Chapitre 15 - Rupture

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Malgré l'effondrement moral dont elle venait d'être victime, Lucie avait eu la force et le courage de s'occuper de Christine inconsciente. Elle avait couru jusqu'au taxi pour lui demander de l'aide et après avoir été cherché l'argent qui était resté dans le tiroir de la chambre, ils partirent en direction de l'hôpital liégeois.

Transportée dans un lit à roulette, Christine semblait toujours en pleine léthargie tandis que d'un pas sûr Lucie suivaient les brancardiers qui poussaient sa sœur vers le département des urgences.

Après une longue attente, elle put enfin parler au docteur Coltin.

- Bonjour docteur, je suis la sœur de Christine. Que se passe-t-il ? Que lui est-il arrivé ?

- Bonjour mademoiselle. Votre sœur est toujours inconsciente. Mais nous allons faire le nécessaire pour la sauver.

- La sauver ? Mais dites-moi au moins ce qu'elle a ?

- Et bien, cela fait quelques mois que Christine Lodirat se fait soigner pour une insuffisance rénale. Elle est maintenant dans un état critique et fort avancé. Son rein gauche ne fonctionne plus et le droit est sur le point de s'arrêter. Il faut la transplanter de toute urgence un nouveau rein. Elle est sur liste d'attente, il ne reste plus qu'à trouver un donneur.

Le docteur faillit s'en aller, mais Lucie le retint.

- Attendez ! dit-elle. Peut-on vivre avec un seul rein ?

- Oui, mais dans le cas de votre sœur, ses deux reins ne fonctionnent plus.

- Je parlais de moi. Si je lui donne un rein, je pourrai la sauver et en même temps avoir une vie normale ?

- Oui... tout a fait. Mais vous avez déjà fait les tests de compatibilité. Ils sont négatifs !

Lucie recula d'un pas, mortifiée. Elle n'avait aucune souvenance de ces tests, ni du fait que Christine était malade. Le médecin s'en alla, la laissant seule dans sa torpeur.

Tout tournoyait autour d'elle comme un ouragan puissant qui l'emportait dans l'au-delà. Elle revoyait des lambeaux d'images resurgir du fin fond de sa mémoire. Le chalet, l'argent dans le tiroir, les baisers de cet homme mystérieux qui la prenait dans ses bras, les lettres de Georges, les roses rouges, le trou noir.

La raideur de la chaise sur laquelle elle était assise la réveilla. Elle ouvrit les yeux doucement, le temps d'observer où elle se trouvait.

Elle remarqua qu'elle était toujours à l'hôpital, dans la salle d'attente. Elle se frotta les yeux comme un enfant qui vient de passer une longue nuit de repos. Elle réentendit subitement les derniers mots du docteur Coltin. Elle était incompatible avec sa sœur et elle n'avait aucun moyen de l'aider dans son dur combat. Résignée, elle décida de partir. Il fallait qu'elle retourne à son établissement avant qu'on ne remarque son absence. Mais soudain, lorsqu'elle voulut se lever, un bras ferme la retint.

Elle se retourna et ses yeux croisèrent celle de l'homme à l'iris océan. Une vague aussi haute qu'une montagne l'emporta dans un gouffre de désolation. Subitement tremblante, elle se rassit.

- Georges ? osa-t-elle prononcer.

- Oui, mon amour. C'est moi.

Ses cheveux noirs légèrement ondulés tombaient parfaitement sur son front, sa barbe mal rasée reflétait la virilité par excellence. L'expression de son regard la fit chavirer dans les profondeurs de ses yeux.

Il était si différent et pourtant si identique !

Elle ne pouvait pas croire que c'était lui, néanmoins il semblait bien réel, assis, à côté d'elle, muni d'un sourire radieux et ravageur. Il n'y avait que lui pour la regarder de cette façon, il n'y avait que lui pour la faire tomber à la renverse.

NévroseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant