Le temps passait encore, sans en avoir la notion. A tel point qu'Oli fini par s'assoir contre la porte, dans l'espoir de la voir s'ouvrir à un moment. Elle restait là, silencieuse, tandis que Lemie ne disait rien non plus de son côté. Soudain, Oli entendit le cliqueti de la serrure. Son hôte venait de déverrouiller, enfin. Sans geste brusque, Oli, qui venait de se relever, abbaissa la poignée, et découvrit Lemie, en sang, le miroir brisé.
- Que s'est il passé ? Lança Oli, tout en cherchant de quoi nettoyer la main de son hôte.
- J'ai rétabli les choses. Répondit Lemie, visiblement un peu ailleurs.
- Que veux tu dire par là ? Qu'est ce que tu as fait ?
Lemie se mit à observer sa main ensanglantée. Elle ne semblait ressentir aucune douleur, et tenait au creux de celle ci, un morceau du miroir, qui aurait pu lui servir à bien des choses. Eliminer son invitée, ou s'éliminer soi même. Tout était possible. Oli tenta de retirer le morceau tranchant de sa main, et Lemie se laissa faire, sans dire quoique ce soit. En l'attrapant, Oli se blessa à son tour, et se précipita vers le petit meuble à pharmacie, se trouvant accroché au mur, derrière son hôte. Elle y cherchait désespérément de quoi soigner sa blessure, et celle de Lemie, mais elle n'y trouva rien. Elle pesta furieusement contre le manque de produits pharmaceutiques de son hôte.
- Comment peut on être à ce point négligeante ? S'interrogea t elle.
Mais Lemie était bien trop absente d'elle même pour relever quoi que ce soit. La douleur ne semblait pas l'atteindre, tandis qu'Oli se sentait nerveuse, à cause de sa plaie. Elle fini par abandonner son espoir de trouver quoique ce soit pour se soigner, et attrapa une serviette, dans laquelle elle enlaça sa main. Elle en prit une seconde, pour venir en aide à Lemie, qui se fichait pas mal de recouvrir le sol de son sang.
- Qu'est ce qui t'a pris ? Demanda à nouveau Oli.
- Tu avais raison. Je suis cassée. Je voulais donc me voir comme tu me voyais, en mille morceaux. Et je reconnais que le spectacle n'est pas saisissant.
- Ce n'est pas du tout ce que je voulais dire.
- Vraiment ? Pourtant, regarde par toi même. Ce reflet est davantage le mien, que celui que je voyais avant. Cette fois, je me vois réellement, comme tu as réussi à me voir. Pas comme les autres voudraient que je sois.
- Je te le répète, ce n'est pas ce que je voulais dire. Affirma Oli.
- Et quand bien même ? Le résultat est là. Je suis plus que jamais moi même, grâce à toi.
Oli se sentit confuse, gênée d'avoir provoqué un tel chaos dans l'esprit de son hôte. Elle voulait la faire réagir, c'était évident, mais pas de cette façon. Pas de sorte à avoir le sentiment de lui avoir appuyé un peu plus sur la tête. Pas en ayant la sensation de l'aider à se noyer, plutôt que de lui tendre la bouée qu'elle attendait désespérément. Elle était proche de se confondre en excuses, tout en sachant que cela ne changerait rien.
- C'est comme ça que tu t'es sentie quand tu t'es séparé de ton petit ami ? Demanda Lemie.
- Je... Ce n'est pas le moment pour parler de ça. Répondit Oli.
- Pourquoi ça ? N'as tu jamais envisagé de lui pardonner ?
- Il n'en aurait rien eu à faire. Je te rappelle qu'il est toujours avec son nouvel amour.
- Certes, mais s'il t'avait juré de la quitter pour te récupérer, qu'aurais tu fait ? Demanda Lemie.
- Je n'en sais rien. Le problème n'est pas tant son infidélité à vrai dire.
- Quel est le problème dans ce cas ?
- La trahison Lemie. Tout est toujours un problème de trahison. Il aurait pu rencontrer cette fille, se sentir troublé à ses côtés, commencer à l'apprécier, l'aimer, la désirer. Il aurait pu faire tout ça, sans salir ce que nous avions, et qui était précieux, pour moi. Il aurait pu rentrer, me parler de sa confusion, me dire qu'il ne savait plus s'il maimait encore, me quitter, me laisser dans les larmes, mais avec cette chance de pouvoir rester l'homme sincère que j'avais cru voir en lui. Au lieu de ça, il a choisi l'autre option. Celle où il est rentré chaque soir à la maison, partageant mes repas, se couchant à mes côtés, continuant de me faire croire à son amour, et me parlant de nos projets. Il a choisi la trahison, plutôt que la franchise.
- ça n'a rien d'étonnant. Tu le dis toi même, tout n'est que mensonges, n'est ce pas ? Ajouta Lemie.
- Tout l'est, parce qu'on a décidé de marcher ainsi. Tu cherches de la vérité où il n'y en a pas. Tu cherches de la sincérité dans chaque personne que tu croises. Je n'en cherche pas partout. Je n'en veux que dans les gens en qui j'ai décidé de croire. Ce n'est pas si immense, mais parfois, ça l'est déjà trop.
Oli sentit les larmes lui monter aux yeux. Bien plus à cause de la colère qu'elle ressentait pour tout ça, que pour sa tristesse. Elle se leva, et décida que la discussion était close. Elle quitta la salle de bain, laissant Lemie à son triste sort. Cette dernière s'en fichait. Elle n'en était plus à attendre quoi que ce soit, contrairement à ce que pouvait encore en penser Oli. De la franchise ? Elle n'en cherchait plus. Pas plus que de toute autre chose. Elle s'était trop longuement laissée guider par ses peurs, elle ne voulait plus de cette vie là. C'en était terminé. Elle se leva à son tour, ôta sa serviette et passa les premiers vêtements qui lui tombèrent sous la main. Ce vieux jean sale et ce pull rouge feraient l'affaire. Elle garda le bandage de fortune qu'Oli lui avait fait, et quitta la salle de bain, pour se diriger, sans le moindre arrêt, dans sa chambre. Tant bien que mal à cause de sa blessure, elle attrapa un pinceau et inscrivit ce mot qui lui résonnait encore en tête.
"Trahison"
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L'Appartement
Conto"La solitude, autant qu'on peut la vouloir ou l'espérer, sonne comme un abandon quand elle s'éternise un peu trop".