Chapitre 34 : «Dï-Ego, qu'est-ce qui se passe ?»

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Les deux jours qui arrivèrent passèrent plus vite en présence de Dï-Ego. Toute la journée, on apprenait des choses sur la culture de l'autre. On avait occupé les deux jours en visitant la grotte. Je découvris des lieux insoupçonnés remplis de merveille dont une en particulier. Lorsqu'on marchait suffisamment longtemps en direction de la limite de la grotte, il y avait un endroit où les papillons de nuit quittaient leur antre pour rejoindre la sortie de la grotte en passant par une légère fente. Ces papillons étaient magnifiques, ils étaient bleus fluorescents ! En les regardant, on avait l'impression d'être comme dans un rêve. C'était un spectacle merveilleux. J'observais, fascinée par les insectes s'envolant hors des murs de roches qui me servaient à présent d'habitat.

En les observant partir, cela me rappela qu'il fallait bien que moi aussi, je fasse de même. Ma cheville était complètement guérie à présent. Je pouvais très bien courir si le besoin en était. Pendant mon séjour, j'avais gardé l'habitude d'envoyer un message d'alerte. Jusqu'à présent, je n'avais reçu aucune réponse de l'Institut. La cité de Ginenzhu était à trente minutes en vaisseau de la forêt. Logiquement, à pied, j'en avais pour des heures. Si j'en parlais à Dï-Ego, peut-être qu'il m'aiderait. Mon petit doigt me disait que je ne devais pas être le premier humain à faire sa connaissance. La preuve, il lui arrivait de me parler en anglais sans problème. À son niveau certes, mais assez pour que je le comprenne. J'avais tenté de lui en toucher quelques mots hier. Il avait aussitôt changé de sujet. D'ailleurs, celui-ci n'était pas là. Maintenant que nous étions proches, il restait plus longtemps dans la grotte, excepté aujourd'hui. Je ne l'avais vu à aucun moment de la journée. Comme les jours précédents, il m'avait bien entendu déposé le traditionnel déjeuner le matin que j'avais trouvé et engloutis à mon réveil, à part ça, rien.

Les papillons avaient presque tous gagné l'extérieur, ce qui signifiait que j'allais devoir me coucher. J'aurais quand même voulu, avant de fermer les yeux, parler à mon ami alien. Lorsque j'étais sur le point de me lever, la grotte me renvoya l'écho d'un bruit qui provenait de quelques mètres plus loin. Quelqu'un arrivait. Et à en juger la rudesse de ses pas martelant le sol, il devait courir. Bientôt apparut Dï-Ego reconnaissable entre tous par sa stature grande, mince et squelettique. Toujours accompagné de sa précieuse lance. Au niveau de la fosse à papillon, les parois de la grotte étaient plus étroites et le plafond plus bas, de telle sorte que pour parvenir jusqu'à moi, mon ami dû se courber en deux pour passer.

— Coucou, toi ! saluais-je, enjouée de revoir mon ami.

— Bonsoir, salua-t-il à son tour avec son accent.

— Mais tu es tout beau, complimentais-je.

En effet, il était d'une élégance rare. Son pagne noué autour de ses reins habituellement fait de vieux cuir marron délavé ou d'un tissu de lin mal entretenu, était aujourd'hui un tissu rouge flamboyant décoré de plusieurs motifs triballes colorés. Pendaient à son cou jusqu'à son torse verdâtre des colliers longs fait de perle elles aussi de toutes les couleurs. C'est la première fois que je le voyais ainsi. Au lieu de me remercier en bonne et dû forme, Dï-Ego toujours agité faisait de grands gestes pour me dire quelque chose. Vu sa mine réjouie, cela ne devait pas être une alerte au danger. Il prit ma main dans ses deux uniques doigts répétant sans cesse dans sa langue des mots que je ne connaissais pas en m'emmenant de force je ne sais où. Là, je commençais vraiment à m'inquiéter !

— Dï-Ego, qu'est-ce qui se passe ?

Ma question resta sans réponse. Ou peut-être qu'il avait répondu dans son dialecte. Hélas, je ne connaissais pas assez de mots pour savoir de quoi il en retournait. Sans ménagement, il m'entraîna dans la grotte toujours en parlant à tue-tête. Je ne comprenais rien ! À quoi rimait ce cirque ? Et il empruntait des chemins que je n'avais jamais emprunté auparavant ! Qu'allait-il faire ? Quand on y réfléchissait bien, qu'est-ce que je connaissais aux coutumes de son espèce ? Et s'il était en train de me kidnapper ? Ou pire, m'emmener à un sacrifice où je serai l'attraction principale, à savoir l'offrande ! Il ne serait pas dit dans l'histoire que je me serai laissée emmener à l’abattoir sans m'être défendue ! D'un geste brusque, je délogeais mon bras de son emprise et restais pointée là comme un arbre, à attendre une réaction de sa part. Dï-Ego d'abord surpris par mon geste se retourna vers moi avec un regard complètement surpris, expression d'autant plus amplifiée par ses immenses yeux.

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