Chapitre 15

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Azrel mesurait davantage sa force, c'était certain. Je finissais toujours autant dans la poussière, mais la douleur en moins. Il maintenait entre nous une distance froide, à la limite du méprisant. Cependant, il ne fallut qu'une chute plus impressionnante que les précédentes pour faire voler en éclats ses bonnes résolutions. Je voyais bien à la façon dont il s'était précipité vers moi pour prendre de mes nouvelles que tout ceci n'était qu'une mascarade, une stupide mise en scène que nous ne pourrions ni l'un ni l'autre tenir très longtemps. J'avais beau tenter de me raisonner, de me dire que je ne connaissais rien de ce Faé, que si Guillem s'en méfiait, je ferai mieux de l'imiter, rien n'y faisait. Bon sang, que me fallait-il ? Que les flammes de l'enfer lui sortent par le postérieur ? Cette image m'amusa malgré moi, et le concerné leva vers moi un sourcil agacé.

– J'étais en train de t'imaginer avec le feu au derrière, lui avouai-je.

– Voilà qui explique pourquoi tu ne parviens pas à te concentrer. Puis-je savoir d'où cette idée t'est venue ?

– J'essayais juste de comprendre quel genre de danger tu pouvais représenter pour moi.

– Oh, et un fessier cracheur de flammes te paraît être la situation la plus vraisemblable ? C'est probablement parce que tu n'arrives pas à en détacher tes yeux.

Je me sentis rougir jusqu'aux oreilles, ce qui eut le mérite de provoquer l'ombre d'un sourire sur le visage de mon impitoyable Démon. Il me regarda me relever sans me tendre la main, et je m'époussetai avec le peu de fierté qu'il me restait.

– Quelle galanterie ! lui lançai-je.

– Nous sommes obligés de cohabiter pour une durée indéterminée, maugréa-t-il. Et ce maudit Ondin a raison, tu dois apprendre à te battre. Ce n'est certainement pas ces sorciers empotés qui pourront te donner la formation adéquate. Alors non, je ne serai pas galant. Rassure-toi, je ne vais pas me mettre à cracher du feu par je ne sais quel orifice, mais je n'ai absolument pas l'intention de me rendre agréable. En position, on recommence !

Après l'effort, le réconfort. Pour lui peut-être, mais pas pour moi, car après un rapide repas et une toilette rudimentaire, j'enchaînai avec une séance de lecture en compagnie de Rahim. Ce dernier se montrait bien plus compréhensif qu'Azrel, mais à peine plus chaleureux. Il me récitait son savoir sans enthousiasme, me faisant répéter inlassablement des combinaisons de deux ou trois lettres sans aucun sens. Je peinais à tenir en place sur ma chaise, et je finis même par en tomber sous l'œil blasé de mon professeur.

– J'ai conscience que le début n'est pas bien passionnant, soupira Rahim. Mais il faut en passer par là.

– Tu dois me trouver ridicule.

– Non, pas du tout.

Il posa sur moi un regard étrange, puis continua :

– Je devrai peut-être tester d'autres méthodes avec toi.

Ma journée de travail s'acheva en compagnie Vaëlle et Monessa. Si parler de plantes et de potions ne m'emballait guère, au moins les deux femmes avaient le mérite de me mettre à l'aise. Nous terminâmes par un repas qu'Azrel rechigna à partager avec nous. Notre hôte lui avait permis de s'installer dans une chambre à l'étage, et cette pièce était devenue son antre. Je mourrais d'envie d'y entrer pour voir ce qu'il fabriquait, mais l'audace me manquait. L'y déloger pour le souper ne fut pas une mince affaire, et la négociation se clôtura par des menaces. Le Démon consentit à nous honorer de sa présence et de son air hautain. Je lui adressai un petit sourire narquois auquel il répondit par un froncement de sourcil.

Il se vengea le lendemain à l'entraînement en m'imposant un échauffement éreintant. Jusqu'à ce jour, je pensais être en excellente condition physique. Mais force était de constater que je me découvrais des muscles insoupçonnés.

Elementals - la saga d'Armila (livres 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant