Guillaume s'étira sur sa chaise et grimaça. Le mouvement avait réveillé la douleur dans son bras droit. Ce chien lui avait vraiment donné du fil à retordre ! Heureusement, il ne s'agissait que de contusions et de coupures sans gravité ; la veste renforcée qu'il portait en permanence l'avait bien protégé.
_ Tu penses qu'elle nous dit la vérité ? demanda-t-il, l'air dubitatif.
_ Elle avait l'air sincère, en tout cas, répondit prudemment Thomas. Mais elle a un rapport avec la Lame, d'une manière ou d'une autre : Veneur ne s'en serait pas pris à elle, sinon. Il n'attaque personne au hasard.
_ Peu importe, de toute façon... Le commandeur et le conseil sauront bien démêler tout ça, ils étaient impatients de la voir quand je les ai appelés.
_ À condition qu'elle accepte de nous suivre. J'ai bien peur de ne pas m'être montré très persuasif.
_ Tu es sérieux ? Elle n'a pas d'autre choix que de venir avec nous, qu'elle le veuille ou non.
_ On ne peut quand même pas l'y forcer...
_ Tu as vu comme moi ce qu'elle a fait à Veneur... Elle l'a terrassé. Aucun être humain ne devrait en être capable ! Tout ça sent la magie noire à plein nez.
_ Je n'en suis pas si sûr, répliqua Thomas. Elle-même n'a pas l'air de comprendre ce qui s'est passé, et je n'ai rien ressenti lorsque nous étions avec elle. Elle m'a paru tout à fait normale...
Guillaume connaissait la sensibilité particulière de son ami à la présence des forces obscures et il respectait son jugement en la matière. Néanmoins, il ne pouvait pas ignorer ce qu'il avait vu de ses propres yeux. Il insista :
_Il y a quelque chose qui cloche chez elle, ça crève les yeux. On ne peut pas la laisser partir, le père Athanase est déjà suffisamment remonté contre nous comme ça. Nous étions censés observer et suivre Veneur si tu te souviens bien, pas nous lancer dans une mission suicide. On a eu de la chance de pouvoir décamper avant que le gros de la meute nous ait rejoints...
_ On ne pouvait quand même pas rester là à regarder, et laisser Veneur lui faire Dieu sait quoi !
_ Non, je suppose... Mais j'espère que nous n'aurons pas à le regretter.
~*~
L'air de la nuit était d'une fraîcheur qui fit frissonner Sarah. Elle courut jusqu'à la cabine téléphonique postée à l'angle de la station-service. La cabine avait connu des jours meilleurs : sa porte avait disparu et ses parois de verre étaient couvertes de tags, mais lorsque Sarah décrocha le combiné, la tonalité de la ligne retentit avec la clarté du cristal. Dieu merci, ce vieux machin marchait toujours. Elle se dépêcha d'introduire quelques pièces dans l'appareil - heureusement qu'elle gardait toujours un peu de monnaie sur elle lorsqu'elle allait courir – et composa le numéro de son appartement. A l'autre bout du fil, la sonnerie retentit dans le vide pendant ce qui lui sembla une éternité. Allez,Camille, décroche. J'ai besoin de toi, ma grande. Il eut enfin un déclic sur la ligne. « Bonjour, vous êtes bien chez Camille et Sarah, nous ne sommes pas là pour l'instant... ». Le répondeur. Où était passée Camille ? Elle n'avait pourtant pas prévu de sortir ce soir, mais de travailler son mémoire.
Le bip sonore retentit. Sarah laissa un message qu'elle espéra aussi cohérent que possible. Elle raccrocha et quelques pièces de monnaie tintèrent en tombant hors de l'appareil. Il serait probablement trop tard quand Camille aurait son message. Elle aurait pu tenter de la joindre sur son portable ou d'appeler d'autres amis mais elle ne connaissait pas leurs numéros par cœur. Elle n'en avait jamais eu besoin, ils étaient tous mémorisés dans son téléphone, qui gisait à présent en morceaux au fond de sa poche. Elle pouvait toujours appeler les flics mais pour leur raconter quoi ?

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Le Roi de l'Hiver
ParanormalC'est un soir d'octobre comme les autres pour Sarah, une jeune femme sans histoires qui est loin de se douter que sa vie va basculer dans l'étrange. En tentant de secourir un inconnu, elle se retrouve bien malgré elle dépositaire d'un fardeau qui s...