Jollyjay - T1: a superheroes story [terminé]

• chapitre 8

Les mèches blondes d'Ava virevoltaient autour de son visage, soulevées par la brise de la fin de journée. Cela faisait maintenant dix jours qu'elle se familiarisait avec le terrain qui entourait la maison de Seymour, et avec la Floride. Les deux alliés ne sortaient pas beaucoup, ils se faisaient discrets. Ava demandait chaque jour à Seymour s'il avait des nouvelles de Logan mais l'enquête semblait être au point mort. La jeune femme soupçonnait son ami de ne pas tout leur dire. Un ami, c'était bien ce que Logan était pour Ava, elle avait fini par s'en apercevoir en arrivant en Floride, alors qu'elle s'inquiétait pour lui.

« - Ava ! appela Seymour depuis le porche de la maison. »

La blonde soupira et se tourna vers le scientifique. Le soleil se couchait, ils allaient prendre leur dîner, comme tous les soirs. Les jours passaient et se ressemblaient, et Ava en avait assez. Elle rejoignit Seymour et le contourna pour entrer dans la maison. C'était suffisamment grand pour deux personnes. La cuisine était ouverte et donnait sur la salle à manger. Une salle d'eau se trouvait juste à côté d'une première chambre au rez-de-chaussée occupée par Seymour. Ava disposait de l'étage qui regroupait une deuxième chambre plus spacieuse et une deuxième salle d'eau. Elle s'était même installé un coin lecture près d'une fenêtre ronde mais la new-yorkaise ne lisait bien souvent que deux pages avant de refermer son livre. Ses pensées se tournaient sans cesse vers Jason, Eavy-H, Logan et toute cette histoire incroyable dont elle faisait partie intégrante depuis ces dernières semaines.

« - J'ai cuisiné un poulet aux épices, dit Seymour en entrant dans la pièce principale.
- Ça sent bon ! souligna Ava en attrapant deux assiettes et des couverts dans la cuisine. »

Le visage de Seymour paraissait plus marqué depuis qu'ils étaient en Floride. Il avait peur de voir débarquer Eavy-H dans son terrain à tout moment. Pourtant, Ava et lui prenaient leurs précautions pour ne pas être repérés. Logan faisait diversion à New York, et eux ne devaient pas donner signe de vie autrement que par téléphone prépayé. Seymour avait vidé son coffre-fort avant de partir avec la jeune femme. L'utilisation de la carte bancaire était évidemment inconcevable dans leur situation, bien trop facilement repérable.
Seymour posa la marmite au centre de la table et servit Ava avant de remplir sa propre assiette. Leurs repas étaient presque toujours silencieux. Les questions tourbillonnaient dans l'esprit d'Ava mais elle n'osait pas les poser et plus les jours passaient plus elle se murait dans le silence.

« - C'est délicieux, dit-elle d'une petite voix.
- Tu n'as pas l'air enthousiaste.
- Si, pardon. J'ai la tête ailleurs. Encore. »

Seymour posa ses couverts de part et d'autre de son assiette et joignit ses mains devant lui en fixant la jeune femme.

« - Quelque chose te tracasse ? demanda le scientifique.
- Tracasser n'est peut-être pas le mot juste. J'aimerais...que vous me parliez de Jason. Comment était-il au travail ? Comment le perceviez-vous ? »

Le docteur Davis était étonné par les questions d'Ava. Il s'attendait chaque soir à ce qu'elle lui demande de retourner à New York, mais elle n'en faisait jamais rien. Elle était surprenante.

« - Jason était brillant, et j'aurais peut-être du me méfier de ses talents. Il s'est aventuré sur des sujets qui...
- Lui ont coûté la vie, vous pouvez le dire, termina Ava. »

Seymour hocha la tête.

« - J'ai eu de nombreux apprentis au cours de ma carrière, mais Jason était davantage un coéquipier. Evidemment au début je remplissais mon rôle de tuteur à merveille. Et puis, j'ai vu qu'il était doué pour la recherche, je ne pouvais que lui offrir une confiance aveugle. Tout comme toi, je veux comprendre ce qu'il s'est passé. »

Ava sourit à Seymour, la gorge nouée, incapable de prononcer d'autres mots. C'était un de ces soirs où elle ne supportait plus de ne pas savoir ce qui était arrivé à Jason. Un de ces soirs où elle sentait une rage sourde gronder en elle. Pour la faire taire, elle retourna dehors après le dîner et s'éloigna de la maison. De vieux rochers posés à même le sol délimitaient le domaine de Seymour. Elle ferma les yeux puis les rouvrit. La nébuleuse dans ses yeux oscillait entre le jaune et le rouge. Ava fit s'élever les rochers devant elle et les relâcha dans un hurlement de colère qui déchira la nuit noire. Un silence assourdissant s'en suivi. Les insectes avaient cessés leur chant. Les hautes herbes demeuraient immobiles. La nébuleuse dans les yeux de la jeune femme prit sa couleur violette habituelle. Elle avait évacué sa rage pour ce soir.