Chapitre 12

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– Tu es peut-être plus agile qu'un humain moyen, mais dans notre monde, cela ne suffit pas ! gronda Azrel. Tu es une Faée ! Recommence.

Je grognai et me remis en position. Si Guillem m'avait assuré que j'avais des facilités pour assimiler les techniques de défense de base, ce n'était visiblement pas l'avis du Démon. En même temps, difficile d'apprendre correctement avec quelqu'un qui refusait de me toucher. J'avais envie de lui hurler que si seulement il voulait bien se donner la peine de me montrer et m'expliquer davantage, je serais moins lamentable. Mais une autre partie de moi s'interdisait de lui adresser plus de mots que nécessaire. Je faisais de mon mieux pour suivre, mais je n'avais clairement pas les compétences requises. De plus, le saignement de la veille avait été long à stopper. J'avais perdu beaucoup de sang, ce qui m'avait conduit à un état d'épuisement avancé que la nuit n'avait pas totalement comblé.

Azrel était froid, distant et d'une arrogance insupportable. J'étais redevenue une étrangère. Pire. J'étais une épine dans son pied. J'avais l'habitude de susciter l'indifférence, ou le dédain, mais venant d'Azrel, cela était curieusement douloureux, je dirais même humiliant. D'autant plus qu'il y avait toujours cette sensation d'attraction mystérieuse qui agitait mes entrailles, amplifiant mon amertume. La colère grondait en moi comme un chien de garde prêt à bondir pour protéger son territoire. Depuis l'incendie de la chambre, la culpabilité me poussait à redoubler d'efforts pour me maîtriser, et la présence de Guillem m'apaisait grandement. Cependant, alors que j'enchaînais les mouvements de blocage et d'esquives, je sentais que j'arrivais au bout de mes limites. Azrel n'essayait pas de se mettre à mon niveau et, encore une fois, je ne parvins pas à éviter le bâton qui lui servait d'arme factice. Je pris le coup au niveau du dos et tombai à quatre pattes sur le sol poussiéreux de la carrière. Je serrai les mâchoires pour ne pas offrir à mon bourreau le plaisir de lui exposer ma douleur. Ne rien montrer. Faire comme si je n'avais rien senti.

– Tu n'anticipes pas, siffla le Faé. À croire qu'il ne t'arrive jamais de réfléchir. Serais-tu stupide ? Faut-il que je te ramène à ce maquereau ?

Réfléchir ? Après des mots d'une telle violence, je n'en étais plus capable. Alors qu'Azrel tournait les talons en déclarant la fin de l'entraînement, je bondis sur mes pieds. Dos à moi, il ne me vit pas m'élancer vers lui. Cependant, il dut percevoir ma présence, car il se décala au dernier moment. Suffisamment tôt pour éviter un choc brutal, mais pas assez pour totalement l'esquiver. Mon épaule le percuta avec une force que je ne me connaissais pas. Ma proie poussa un râle plaintif tout en se reculant. En cet instant, j'avais envie de le tuer, et j'eus la présence d'esprit de poursuivre ma route en courant pour m'éloigner avant que je ne perde complètement le contrôle.

Je fus vite stoppée par le mur magique érigé par Vaëlle autour de sa propriété. Si Azrel ne pouvait pas le franchir, il semblait bien que c'était également mon cas. Je regardai avec dépit la forêt s'étendre de l'autre côté de ce voile translucide et légèrement déformant. Je me laissai tomber au sol. Je m'étais sauvée devant Azrel pour ne pas céder à la colère et lui permettre de me dominer. Il n'y a qu'avec mes parents que j'adoptai cette stratégie. Fuir pour éviter d'être encore plus punie, rabaissée. Me taire et enfouir au fond de moi toute cette rage, ne pas causer d'ennuis si je voulais dormir dans un lit et manger le soir. Tenir le coup.

J'étais toujours hébétée dans cette position quand mon oncle me trouva. Il s'assit auprès de moi sans un mot. Sa proximité réveilla des souvenirs de moments de complicité avec Louan, lorsqu'il venait me soutenir après une sanction injuste. J'étais totalement abattue, mais les larmes ne coulèrent pas. J'étais redevenue cette personne inatteignable, en apparence du moins.

– Vaëlle m'a prévenu que tu étais entrée en contact avec le mur.

Bien sûr, voilà comment il m'avait localisée.

Elementals - la saga d'Armila (livres 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant