Chapitre 36 - L'abominable homme de boue

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Le banquet touchait à sa fin.

On débarrassa les tables, qui furent ensuite démontées et firent place nette en quelques minutes. Le moment que Simon guettait impatiemment arriva enfin : Maëlkaruos lui fit signe d'approcher. Il semblait de bien meilleure humeur qu'au début du repas.

_Magicien, demanda celui-ci, qu'attends-tu de moi ?

Saule allait ouvrir la bouche pour leur traduire ces paroles mais Simon l'interrompit d'un geste. Il était inutile de tourner autour de pot, ils avaient déjà perdu assez de temps.

_ Je suis venu te proposer un pari, seigneur, répondit-il dans la langue du prince. Je te défie au jeu de cartes. Pour la boîte de Pandore.

Une lueur d'intérêt s'alluma dans les yeux d'or.

_ C'est le plus précieux de mes trésors que tu demandes-là. Quel gage offres-tu en retour, qui puisse égaler une telle merveille ?

_ Moi, répliqua Simon avec aplomb. Si je perds, tu pourras faire de moi ce qui te plaira.

_ Vraiment ? Maëlkaruos pencha vers lui sa haute silhouette. Et si je décidais de couper cette tête arrogante pour la planter aux portes de ma demeure en guise d'avertissement ? Es-tu vraiment prêt à prendre ce risque ?

Simon en resta coi.

_ Ah Magicien, reprit le prince aux bois de cerf avec un rire qui le secoua tout entier, c'est une chose bien rare que de te voir privé de mots. Mais nous avons déjà joué ensemble, t'en souviens-tu ? Moi, je n'ai pas oublié le seul mortel qui m'ait jamais battu. Non, je ne parierais pas contre toi. Demandes-moi autre chose.

_ Mon seigneur, plaida Simon, je ne peux repartir sans la boîte, l'avenir en dépend. Et pas seulement le mien, mais aussi le tien. Tu sais ce que veux la Belle Dame. Si elle y parvient, un nouveau dieu arpentera ce monde et nul ne sera de taille à lutter contre lui. Pas même toi, pas même les reines de la Cité de la Nuit. Vos royaumes tomberont sous sa coupe, il asservira vos peuples et les mènera à la guerre.

_ Sottises que tout cela !  l'interrompit Maëlkaruos avec dédain. Je régnais déjà bien avant que le dieu blanc ne soit mis sur sa croix, je régnerais encore quand ce dieu-là sera redevenu poussière. Tu ne connais pas ma puissance, ni celle de mes vassaux, mortel. Je n'ai nul besoin de toi ni des autres seigneurs de Féérie pour protéger mon peuple. Et pour le reste... Ce qui se passe au-delà de mon Domaine ne me concerne pas, je me suis retiré de ce monde depuis longtemps.

_ Écoutes-moi, Maëlkaruos, je t'en prie...

_ Cela suffit ! Tes belles paroles ne convaincront pas, magicien. La boîte recèle trop de pouvoir. Mais... je m'en déferais peut-être en échange d'un autre trésor que tu possèdes...

_ Alors donne-moi ton prix ! Tu auras tout ce que tu veux !

_ Elle, fit le prince en tendant le doigt vers Sarah. Donne-là moi et la boîte est tienne. Et même plus si tu le désires, mes richesses sont sans limites...

_ C'est impossible, répondit Simon, pris de cours. Et tu te trompes, elle ne m'appartient pas.

_ C'est bien dommage. J'ai toujours une dette envers la Belle Dame, elle aurait pu faire un présent digne d'elle. Ou peut-être l'aurais-je gardée pour moi...

_ Non, Maëlkaruos. Je ne peux pas accepter.

_ Attendez ! s'écria Sarah en s'approchant du trône.

Le Roi de l'HiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant