𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟎

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BETH-ANNE

26 mars 2054.

La porte était fermée.

Fermée.

Personne n'était là.

Plus personne n'était là.

J'étais seule dans cet endroit. C'était joli, je trouvais ça vraiment très joli. Hazel et Odile m'avaient accompagnée, m'avaient fait visiter mon nouveau logement de fond en comble. Elles m'avaient demandé si je voulais qu'elles restent avec moi un petit moment. Odile voulait m'expliquer sa situation, celle dans laquelle j'étais aussi coincée désormais. 

Mais je ne voulais rien savoir, pas maintenant. Pas encore. Je dis non. Puis, le regret m'envahit. Je regrettai ce refus, comme un poids qui s'abat sur le cœur.

Je détestais ma propre compagnie désormais. Mais je ne pouvais pas leur demander de rester, c'était insensé, de demander à des gens que vous avez maltraités de rester à vos côtés, car vous avez peur de votre propre reflet. Je me trouvais ridicule. J'étais seule face à cet endroit que l'on désignait comme mon chez-moi. Ce n'était pas chez moi.

Un petit appartement sans prétention, juste l'essentiel : un lit contre le mur, quelques rangements bon marché, une salle de bain fonctionnelle et une cuisine à peine équipée. Les murs étaient décorés de quelques touches minimalistes, rien de spécial. C'était peut-être accueillant, mais ce n'était pas chez moi. 

Ma vraie maison, celle où je grandis, où j'appris à marcher, à parlé, je ne la revis jamais. Là où je découvris la vie, là où on me trompa pendant tant d'années. Je ne compris pas encore tout ce que je venais de faire, mais une chose était sûre : je venais de me passer la corde au cou.

De cet endroit, nous ne pûmes pas vraiment savoir si la nuit tombait, mais les quelques rayons du soleil qui réussirent à pénétrer à travers les failles d'au-dessus de Rosvilna leur permirent certainement de garder un cycle de vie précis. C'était tellement déroutant, ils n'avaient pas de ciel ici, ils n'avaient pas de soleil, de pluie, de neige, de vent. Sous terre, il fit humide, chaud, c'était étroit et immense à la fois. On se sentit tout petit et surtout, on se sentit immédiatement proches les uns des autres.

Dans ce genre de situation précaire, les gens avaient tendance à se battre, à se refermer sur eux-mêmes et à s'individualiser. Mais ici, c'était tout l'inverse. Je venais à peine d'arriver, mais ça se sentait. Il n'y avait ni haine ni violence entre eux. Certains devenaient fous, certes, mais le monde entier l'était en ce moment. Ce qui m'étonnait et m'effrayait à la fois, c'était cette cohabitation pacifique, cette absence de détestation. Rien à voir avec là-haut. Tout était tellement plus rude à Vienne.

C'était chacun pour soi. La richesse était cruciale pour établir des relations stables, se faire connaître, assurer l'avenir. L'argent dominait, mais les relations jouaient également un rôle déterminant. Si tu étais bien classé, tu bénéficiais d'aides ; sinon, on t'ignorait. C'était pour cette injustice que je m'étais battu pour mes parents. Pour Maman. Pour Papa. Ils avaient toujours cru en moi, et je voulais les aider à remonter la pente. 

Je donnai tout : l'école, des entraînements de plus en plus durs, la tension, le stress, le manque de sommeil. J'avais réussi à aider ceux qui m'avaient élevé, à sauver ceux qui m'avaient aimé, à obéir à ceux qui le voulaient. J'avais tout donné à ceux qui m'avaient menti.

Ô 𝐉𝐎𝐋𝐈 𝐏𝐀𝐎𝐍Où les histoires vivent. Découvrez maintenant