vous ? » S'écria-t-elle.

Il fronça les sourcils. Il était bien surpris de voir cette femme à l'aspect si fragile, si docile se montrer aussi agressive qu'une chatte effarouchée.

La situation l'amusait, il pouvait faire d'elle ce qu'il voulait comme par exemple la garder ici sans que personne ne lui en fasse la remarque. Cette pensée étira ses lèvres en un sourire narquois.

-« C'est plutôt à vous de me dire qui vous êtes. Vous êtes chez moi ici. » Il se rapprocha de la fille aux allures de fée.
« Je vous ai trouvé, je vous ai prise, par conséquent ? » Il s'appuya sur le lit et rapprocha son visage du sien. Il put voir son visage se crisper, avait-elle autant peur de lui ? « Vous m'appartenez. »

A ces mots, la fille se redressa brusquement, les yeux écarquillés d'horreur et de colère.

-« Vous ne pouvez pas, je ne peux pas vous appartenir ! » murmura-t-elle.

-« Que dites-vous ? »

-« Eh bien je ne peux pas vous appartenir car je suis une personne, un être humain pas un objet. J'ai une vie et vous n'avez juste pas le droit de m'en priver. »
Sa voix tremblait, elle disait ces mots comme si elle brûlait d'envie de les dire depuis longtemps.

Il y avait une telle fougue dans sa voix qu'il restait muet devant elle. Elle marqua une pause et baissa les yeux avant de continuer.
« En plus, si vous me gardez il va venir me chercher ! » continua-t-elle.

-« De qui tu parles ? »

-« Cela a-t-il une quelconque importance de qui il s'agit ? La seule chose qui importe est qu'il viendra me récupérer sans tenir compte de vos désirs. » Sa voix avait pris de l'assurance même si elle gardait les yeux baissés.

-« C'est votre fiancé ? »

Elle ne répondit pas. « C'est donc son amant » Pensa-t-il. Il fut surpris de sentir la frustration et la curiosité monter en lui.

Il se redressa pour quitter des yeux le visage fermé de la fée qui occupait son lit et sortit de la chambre.

Les yeux clos [ TOME I ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant