Chapitre XIV.

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Bill sauta presque de son lit ce Lundi-là, réveillé depuis près de 5 heures dans son lit, les paupières grandes ouvertes. Il n'avait presque pas dormi de la nuit. Et pour cause, il ne cessait de relire encore et encore sa conversation avec Tom, totalement retourné. Le brun avait cherché toutes les hypothèses possibles, aussi farfelues sont-elles : enlèvement de Tom par des extraterrestres, éventuels regrets de ce dernier, farce... Mais rien ne pouvait détourner l'androgyne de ce dont il essayait de se convaincre depuis maintenant 1h30 du matin : Tom ressentait quelque chose pour lui. Bon, peut-être pas de l'amour, mais ça semblait déjà délicieusement insensé. Il tapota un rapide sms à Lucie pour lui expliquer toute la situation, la jeune fille les ayant bien aidés depuis le début, et prit le chemin vers le lycée le cœur léger. Il ne manqua pas de passer par sa salle de bain, pour se regarder peut-être un peu plus longtemps dans le petit miroir insalubre, et avoir la surprise de se trouver presque potable. Cela faisait des années que l'androgyne cherchait à retrouver ce petit bout d'estime de lui-même. Il avait donc dévalé les escaliers en déposant un bref baiser sur la joue de sa mère qui le laissa partir en claquant comme toujours un peu trop fort la porte sans s'en rendre compte, et ne put entendre en toute logique la conversation qu'entamait à l'instant cette dernière.

Le père de Bill était quelqu'un de droit, il avait fait des études respectables et vivait bien de son petit métier d'agent immobilier, faisant un bon complément au travail de Madame Trümper. En effet, Jean n'était pas quelqu'un de compliqué, et pour cause, il n'aimait pas les choses compliquées. Il allait toujours à l'essentiel, ses lunettes carrées posées sur son nez droit, et surtout ce regard, ce regard chocolat qu'avait hérité Bill, mais ce regard qui pouvait être tout aussi doux et paternel que sévère et vicelard. Il tenait ses cheveux blonds et bouclés étrangement fournis qui viraient au gris en équilibre sur sa tête, et se rasait les poils du torse tous les jeudis un mois sur deux. Il n'était ni particulièrement intelligent, ni particulièrement stupide. Mais s'il y avait bien une chose que conservait Jean Trümper, c'était l'amour non-considérable qu'il portait, tout aussi bien à sa femme qu'à son fils unique. Bill avait été pour le couple un cadeau du ciel, la chance pour eux d'obtenir une descendance, Bill était leur petit miracle. Il était né après de longs mois d'échec, sa petite tête blonde pointant son nez comme par magie, un bourgeon qui venait d'éclore dans leur petit couple. Bill était un cadeau du ciel.

Alors forcément le couple avait tout fait pour aider leur petit ange après le traumatisme, entre aides sociales et psychologues, et bien-sûr médicaments et soin. Le garçon avait tout de suite été pris en charge, sa surdité elle aussi très bien gérée. Les deux parents avaient appris très vite la langue des signes et l'avaient ensuite enseignée à leur fils en lui expliquant les choses clairement et à la fois avec une subtilité étonnante. Le fait que Bill soit sourd ne les avaient en rien gênés, ils l'aimaient, c'était leur bébé. Sourd ou pas. Puis ce n'était qu'un handicap, et même si Jean avait d'abord ressentis une profonde tristesse vis-à-vis des choses que Bill ne pourrait faire, il s'était ravisé en se disant qu'il valait mieux l'aider pour que cette liste de choses devienne minime. Lisa - qui était le patronyme de la mère de l'androgyne – lança alors la discussion, les bras croisés sur sa poitrine étouffée dans une chemise blanche.

- Il a l'air heureux notre Bill, en ce moment... Il prend soin de lui, puis hier il est sorti avec des amis.

Sourit la jeune femme en portant sa tasse de tisane à ses lèvres maquillées. Le père soupira dans son gobelet de café, marmonnant dans sa barbe.

- Il traîne aussi pas mal avec ce garçon hein...

- Oh, Tom ?

- Ouais, il en a encore parlé hier à table.

L'Amour en Sourdine.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant