Chapitre 20

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-Hadès...

Il était magnifique, même sous son apparence humaine et je m'en laissais momentanément distraire. Son être démoniaque était à l'opposé de son être humain. Tandis que l'un revêtait toujours une lourde armure, qui formait un saisissant contraste avec ses longs cheveux blancs, l'autre portait un costume digne d'un important cadre d'entreprise ou d'un porteur plus que prospère, où la blanche longueur avait laissé place à la courte noirceur.

Si je n'avais pas oublié que j'étais sortie des enfers sans son consentement et qu'il était sans doute venu me réclamer des comptes, je n'en avais pas moins une irrésistible envie de vérifier si ses mèches à la noire teinture avait conservés leurs soyeuse douceur.

-Perséphone, qui est-ce ?

M'interpella ma tante, sans quitter son poste au salon.

-Nous réglerons ce que tu me dois plus tard.

Hadès se pressa contre moi et fini sa phrase dans un baiser. Quand je relevais la tête, je percutais enfin.

-Tu veux que je te présente ?

Il eut un hochement de tête indulgent. Comme si c'était la moindre des choses que de présenter la personne que l'on aime à sa famille. En fait, ça l'était mais je ne pouvais pas faire ça.

-Je te demande de le faire par pure politesse, mais ne doute pas de ma capacité à le faire moi même.

-Très bien, très bien. Mais ne fais rien qui puisse indiquer qui tu es.

-Et qui suis-je ?

L'homme que j'aimais, le démon protecteur qui s'enchevêtrait à moi chaques nuits, dont le corps me rendait folle, le seigneur courageux défendant son peuple et son trône, celui pour qui je serais prête à tout et à qui j'avais cédé mon cœur et mon âme.

Ces sentiments me faisaient tellement souffrir à être constamment tus que je le compensais par le délicat geste de ma paume sur sa joue. Il ne réagit pas, demeurant d'un stoïcisme prudent, attendant ma réponse.

-Tu es un roi inconscient des risques qu'il encourt lorsqu'il s'agit de ces sujets, un dirigeant puissant à qui je dois la vie, et à moi comme je suis à toi.

Ses yeux brûlèrent d'un feu sombre et sa langue vint darder à ses lèvres les promesses capiteuses qui faisaient écho aux désirs qui m'habitaient.

Ce fut cette fois d'un baiser possessif et impatient de plus, dont il me gratifia. Sa langue vint chercher la mienne avec avidité, lorsque ma tante s'avança, voyant que je ne répondais pas.

Elle me tira en arrière, m'arrachant à l'étreinte du souverain dans les yeux duquel je captais une lueur destructrice profondément ancrée qui se débattait pour sortir. Mais je voyais à son visage fermé et à ses poings tout autant serrés qu'il luttait de son côté pour ne pas l'extérioriser.

-Qui êtes-vous ?

L'hostilité contenue dans cet ordre de s'identifier était contre balancée par l'amour maternel qui y sous-tendait.

-C'est mon...

-Je ne te l'ai pas demandé à toi, Perséphone. Je m'adressais à l'inconnu qui vient de t'embrasser sur mon perron.

Elle ne le savait pas, mais elle m'avait éviter l'humiliation qui aurait été la mienne si j'avais tenté de poursuivre ma phrase. Heureusement l'honneur de se présenter, et donc de définir notre relation, était accordé à Hadès.
Celui-ci, s'était entre temps reconstituer une expression impartiale.

-Je suis son contractant.

Pardon ? Il comptait vraiment résumé ce que nous partagions à une simple histoire de contrat entre démon et humain.

-Vous voulez dire que vous êtes son patron ?

-C'est ça.

Il espérait vraisemblablement berner ma tante avec un stratagème aussi creux, dont elle aurait vite fait de faire le tour. Ça n'avait pas de sens, mais quelque chose me faisait abonder dans son sens.

-Et ce baiser...

-Une erreur.

Fit-je.
Ils se tournèrent tout deux vers moi et je piquais un fard. Cela se voyait-t-il autant que je mentais ? C'avait été tout sauf une erreur.

-Ça y est, j'y suis.

S'exclama-t-elle.

-C'était l'un de tes professeurs à la fac qu'il t'étais obligé de fréquenter en secret à cause de la règle de non fraternisation.

Où avait elle été chercher idée aussi saugrenu ? Cela dit, s'il avait fallu lui révéler qui était réellement ses deux invités masculin, je doutais de la similarité de son acceptation actuelle.

-C'est tout à fait ça. Je vous remercie de vous montrer aussi compréhensive.

Lui dit Hadès, la gratifiant d'un petit soupir soulagé que je savais factice. Ma tante rougi, le laissant entrer et quand nous fûmes elle et moi dans son dos elle me fit le plus grand et enjoué des sourires. Du fait de ma virginité jusqu'à ce que je rencontre Hadès, il était évident que je n'avais pas souvent ramener de garçon sérieux à la maison. Mais le fait de me voir fréquenter quelqu'un et surtout fréquenté par quelqu'un la rendait plus joyeuse encore que si elle avait pu assisté à ma remise de diplôme.

Hadès s'était tout de suite mis à l'aise. Il avait retiré sa veste qu'il avait négligemment déposé sur le dossier du canapé avant de se diriger, d'un pas félin, vers Mehgane et Céthius pour sans doute les briefer sur son imposture fraîchement créée. Le temps qu'ils accordent leurs violons, je partît en cuisine vérifier la cuisson adéquate de chaques plats et chercher de quoi rajouter un couvert.
À quoi est-ce qu'il jouait ? Qu'avait-t-il en tête pour se présenter ainsi à ma tante ? On rencontrait la famille de l'autre quand on était sur de bonnes bases et quand on envisageait plus ou du moins qu'il y avait une stabilité qui permettait de voir son avenir avec l'autre.

-Merde.

Je venais de tâcher mon haut avec la sauce du plat que j'avais apporté sur la table. Je passais devant Céthius en lui lançant que je montais à l'étage mettre un peu d'eau sur le tissu dans l'espoir de minimiser l'impact de la sauce.

Une fois là haut, je me dirigeais tout droit vers la salle de bain privée qui jouxtait ma chambre à l'époque où je ne vivais pas encore avec Mehgane dans notre studio.

Je ne fermais pas la porte derrière moi, espérant pouvoir entendre les éventuels appels au secours de Céthius si la cuisine lui donnait du fil à retordre. Mais étant à l'opposé de nos invités dans la maison, je ne percevais pas même les bruits de conversations que je savais pourtant se dérouler en ce moment. Je retirais mon maillot, le plaçait sous le jet d'eau et me retournait en sursautant au son du mécanisme de verrouillage de la porte. Hadès venait de refermer derrière lui, nous enfermant tout deux dans la salle de bain.

The King of the UnderworldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant