Chapitre 38

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-Tu le connais ?

Cela paraissait invraisemblable qu'elle puisse connaître le jeune démon renégat responsable de l'état dans lequel je m'étais trouvée et faisait péricliter les forces d'hadès.

-C'est...

Elle dégluti lentement et péniblement, ajoutant au suspense et à la tension ambiante.

-J'étais une amie très proche de sa mère. Je veux dire... je connaissais son père bien sûr mais j'étais intime avec sa mère bien avant qu'elle ne se mari.
J'ai souvent été chez eux garder leur fils quand ils devaient s'absenter...

Elle s'arrêta la gorge nouée par l'émotion vive que provoquait la résurgence de ces souvenirs, ses beaux yeux embués de larmes. Abelard prit le relai, caressant d'une main affectueuse l'épaule de son épouse, son regard peiné de la trouver dans une détresse contre laquelle il ne pouvait rien sauf du soutien et du réconfort.

-Je me souviens encore des cauchemars que tu as pu avoir même des semaines après leur mort. Tu te réveillais en criant mon nom et parfois celui de Tach.

-J'étais terrifiée qu'il vous arrive la même chose.

Il répondit à sa confession absente, les démons du passé dansants derrières les fenêtres de son regard, par un doux baiser au sommet du crâne. Murmurant d'un ton où s'entremêlaient ferveur et délicatesse comme le faisaient leur doigts en cet instant.

-Je sais mon amour.

Une chose me rongeait pourtant de l'intérieur, Tach croyait dur comme fer que le responsable de la mort de ses parents était l'homme que j'aimais. Dans ce cas alors pourquoi Abelard et Héloïse étaient-ils restés au service d'Hadès ? Au vue de l'affection que j'observais chez les deux démons qu'ils soient restés fidèles n'avait pas été dû à la peur des représailles. Confondre le meurtrier de leurs amis si c'était au prix de pareil châtiment ne semblait pas paraître cher payé à leur yeux. De plus ils le servaient sans contrainte apparentes. Et pourquoi Héloïse avait-elle eu l'air surprise lorsque j'avais évoqué le nom de Tach ? Ayant confié qu'elle s'occupait parfois de l'enfant qu'il avait été j'aurais cru qu'ils auraient décidé de l'adopter ou au moins de rester en contact.

-Qu'est-il advenu de Tach ?

-Nous l'avons cru mort avec ses parents, mais sans les corps, impossible d'en être véritablement certains. Tu dis l'avoir vu ?

Elle me regardais avec tant d'espoir que je me voyais mal lui répondre que c'était le saligaud qui m'avait refilé cette MRT (maladie reptilement transmissible).

-Il pense qu'Hadès est responsable du meurtre de sa famille et marche au côtés de Noyhrceur.

Je vis parfaitement le long frisson d'effroi la parcourir à cette révélation.

-Non. Hadès n'était même pas la lorsque ça c'est produit il traitait une affaire importante au royaume terrestre...

-Je sais que ça ne peut pas être lui mais Tach en est persuadé.

Je leur relatais les souvenirs qu'il avait partagé avec moi de la découverte de ses parents lors de ses trop jeunes années.

-Seigneur...

L'exclamation venait d'Abelard. Les deux mains sur la bouche, Héloïse pleurait en silence le sort de ses amis qu'elle avait pendant longtemps méconnu.
Une plainte fugace mais effroyablement nette dans l'expression de sa douleur nous fit nous retourner. Hadès luttait toujours contre le poison se répandant dans ses veines. Son visage était un masque qui ne laissait pourtant filtrer que peu d'émotion, à peine un léger désagrément marqué par deux fines ridules entre ses sourcils. Comme s'il se concentrait à affecter un visage aussi détendu que possible, pour ne pas me causer plus d'émois que nécessaire après ce que je venais d'éprouver, compris-je en surprenant le regard désapprobateur mais résigné de Céthius. Mais cette feinte avait un pris, celui d'une plus grande souffrance encore car il fallait une volonté et une concentration hors norme pour afficher une telle décontraction alors qu'on subissait mille morts comme j'en avais moi même fais l'expérience. Et il m'aurait été impossible de seulement essayer de simuler ce détachement.
Une haine farouche m'envahit alors. Non pas envers Tach mais dirigée contre celui qui lui avait brouillé l'esprit, le manipulait pour que ressorte toute sa colère, qu'il en soit tant aveuglé que chaque ordre dicté soit comme un acte dors et déjà accomplit.

-Ce n'est pas quelqu'un de mauvais.

Je répondis à Héloïse sans quitter Hadès du regard.

-Non. Il se fait manipuler par le véritable meurtrier depuis des années. C'est ignoble.

Je repensais au moment où Tach avait enfoncé ses crocs effilés dans mon épaule, aux mots qu'il avait alors prononcé: "J'espère qu'il tient vraiment à toi." Sur l'instant j'avais été incapable de me concentrer sur autre chose que la douleur infligée ou la nécessité de m'évader pour y accorder de l'intérêt, mais maintenant avec le recule...

-Oh bon sang !

Tous me regardèrent sans comprendre.

-Quoi ?

Céthius posa un regard interrogateur sur moi puis sur Hadès car je le fixais moi même avec horreur. Je ne pouvais pas croire que j'avais été si aveugle. Bien sûr qu'il tenait à moi, tout les mots du monde étaient inutiles lorsque l'on faisait le sacrifice de sa vie. Même Tach avait vu ce que j'avais eu besoin de m'entendre confirmer. Et pour cause il avait su détecter la faille dans l'armure du sombre souverain, sa faiblesse, sa perte. Moi.

-Perséphone, qu'est-ce qu'il y a ?

Céthius me pressait à présent l'avant bras, inquiet. Je détachais les yeux de ce qui résultait de l'amour que je portais à Hadès et qu'indéniablement il me portait et qui avait entraîné sa chute.

-C'est ma faute. Tach savais en me mordant qu'Hadès se sacrifierai pour me sauver parce que...

Je ravalais un sanglot violent qui me fit frissonner.

-...Parce qu'il m'aime.

Une vive inspiration, une rapide pression sur mon avant bras puis plus rien. Un tourbillon de fumée. Céthius était parti sans rien dire. Mais je pouvais comprendre qu'il ne veuille plus me regarder en face, son seigneur était aux portes de la mort et ce par ma faute. Non, pas la mienne. Celle de cet enfoiré qui briguait un pouvoir et des responsabilités qui le dépassaient et dont il n'était pas digne.

-Il faut qu'on le retrouve.

Le couple démoniaque à mes côtés me dévisagea sans comprendre.

-Je veux retrouver cet engeance abject et lui faire regretter ce qu'il nous a fait. À tous.

Comme je l'avais très justement supposé la fidélité de ces deux démons allait bien au delà du doute ou de la peur que pourrait causer pareil entreprise et c'était tout à leur honneur. Ils acquiescent, leur regard pareil au mien, résolus à obtenir justice et animés de la même volonté d'empêcher Noyhrceur de nuire à tout autre à l'avenir.
Je m'assis au bord du lit où persistait à s'accrocher à la vie le roi des enfers et caressais fébrilement son visage tiraillé par une souffrance inimaginable et pourtant contenue. Il ne pouvait pas donner l'impression d'une proie blessée aux forces hostiles qui guettaient dans l'ombre et je souhaitais plus que tout rester auprès de lui mais si je voulais me rendre utile pour qu'il guérisse et pour cela je devais partir.
Toutefois il ne serai pas sans défense, des gardes était postés partout autours du palais et d'autres devant la porte de ses appartements qui eux étaient maintenus verrouillés par ce système sélectif d'inviter. Il ne craignait rien. Du moins pas de menaces extérieurs.
Je caressais le contour de sa joue et collais mon front au sien sans infliger une trop forte pression de peur de lui faire plus de mal que ne le faisait le poison. Sous réserve que cela fût possible.

-Attends moi, mon amour. Je te promet que tu m'entendra encore te le dire et je veux moi aussi l'entendre de ta bouche alors ne me laisse pas.

Je l'embrassais tendrement, les lèvres pressées délicatement contres les siennes avant d'y souffler ces quelques mots et de partir.

-Je t'aime.

The King of the UnderworldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant