Partie 41.

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Rokhaya s'assit face à Mère Marème, les yeux baissés. Sa nervosité était palpable, et elle jouait nerveusement avec les plis de son boubou. Mère Marème, élégante et droite comme toujours, observait la jeune femme avec une attente teintée d'impatience.

— Alors, Rokhaya, tu es venue me voir pour parler de Mouhamadou ? dit-elle avec un demi-sourire, espérant entendre de bonnes nouvelles.

Rokhaya releva les yeux, hésitante.

— Oui, Tante... Je voulais vous dire que... je préfère laisser Mouhamadou tranquille.

Mère Marème fronça les sourcils, ses traits se durcissant immédiatement.

— Qu'est-ce que tu racontes, ma fille ? Laisser Mouhamadou tranquille ? Pourquoi ?

Rokhaya détourna le regard, visiblement mal à l'aise.

— J'ai réfléchi, et je pense qu'il est temps pour moi de tourner la page. Mouhamadou... ne veut pas de moi, et je dois respecter ça.

— Respecter ça ?! Tu te rends compte de ce que tu dis, Rokhaya ?! gronda Mère Marème. Tu es la femme idéale pour lui, pas cette fille sans valeur qu'il a ramenée je ne sais où !

Rokhaya prit une profonde inspiration.

— Tante, je comprends votre point de vue, mais j'ai décidé de me donner une chance avec mon ex-mari, le père de ma fille. Il... il a changé, et... je suis enceinte.

Un silence glacial s'installa dans la pièce. Les yeux de Mère Marème s'écarquillèrent, son visage se figea.

— Tu es quoi ? murmura-t-elle d'une voix tremblante.

— Enceinte, répéta Rokhaya doucement. Nous allons essayer de reconstruire notre famille.

Mère Marème serra les poings, essayant de contenir la colère et la déception qui bouillonnaient en elle.

— Alors, c'est comme ça que tu me remercies, Rokhaya ? Je t'ai soutenue, je t'ai protégée, et toi, tu me fais ça ? Tu... tu abandonnes Mouhamadou ?

Rokhaya, gênée, baissa à nouveau la tête.

— Je suis désolée, Tante. Je ne voulais pas vous décevoir, mais je dois penser à ma vie, à ma fille, et à ce bébé qui arrive.

Mère Marème détourna les yeux, serrant la mâchoire pour ne pas exploser davantage. Après un moment de silence, elle reprit d'une voix sèche :

— Très bien. Je ne peux pas te forcer. Je te souhaite tout le bien, Rokhaya. Mais sache que tu me déçois énormément.

Rokhaya se leva doucement, gênée, et s'éclipsa après quelques mots d'excuse. Mère Marème, restée seule, se laissa tomber dans un fauteuil. Son esprit bouillonnait.

"Cet arriviste de Fily n'aura jamais ma bénédiction," pensa-t-elle avec amertume. "Je ferai tout ce qu'il faut pour protéger mon neveu, même de lui-même."


Fily était perdue dans ses pensées, assise sur le canapé, les yeux fixant le vide. Les derniers jours avaient été un tourbillon d'émotions. Le mariage, les rituels, les attentes — tout cela semblait se dérouler trop rapidement, trop intensément. Mais il y avait quelque chose qui la paralysait, quelque chose qu'elle n'arrivait pas à expliquer.

Elle savait que Mouhamadou était un homme patient, respectueux, mais elle redoutait une chose : l'instant où il voudrait franchir une étape qu'elle n'était pas prête à franchir. Ses expériences passées, les abus qu'elle avait subis, la laissaient dans un état de vulnérabilité profonde, quelque chose qu'elle n'avait jamais partagé avec lui. Elle avait tenté de le repousser, de se convaincre qu'elle était prête, mais chaque caresse, chaque baiser la renvoyait en arrière, là où la douleur, la peur et la confusion avaient marqué son corps et son esprit.

Soleil de mes nuits... Où les histoires vivent. Découvrez maintenant