70. Des sauveurs encore inconnus

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Le camion roula longtemps, et les occupants de la remorque étaient très faiblement éclairés. Angélique se blottissait contre Alix, tandis que Thomas posait sa main sur son épaule. Il n'y avait que du silence, personne n'osait parler. Les récents événements leurs avaient coupé la parole. Barbara était la plus calme de toute, détendue et alors qu'elle commençait à s'ennuyer, elle lança à l'homme qui les avait accueilli :

-Vous êtes qui, au juste ? 

Sa voix résonnait comme dans une grande pièce non meublée. L'homme se leva vers elle, et, lampe en main, il se positionna juste devant la grosse femme rousse.

-Je m'appelle T. 

-Pourquoi vous nous avez sauver ? 

-Notre devoir n'est pas de vous sauver vous.

-Je pige que dalle, fit Barbara. Vous faisiez quoi dans la vie ? 

-J'étais curé. 

Alix se leva d'un bond, tandis que ses parents sursautèrent. Tous regardaient avec férocité le nouvel homme qui restait de marbre. 

-C'était vous, les croix qui se retournaient ? Et les mordeurs au pied de la grille ? 

-Mordeurs ? S'intéressa l'homme. Nous, nous appelons ça des revenants. 

-Répondez à ma question, obligea Alix. 

-C'était nous. 

-Vous êtes combien dans votre groupe ? 

-Je ne vous ai pas autorisé à vous lever, ni à me parler ! Hurla t-il. Rasseyez-vous ou je vous tue ! 

Tous s'assirent et restèrent calmes en silence. Ils commençaient à penser qu'ils avaient pris la mauvaise décision en venant ici. Le curé reprit sa place avec sa lampe à huile. Il était de marbre, et ses mouvements étaient robotiques. Il faisait peur. 

-Vous nous voulez du mal ? 

-Nous cherchons à accepter le destin que Dieu nous a confronté. 

Tout le monde regarda longuement l'homme qui se balançait avec le camion. Il avait de lourdes poches sous les yeux, un regard perdu, fatigué et un visage ressemblant un peu à une loutre. Il n'avait pas l'air méchant, mais personne dans cette remorque ne savait qui il était vraiment. 

-Mais où est-ce qu'on va ? S'inquiéta Thomas. 

Soudain, d'un mouvement brusque, l'homme se leva et brandit une croix de Jésus taillée en une sorte de couteau qu'il pointa sur sa gorge. Thomas s'arrêta brusquement de respirer, et ferma les yeux, ayant peur de se faire tuer. C'était la première fois qu'il voyait un vivant le menacer de mort de cette façon. Alix sursauta, et Angélique se cramponna encore plus au corps de son mari. Ils étaient tous trop impuissants pour se défendre. 

Doucement, le mystérieux personnage se posa contre un pan de remorque, en face des nouveaux venus. Il les toisa un long moment, et ordonna leurs armes, qu'ils donnèrent sans broncher. Le voyage était très long, sombre et froid, et surtout vraiment trop silencieux.

-Ici, je pose les questions, et vous y répondez. 

Un long moment se passa avant que l'homme d'église se décida à hausser le ton : 

-Vous êtes les seuls encore en vie de votre groupe ? 

-Tous sont morts par la horde que vous nous avez envoyé, tacla Alix avec un regard noir. Vous avez tué Antoine, mon frère, et Paula, mon amie. Mais ce ne sont pas les deux seuls, croyez-moi. 

-Qu'est-ce qui te fais dire, ma petite, que c'est nous qui les avons envoyé ? 

Alix déglutit sa salive, effrayée de voir que son interlocuteur le regardait en souriant malicieusement. Thomas ne pouvait retenir sa colère une minute de plus, il sentait qu'il allait craquer. Pendant ce temps, Angélique pleura. 

-Votre communauté... Elle était bien ? 

Alix ne voulait plus lui répondre, elle laissa alors sa mère parler calmement :

-Oui. Nous avions tout fait pour retenir votre attaque. Malgré ça, nombreux sont ceux qui ont succombé.  

Soudain, l'homme se tourna vers Barbara, maugréant dans son coin. 

-Tu ne parles pas ? Ria l'homme. Tu as trop peur ? 

Ne relevant la tête, la jeune femme fit :

-J'ai pas envie de vous parler. Si on entame une discussion ensemble, vous pouvez être sûr que votre tête finira plantée sur une brochette de barbecue. J'aime pas m'avouer vaincue, surtout face à quelqu'un de votre genre. Je ne suis pas pacifique, cher Monsieur. Soyez heureux de ne pas entendre ma voix encore une fois, c'est tout ce que je vous conseille. 

-Et que feras-tu ? Se demanda le curé en se levant vers elle. Tu n'as pas d'armes, aucun moyen de défenses...

-Vous êtes seuls dans cette remorque, continua la rousse en levant cette fois la tête en signe de défi. On est sept, ici. Rassurez-vous, c'est pas l'arme qui renforce l'adversaire. C'est son mental et sa solidité musculaire. Je remplis ces deux critères. Et vous ? J'ai pas besoin d'armes pour vous tuer. 

-Alors lève-toi. Lève-toi et viens te battre. Allez, puisque t'es si forte que ça. 

Thomas posa la main sur son amie prête à se lever pour exécuter ce qu'elle avait dit. Elle respira longuement, se détendant petit à petit et essayant d'oublier la personne qui la narguait. Alors le curé se déplaça encore une fois.

-Vous m'avez l'air assez dociles, réfléchit ce dernier. Vous pourriez peut-être... Non, il ne voudra pas. Peut-être que... 

Il se mit alors à genou, et parla à voix basse à tout le monde.

-Vous pouvez rester avec nous. Mais seulement s'il le veut. Votre vie ne tient qu'à un fil, vous pouvez tomber à tout moment et ne plus jamais remonter. Alors faîtes bonne impression. Faîtes-moi plaisir en restant parmi nous.

Le camion s'arrêta enfin et deux personnes ouvrirent les portières de la remorque. La famille Wilson et les trois autres habitants descendirent, apeurés. Il faisait encore nuit noire, et une épaisse brume s'était déployée autour d'eux. Les trois hommes qui les accompagnaient dont le curé se servirent de lampes torches qu'ils utilisèrent pour se repérer. Ils commencèrent une marche silencieuse. Dix mètres plus tard, à l'aide de la lumière des lampes, Angélique aperçut une tombe de marbre blanc à côté du chemin de sable.

L'herbe était haute, et le chemin abîmé. Les trois chrétiens marchaient derrière la famille Wilson, marchant en même temps, comme une seule personne. Chaque membre de l'ancienne communauté tremblaient de peur. Cet endroit ressemblait fortement au manoir de Nicole lorsqu'il était abandonné.

Angélique aperçut une deuxième tombe encore plus grande. Plus loin, elle en vit une troisième, puis une quatrième, avant de s'apercevoir qu'ils se promenaient tous dans un cimetière géant dans une nuit brumeuse remplie de mordeurs dans les parages. Si l'on voyait de plus loin, on s'apercevait qu'ils se dirigeaient tous vers une énorme église gothique effrayante et répandant horreur aux alentours.

Face aux Portes de la Mort ( TWD )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant