Angélique décida de partir de la salle. D'un pas pressé, elle remonta les escaliers et s'enferma dans la chambre où elle vivait. Elle avait envie de mourir. C'était aussi simple que ça. Il ne restait plus qu'Alix pour la maintenir en vie, mais ce n'était pas suffisant. Après la mort de Nicole, elle était chamboulée, et après celle d'Antoine, elle était traumatisée. Si en plus de cela s'ajoutait son mari et son plus jeune fils, elle n'aurait plus aucun goût de vivre. Elle se mit à pleurer, repensant à des souvenirs si heureux qu'ils en paraissaient irréels. Le bonheur était un souvenir si lointain qu'elle avait oublié ce que cela faisait d'être heureuse. Des larmes jaillissaient de ses yeux à n'en plus finir, si apeurée de savoir ce qui allait arriver par la suite. Elle ne voulait pas finir comme ça, elle ne pouvait pas rester seule et savoir que tout ceux qu'elle aimait étaient morts.
Barbara, inquiète, s'approcha d'elle et lui fit un câlin, sans dire un seul mot. Elles restèrent un long moment, dans le silence percé par les pleurs d'Angélique. D'une extrême douceur, Barbara se retira et regarda tristement son amie. C'était comme si elles se comprenaient par télépathie, sans parler. La jeune femme rousse comprit aussitôt et elle continua son étreinte.
-Je ne peux plus me permettre de perdre quelqu'un d'autre, murmura Angélique.
-Ça n'arrivera plus, affirma Océane.
Barbara et Angélique se dirigèrent vers la porte d'entrée, et virent leur ancienne cheffe, avec derrière elle Ulysse et Alix. Ils paraissaient forts, tous les trois, comme une petite armée immortelle. Océane s'avança dans la pièce et posa ses poings sur la table, les yeux vengeurs.
-Croyez-moi, je m'y connais en vengeance.
Robert se réveilla en sursaut, trempé de sueur. Il avait sur lui une tunique blanche épaisse, qui le protégeait du froid. Il se leva et parcourut la pièce dans laquelle il était. Elle était froide, triste et sombre. De nombreuses étagères vides remplissaient faiblement le lieu. Certains médicaments étaient posés dessus, mais ils étaient si peu nombreux que Robert sentait que l'église était en faillite. Il entendit des pas venir en sa direction, alors le vieil homme se dépêcha de s'allonger dans son lit, mais sa douleur à la jambe lui fit atrocement mal et il trébucha sur le sol. Malgré le boucan qu'il avait fait, il se rua sur son lit, mais la douleur étant trop puissante, il resta sur la pierre grise.
T fit son apparition et alluma la lumière.
-Thibault, je suis si heureux que tu sois ici, fit Robert en pressant sa plaie bandée.
-T. Je m'appelle T, souviens-toi.
-Non, non, je t'assure, c'est Thibault. Tu peux ne plus obéir à ses ordres, il suffit juste que tu en aies envie.
-Le problème, c'est que j'en ai pas envie, alors remets-toi sur ton lit et ferma-là.
-Pourquoi ? Qu'est-ce qui te fais croire que Saint A t'apprécie ne serait-ce qu'un petit peu. Je suis sûr qu'il ne connais même pas ton prénom ! Enfin, ton initiale...
-Bien sûr que si, il me connaît ! Hurla Thibault en se redressant. Je suis son plus fidèle partisan, son bras-droit, son frère !
Un long silence s'interposa entre les deux hommes. Robert se colla alors contre la mur et baissa la tête, ahuri par cette nouvelle. Non, ce n'était pas possible... Cet homme aurait pu être l'un des leurs, les sauver de cette église de malheur. Cela faisait à peine vingt-quatre heures que le doyen était ici qu'il en avait marre à en devenir fou.
-Oui. Saint A et moi sommes frères. Et pour rien au monde, malgré sa cruauté, je trahirai une personne de mon sang.
Il allait s'en aller avant que Robert ne l'appelle une dernière fois. Plus aucun espoir ne régnait en lui, il sentait que rien n'allait le sortir de là.
-Dans combien temps la balle que tu m'as tiré me sera sans douleur ?
-Ça va rester longtemps, mais plus le temps passe, plus ça guérira.
-Qu'est-ce qui a rendu ton frère ainsi ?
-Je pose les questions, et vous y répondez, répéta T avec une pointe de tristesse.
Après avoir quitté l'infirmerie, le curé marcha sans but précis, repensant à ce que disait le vieillard, à cette magnifique femme qu'il avait amené ici il y a quelques heures. Peut-être qu'il pouvait se retourner face à son horrible frère. Il ne voulait pas le tuer, non, mais l'arrêter et le remettre à la raison. Alors il se dirigea vers le bureau du prêtre et entra en toquant.
-Entrez.
-Aragon, appela Thibault en un souffle.
-Oui, mon frère ?
T s'avança vers le prêtre, regardant le cimetière qu'ils avaient créés au début de l'apocalypse. Les mordeurs grouillaient de partout, certains accrochés aux croix, d'autres déambulant tranquillement sur les tombes.
-Tu penses qu'ils sont heureux ? Demanda le grand prêtre.
-De qui tu parles ?
-D'eux, bien sûr, répondit Saint A avec une lueur de folie. Regarde-les. Ils marchent. C'est un signe de vie, alors pourquoi les gens tiennent tant à les tuer ?
-Je ne sais pas, mon frère. Peut-être ont-ils peur.
-Tu as sûrement raison. Le gamin... je ne veux pas le tuer, je ne tue pas les enfants, Dieu n'aurait pas voulu de cela.
-Dieu n'a jamais mentionné que tuer était raisonnable. Il a dit que c'était un pêché impardonnable. Comment fais-tu pour supporter tout cela ?
-Ce ne sont pas des pêchés, se défendit Aragon, regardant son frère comme si une corne poussait au milieu de son front. Je les sauve, j'accomplis ce que Dieu a voulu créer. Il parlait de mort et de résurrection, c'est ce que je fais.
-Peut-être d'une mauvaise manière... Murmura Thibault, un peu apeuré face à son frère qui contemplait les morts avec une fascination déroutante.
-Une horde approche, murmura t-il. Je sens que quelque chose va arriver. De grave, je veux dire. Lorsqu'elle arrivera, les gens que nous détenons comprendront. Ils comprendront qu'ils sont vivants. On va trouver une manière de le prouver.
-Il faut absolument qu'on trouve des médicaments pour ta maladie, s'inquiéta Thibault.
-Je viens de les prendre.
-C'est donc pour ça que tu es aussi calme. Ce n'était pas le cas il y a quelques heures.
-Que s'est-il passé, mon frère ?
-Tu as tué un de tes hommes de sang-froid.
-Ah oui ? Fit Aragon, choqué. Où l'a-t'on emmené ?
-Tu m'as ordonné de le jeter au revenants dans le cimetière.
-Il se transformera, conclut alors le prêtre. Il a de la chance.
Thibault se souvint comment les mordeurs s'étaient jetés sur le pauvre cadavre de G, mort sans raison. Il baissa les yeux vers le sol, et lorsqu'ils les releva sur un Aragon obsédé par les morts, il ressentit une violente envie de le tuer. Pour cesser ces pensées, il secoua la tête et s'en alla.
-Puisque tu aimes tant les morts qui marchent, Aragon, pourquoi ne pas les rejoindre ? Demanda sans méchanceté T en partant de la pièce.
-Ce n'est pas moi qui les rejoindra, murmura avec un sourire en coin le prêtre, seul dans son bureau.
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Face aux Portes de la Mort ( TWD )
Teen FictionUne épidémie de zombie est survenue sans prévenir. France touchée, monde écroulé, familles déchirées. Il n'y a plus de lois, plus de contraintes, mais surtout plus de vie. Sur une terre peuplée de zombies, la famille Wilson se verra obligée de survi...