Chapitre XXXIV.

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« Lundi – 20 heures – Chez moi, ramenez l'alcool, soirée avec tout le lycée »

Marco avait pour habitude d'envoyer des genres de télégrammes en prévision de ses soirées. En vérité, Tom ne savait pas si c'était parce qu'il était trop con pour écrire un SMS correctement ou parce que c'était plus rapide, mais il s'étonna bien de recevoir le message dans sa boite mail. Il le relut une petite dizaine de fois et souffla bruyamment en reposant le portable. Il avait jusqu'à ce soir pour se décider et la rentrée approchait à grand pas. Peut-être n'était-ce pas très prudent de se défoncer juste avant la date fatidique à laquelle il allait devoir faire maintes et maintes stages dans la fantastique usine du père Kaulitz. Il préférait ne pas y penser et se dit que cette soirée pouvait être un bon moyen d'oublier dondon et ses vieux. Puis « tout le lycée » incluait Georg et Lucie, et Georg et Lucie étaient une source de vannes et d'amusement inépuisable. Il enfila son fidèle débardeur noir, celui qui laissait lire ses muscles au travers, et opta pour un de ses fidèles baggys. Bill n'était pas venu hier soir. A vrai dire, Bill était revenu habiter près de la rue aux deux chevaux. Il l'avait vu à la fenêtre la dernière fois, et cette simple vision l'avait empli de bonheur. Son androgyne était définitivement revenu, bien qu'il soit enfermé dans sa prison dorée. Tom tourna en rond dans sa chambre, clapota sur son clavier d'ordinateur, et eu soudainement une idée. Il hésita, se ravisa, puis tapa sur le clavier son nom.

Il trouva le profil Facebook de Bill, un profil tout ce qu'il y a de plus normal. Créé il y a 4 ans. Il observa la photo qui le représentait en train de tirer la langue, son petit nez froncé, et il en rit. Il aimait ce côté fantaisiste et enfantin en Bill. Il parcourut la page internet du curseur de sa souris, tombant sur multiples photographies au portable. Il y en avait avec Lucie, alors qu'ils étaient encore en seconde, le brun ayant une coiffure totalement différente de toutes celles qu'avait pu lui connaître Tom. Il rit face à cette ridicule mèche blonde qui lui tombait sur le visage et continua d'observer les souvenirs, ayant l'impression de faire quelque chose de répressible. Il fouillait tout de même un petit peu sa vie privée. Une photo l'interpella en particulier, celle sur laquelle l'androgyne grimaçait en levant les yeux au ciel. Sa petite bouille toute renfrognée et ses yeux malgré tout plissés, comme s'il était sur le point d'éclater de rire. Le blond l'observa un moment, attendrit, et décida de la sauvegarder pour la mettre en fond d'écran de portable. Ça faisait un peu pitié, mais c'était toujours plus joli que les fonds d'écran Apple de paysages qu'il ne verrait sûrement jamais. Il continua d'explorer et tomba à un point de non-retour, celui d'un post datant d'il y a quelques mois. Dessus on pouvait voir multiples recherches assidues sur un attentat d'il y a 17 ans, en particulier sur le tueur en question.

- Tom ! On mange !

Le blond éteignit son écran et dévala les marches pour retrouver ses parents, agacé d'avance. Leur interdiction lui restait encore en travers de la gorge, et il comptait bien leur faire savoir. Néanmoins cette histoire l'interrogeait encore plus désormais. Que ce que c'était que ce bordel ?

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Bill maltraitait son chewing-gum à la fraise entre ses dents, le mâchouillait, le laissait s'écraser contre son palais en regardant par sa fenêtre fermée. A vrai dire les stores aussi étaient irrémédiablement clos, ne lui laissant pour seul vue que la toile noire qui lui barrait le soleil. Après qu'elle l'ai rendu sourd la vie semblait désirer le rendre aveugle. Il chassa toutes les pensées nocives de son esprit et repris sa manucure d'un geste précis et vif, peignant succinctement chacun de ses ongles en bleu. Son portable était allumé sur le mail de Marco, alors qu'on lui avait rendu seulement ce matin. Il souffla sur ses ongles pour y faire adhérer le vernis et fixa la lumière artificielle qui pendouillait au plafond. L'ampoule mal accrochée menaçait de tomber, se balançant au bout d'un fil bien mince. Des vêtements étaient étalés sur le sol, ainsi que plusieurs paquets de cigarettes, d'autres de drogue plus nocives, oubliées ici par hasard alors que l'androgyne avait peut-être simplement eu la flemme de les ranger. Il tapota du bout des ongles sur son mur blanc et se laissa tomber sur son matelas, exténué. Il allait devoir dormir aujourd'hui.

L'Amour en Sourdine.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant