Amour à Contre-Courant

Chapitre 6

Aaron

Ma chute de la semaine dernière tourne sur les réseaux. Quelqu'un a filmé et mis la vidéo en ligne, et depuis, elle fait le tour d'internet. Les commentaires, les partages ont explosé en un rien de temps. Je suis devenu le nouveau "boulet" du surf. Voir mon nom associé à cette gamelle monumentale est un coup dur, surtout quand je repense à toutes les heures passées à dompter des vagues de trois mètres. C'est mon dada depuis des années, c'est mon truc quoi. Et pourtant, je me suis ridiculisé comme jamais.

Les notifications s'enchaînent sur mon téléphone : memes, vidéos remixées avec des musiques plus ridicules les unes que les autres. C'est comme regarder mes efforts partir en fumée un peu plus chaque minute. Je devrais m'en foutre, c'est juste une vidéo parmi tant d'autres. Mais je sais déjà que le coach va m'en mettre plein la gueule, je vais en prendre pour mon grade. Lui, il n'a jamais de pitié pour ce genre d'échec, encore moins quand il est public. Ce n'est pas juste une chute pour lui, c'est un manque de concentration, une faille dans l'engagement et il ne laissera pas passer ça.

Des semaines que je fais la morale à mon équipe parce qu'ils ne sont pas assez performants et voilà que je commets une erreur encore plus ridicule que les leurs. Quelle ironie. J'ai passé mon temps à leur répéter qu'ils doivent rester concentrés, qu'il n'y a pas de place pour l'erreur quand on vise l'excellence. Et maintenant, c'est moi qui leur offre une démonstration parfaite de ce qu'il ne faut surtout pas faire.

J'imagine déjà leurs sourires en coin au prochain entrainement. C'est facile de parler, mais quand vient le moment de montrer l'exemple, je me vautre lamentablement devant tout le monde. Cette chute, c'est plus qu'un simple faux pas, c'est une humiliation publique qui ruine toute mon autorité.

Et le pire, c'est que je ne peux blâmer personne d'autre que moi-même. J'ai baissé ma garde une seconde. Cette seconde a suffi pour tout foutre en l'air. Mais sérieusement, qu'est-ce qu'elle foutait là, sur cette plage, aussi tôt dans la journée ? Avery.

Depuis son arrivée, tout devient plus compliqué, plus tendu. Je ne supporte pas la façon dont elle me déstabilise sans même essayer. J'étais concentré prêt à dompter cette vague, puis, elle était là, au bord de l'eau, avec ce regard.  

Je suis à peine en train de ressasser tout ça quand mon téléphone vibre à nouveau. Cette fois, ce n'est pas une notification des réseaux sociaux, c'est un appel. Je jette un rapide coup d'œil à l'écran et vois le nom du coach s'afficher. Super, c'est exactement ce qu'il me manquait.

Je décroche en sachant très bien ce qui m'attend.

« Oui, coach ? » dis-je, en essayant de garder une voie détendue.

« Tu te fous de moi, Aaron ? » Sa voix gronde dans l'écouteur. « Je m'en fiche de ta chute ridicule, ça, c'est le cadet de mes soucis. Tu peux te vautrer autant que tu veux, mais t'as vraiment choisi le moment pour faire n'importe quoi ! »

Je fronce les sourcils, surpris. « De quoi tu parles Coach ? »

Il laisse un silence pesant s'installer avant de reprendre. « La vidéo, Aaron. Pas celle où tu te plantes, non. Celle où on entend parfaitement la façon dont tu as parlé à cette fille l'autre jour. Je ne sais pas qui l'a filmée, mais elle tourne en boucle sur les réseaux. Et laisse-moi te dire que les commentaires, ce n'est pas juste des moqueries cette fois. Ça parle de manque de respect. Tu vois où je veux en venir ? »

Un nœud se forme dans mon estomac. Je comprends maintenant. Ce n'est plus juste une question de surf. C'est un peu plus grave. Je serre le téléphone dans ma main, essayant de garder mon calme. « Écoute, ce n'était rien de sérieux, juste une discussion un peu tendue. »