Chapitre 41

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J'écartai les doigts lentement, comme Lucina me l'avait montré. La chaise que je faisais léviter par la force du vent continua à s'élever. Je la fixai avec tant d'intensité que je commençai à avoir mal à la tête. Mais je ne me détournai pas de mon objectif. Je voulais y arriver. Voilà deux mois que je m'entraînais sans relâche avec Lucina pour maîtriser l'Air, et les résultats n'étaient pas vraiment probants. Ils étaient à peine meilleurs avec l'Eau, malgré l'infinie patience dont Guillem faisait preuve à mon égard. La faute à ce palais qui amoindrissait la magie ondine, d'après lui. Je ne démentais pas, autant lui laisser l'illusion de me faire progresser, si cela lui faisait plaisir.

J'avais un mal incroyable à évoquer mes dons, et lorsque j'y parvenais, ma magie était bien trop instable. Sans parler de mes problèmes récurrents de concentration qui me faisait oublier les étapes à respecter.

La chaise commença à tourner sur elle-même. Une demi-seconde d'inattention, et j'avais perdu le fil.

– Armila, reprends-toi ! m'ordonna Lucina.

Trop tard. L'objet de notre expérience du jour vacilla de gauche à droite à une vitesse folle avant de s'écraser au sol à grand fracas. Encore raté. Je m'écroulai à genoux, épuisée et déçue.

– Je crois que tu as réussi à la hisser plus haut que la dernière fois, m'encouragea Nalbine.

Cette femme brune à la peau caramel était la première sorcière de ma tante, une dotée d'une quarantaine d'années au service de cette dernière. Il était rare de voir Lucina sans elle. Son rôle était de s'occuper de tout ce qui faisait le quotidien de sa maîtresse : linge, emploi du temps, conseils, compagnie, surveillance rapprochée... Une véritable assistante. Coralina m'avait informée que j'aurais le droit de me choisir mon propre premier sorcier, privilège seigneurial. Cette idée me répugnait franchement, j'aimais trop ma solitude pour supporter quelqu'un en permanence sur mon dos.

– Nous étions sur le point d'amorcer la descente, confirma la Sylphe.

– Tu parles, grommelai-je.

Faucon aboya avant de me donner un puissant coup de langue de réconfort. Le chien ne me quittait jamais et semblait être le seul à ne pas se désespérer de mes échecs, avec Guillem. Il était devenu mon principal soutien.

Je ne voyais que très peu Monessa, Rahim et Vaëlle. Les invités mortels étaient logés dans une autre aile du grand palais, et j'étais tellement accaparée par ma formation que je n'avais que très rarement la force de veiller en leur compagnie. De plus, Monessa était souvent en vadrouille pour quelques instants volés en compagnie de Sidurg. Contre toute attente, leur couple perdurait, même s'ils n'avaient toujours pas franchi l'ultime étape, selon mon amie. Rahim m'avait avoué attendre avec impatience mon introduction afin d'apporter en personne sa candidature au seigneur Donovan de Maleda. Il mettait à profit ce temps pour enrichir ses connaissances en divination, et avait d'ailleurs réussi à convaincre un sorcier du palais à l'aider à entraîner sa pratique et ses manières, point important pour travailler dans une cour. Guillem se partageait tant bien que mal entre eux et moi.

Alan m'avait installée dans les anciens appartements de ma mère, immenses et... vides, dépourvus d'âme. Je détestais cet endroit.

En huit semaines, j'avais démontré avec brio mon incapacité à apprendre à jouer du violon. Je m'étais emportée quatre ou cinq fois après un cours théorique, car je ne parvenais plus à mémoriser quoi que ce soit et que mon besoin de bouger m'avait valu la réprimande de trop de la part de mon formateur. Fort heureusement, je n'avais occasionné que peu de dégâts. Seulement un grand désordre dû au déchaînement des éléments, principale nouveauté de mes débordements émotionnels. Je m'étais pourtant promis de me contrôler, mais cette fichue colère me submergeait sans que je puisse la contenir.

Elementals - la saga d'Armila (livres 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant