Chapitre 17 - Une présence

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A peine sortie du lit, la jeune femme découvrit qu'Oli avait fait un brin de ménage. Cela ne semblait pourtant pas être le genre de personne à prendre de telles initiatives. L'invitée ordonna presque à Lemie de s'installer, et lui apporta un café chaud. La jeune femme n'en revenait pas. Avoir une présence ne lui semblait avoir que des mauvais côtés jusque là, mais Oli venait de lui démontrer que, parfois, cela pouvait également quelques avantages. Elle savourait cette sensation délicieuse que lui procurait le simple fait de voir une personne s'occuper d'elle. Elle profita ainsi de l'instant, qui était une véritable première pour elle.

- Tu veux faire quelque chose avec moi aujourd'hui ? Interrompit Oli.

Lemie avala rapidement sa gorgée de café, un peu trop chaude, et tenta de répondre, tant bien que mal, par l'affirmative.

- Bien sûr, tu veux faire quoi ? Demanda Lemie.

- Laisse, je m'occupe de tout.

Ainsi, la jeune femme ne savait ni comment elle devait s'habiller pour cette sortie, ni à quelle heure celle ci était prévue. Ce n'était pas dans ses habitudes de ne pas contrôler ce genre de chose, mais, pour une fois, Lemie voulait laisser quelqu'un décider à sa place. Il ne faut pas mourir idiot après tout. Toutefois, les heures passèrent, et Oli, qui était partie peu après le petit déjeuner, n'était toujours pas de retour. Lemie commençait à se demander si l'idée de son invitée était réelle et sincère. Elle s'en voulait à elle même, bien plus qu'à Oli. Si elle avait eu la présence d'esprit de demander pour quelle heure elle devait se préparer, cela aurait été bien plus simple.

Le jour s'en allait peu à peu, laissant place à la nuit, et étouffant également les espoirs de Lemie. Pourtant, au moment où elle ne s'y attendait plus depuis un moment déjà, elle entendit la porte d'entrée s'ouvrir. Oli était enfin là.

- Tu es prête ?

Lemie n'osa pas révéler l'interminable attente qu'elle s'était infligée. Elle préféra faire croire qu'elle venait de finir de se coiffer, et décida de suivre son invitée, là où elle avait décidé de la conduire. Les deux jeunes femmes ne parlaient pas vraiment. Oli n'avait, sans nul doute, rien de particulier à dire, tandis que Lemie ne trouvait pas les mots. En bas de la rue, à quelques mètres de l'appartement, se trouvait une voiture dans un état déplorable. Si Oli ne s'était pas arrêtée devant, Lemie aurait quand même deviné qu'elle lui appartenait, tant elle correspondait parfaitement avec ce qu'elle aurait pu imaginer. Elle entra dedans, et s'installa sur le siège en tissu, déchiqueté par endroit.

- Elle a beaucoup vécue ta voiture. Tenta de lancer Lemie, sur le ton de l'humour.

- Ce n'est pas très gentil de se moquer de ce qui est vieux.

Lemie comprit que briser la glace ne faisait pas partie des objectifs de celle qui l'accompagnait. Elle mis sa ceinture, tant bien que mal, et focalisa ses yeux sur la route. Oli roulait, plus mal que bien, tandis que Lemie s'accrochait à ce qu'elle pouvait.

- Tu as peur ? Demanda Oli.

- Je... disons que je ne suis pas rassurée.

- Je croyais que tu étais triste.

Lemie ne vit pas le rapport entre son angoisse évidente, et son état d'esprit général. Elle préféra ne pas répondre, faute de savoir quoi ajouter. Oli profitait de la peur de sa passagère, et roulait toujours un peu plus vite, jusqu'à son point de destination. Soudain, elle arrêta la voiture.

- Nous sommes arrivées. Lança t elle.

Lemie regarda par la vitre de la voiture, et découvrit une maison, tout ce qu'il y avait de plus banale, parmi tant d'autres habitations.

- C'est ici que tu voulais m'emmener ?

- Evidemment. Sors de la voiture. Répondit Oli.

La jeune femme s'exécuta, et mis le nez dehors. Elle observait la maison, comme pour tenter de comprendre ce qu'elle faisait là, et pourquoi son invitée avait tant tenue à l'ammener ici. Soudain, elle vit Oli se baisser, et attraper une pierre au sol.

- Qu'est ce que tu vas faire avec ça ? Demanda Lemie, visiblement inquiète de l'issue de cette sortie.

- Je ne vais faire de mal à personne, détends toi.

Malgré ces quelques mots, Lemie vit Oli faire un mouvement de recul, élancer son bras, et jeter le pavé dans une des fenêtres de l'étage. La jeune femme n'en revenait pas. Avait elle choisi cette maison pour une raison précise ? La personne qui vivait là avait elle un quelconque rapport avec la situation d'Oli ? Les questions se bousculèrent quelques secondes, quand Lemie vit une lumière s'allumer dans l'habitation ciblée.

- Il faut vite partir Oli, il y a quelqu'un à l'intérieur. Tenta t elle de raisonner Oli.

- Attends encore un instant. Ordonna l'invitée.

Lemie n'en pouvait plus de patienter. Ces quelques secondes parurent durer plus longtemps encore que toute la journée d'attente qu'elle venait de passer. La pièce qui avait été visée par la pierre s'alluma à son tour. La personne qui vivait là découvrait, sans nul doute, les dégâts que venait de causer Oli à son domicile. Lemie prit peur, et tira par le bras Oli, afin de l'obliger à regagner sa voiture. Une fois dedans, la jeune femme démarra sans se faire prier, comme si elle était revenue à elle. Mais si la lanceuse de pierre semblait euphorique après cette excursion, Lemie l'était beaucoup moins. Son visage annonçait toute la déception qui s'infiltrait en elle. Elle pensait tellement passer une soirée normale, en compagnie de quelqu'un qui deviendrait peut être son amie, un jour. Mais Oli venait de tout gâcher, pour des raisons totalement obscures.

- Quelque chose ne va pas ? Demanda Oli, comme si elle ne se doutait de rien.

- A ton avis ?

- Et bien je ne sais pas. ça ne t'a pas plu ?

- Plu ? Tu es sérieuse ? Tu viens de détruire la fenêtre de quelqu'un, sans raison. Comment voudrais tu que cela me plaise ?

- Ce n'était pas sans raison. Ce quelqu'un t'a fait du mal, mais tu ne le sais pas encore.

Lemie fut déconcertée par cette réponse, mais ne voulu pas en rester là. Cette fois, il fallait qu'Oli joue cartes sur table. Elle était bien décidée à ne pas lui laisser l'occasion de se défiler une fois encore.

- Qui vit dans cette maison ?

- Celui qui t'a vendu ce que tu crois être un rêve. Répondit Oli.

- Sois plus claire !

- Très bien. C'est Dirdre, l'agent immobilier, qui habite cette maison.

- Mais pourquoi dis tu qu'il m'a fait du mal ?

- Tu n'en as pas la moindre idée ?

Oli semblait convaincue qu'avec un peu de réflexion, Lemie trouverait la réponse seule. Mais cette dernière avait besoin de l'entendre, pour le comprendre. Elle insista pour qu'Oli assume ses pensées, et lui livre enfin le contenu de celles ci.

- Il t'a loué un appartement pitoyable, dans lequel tu finiras par te flinguer si tu n'en pars pas. C'est trop récent pour que tu le comprennes, mais un jour, tu te souviendras de ce soir, et tu regretteras de ne pas avoir toi même jeté la pierre. Répondit Oli.

Lemie était perdue, désœuvrée, désabusée. Comment Oli pouvait à ce point prétendre que, dans l'avenir, elle serait si désespérée qu'elle trouverait l'acte de ce soir là, presque normal ? Cela lui paraissait indiscutable, ce qu'avait fait son invitée n'était pas à reproduire. D'autant que ce que semblait ignorer Oli, c'est que c'était bien elle qui avait voulu de cet endroit pour vivre. Préférant ne pas s'éterniser dans une discussion de ce genre, une fois de plus, Lemie s'enferma dans son silence. Sa déception était si grande. Cette soirée n'avait rien de ce qu'elle avait imaginé, espéré. Elle rentra ainsi, le cœur lourd, en sachant qu'elle n'allait pas pour autant se séparer d'Oli, qui allait encore squatter son canapé. Elle entra dans sa chambre, referma la porte afin de retrouver un semblant d'intimité, et inscrivit le mot "déception" sur l'une de ses toiles. Une fois encore, Lemie en revenait à un constat de plus en plus cruel. On obtient toujours le contraire de ce que l'on veut.


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