Partie 15

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_ C'est très sérieux ce que je viens de te dire.

Moi: Docteur, n'y a t-il pas une autre alternative.

Le médecin : Je suis désolé mais non. Cette grossesse est risquée et même dangereuse. Ç'aurait été il y a deux mois, on aurait pu faire quelque chose mais là, on ne peut plus rien faire. Tu dois l'enlever pour sauver ta vie.

Pour moi, me débarasser de mon enfant était impensable.
D'après les résultats de mon échographie, j'ai subi des chocs ces derniers temps qui ont affecté le bébé au point que l'embryon s'est totalement déplacée dans mon ventre, et pleins d'autres choses que le docteur m'a expliqué à propos de mes organes génitaux dont je ne me souviens même plus ; qui font que la grossesse soit si périlleuse.

Tata Ginette, qui est à mes côtés depuis le début, ne disait rien. Trop occupée à réfléchir sur je ne sais quoi.
Elle m'aide finalement à me lever, mettant fin à ce cauchemar.
Nous sommes arrivées à la maison quelques minutes après et elle semblait encore plus soucieuse. Elle n'a pas prononcé un mot concernant cette affaire d'avortement.
Le soir, je monte dans sa chambre pour m'enquerrir de ses nouvelles. J'en profite pour lui monter son dîner.
Arrivée à sa hauteur, j'étais plus que choquée de la voir hoquetter.

Moi: Oh mon Dieu, tata qu'est-ce que t'as, mais tu pleures.

Elle se lève, s'essuie le visage, faisant mine de rien.

Elle: Ce n'est rien ma fille.

Moi: Si, il y'a quelque chose, tu ne peux pas pleurer sans raison. Tu peux tout me dire tu sais.

Elle: J'ai juste des souvenirs qui me remontent. Rien de grave.

Moi: Quels genres de souvenirs ? Tu peux me faire confiance tu sais.

Elle: Je t'assure, je n'ai rien. Et à propos de ce que le médecin a dit, tu as bien réfléchi.

Moi: À vrai dire, je ne compte pas y réfléchir une seule seconde. Ma décision est déjà prise. Je ne vais pas avorter.

Elle: Tu sais Aïssatou, tu me connais depuis peu. Je sais que tu dois m'envier à cause de tout ce que je possède mais sais-tu tout ce qui me ronge de l'intérieur. Tout à l'heure, tu m'as trouvée entrain de pleurer. Est-ce que tu connais la raison pour laquelle je le faisais? Ce que le docteur t'a dit a fait remonter beaucoup de souvenirs en moi. J'étais jeune, belle, à peine plus âgée que toi. J'ai rencontré mon ex-mari qui était étudiant à Montréal. On s'est vite aimés et à mes 18 ans, il a décidé de m'épouser. Mes parents ainsi que les siens ne voyaient pas cette union d'un bon œil. En réalité, mes parents faisaient partie d'une longue lignée d'aristocrates et ses parents à lui étaient des serères qui avaient nourrit les rêves de marier un jour leur fils à "l'avenir prometteur", à l'une de ses cousines. On s'est battu envers et contre tous je me souviens qu'on habitait un petit appartement dans la ville de Rosemont. Vu qu'à cette époque nous étions de simples étudiants on ne pouvait pas se permettre d'avoir un enfant alors on a décidé d'attendre la fin de mes études et j'étais obligée de recourir aux méthodes contraceptives. C'est de là qu'a commencé mon périple. À peine qu'on a terminé nos études, on voulait coûte que coûte avoir un enfant mais c'était très difficile. Je me souviens que j'avais parcouru toute l'Amérique à la recherche du sauveur qui m'aiderait à vaincre ma stérilité.

Elle marque une pause pour sécher les larmes qui perlaient sur ses joues. Je lui prends la main pour la soutenir.

Moi: Vas-y, continue.

Elle: Néanmoins, on avait réussi chacun dans sa vie professionnelle et on avait même fini par monter cette grosse boîte que je dirige et qui a des filiales dans beaucoup de pays. Depuis plusieurs années, mon mari tenait à cœur un projet qui consistait à investir dans son pays natale. Pressée de découvrir l'environnement dans lequel il a évolué, je l'ai suivi sans trop me poser de questions. Pour notre grand bonheur, à mon arrivée dans ce pays, j'apprenais que mes efforts ont été récompensés. J'avais quarante ans et j'étais enceinte de mon premier enfant.
Ma grossesse évoluait normalement jusqu'au jour où l'une des innombrables cousines de mon mari qui me menait la vie dure depuis mon arrivée me poussa dans les escaliers. Par la suite...

Elle se remit à pleurer et comme pour l'encourager, je pose ma main sur son épaule.

Elle: J'étais confrontée au même dilemme que toi. Je devais avorter et me soigner ou garder cette grossesse risquée au péril de ma vie. J'ai choisi la seconde option et au moment de l'accouchement je failli mourir. On devait choisir entre mon fils et moi, tu sais que dans ces cas on choisi toujours la mère plutôt que l'enfant. J'aurais tellement aimé que ce soit l'inverse. Après cela, j'ai essayé de toutes les méthodes possibles et imaginables d'avoir un héritier mais je n'ai même plus eu une seule grossesse jusqu'à ce que mon mari décède. Tu comprends maintenant pourquoi ta situation m'affecte autant.

Moi: Je ne sais pas quoi dire. Tu as tellement souffert. Je suis désolée.

Elle: Tu vois, cette histoire doit t'inspirer. T'aider à prendre la bonne décision. Tu es jeune, tu n'as encore rien perdu. Regarde moi, Dieu m'a tout donné. Une fortune inestimable, un mari des plus aimant. Mais il m'a privé de ce que je désire le plus.

Pour réponse, je mordillais ma lèvre inférieure.

Elle: Maintenant que tu connais tout sur moi, j'aimerais en savoir autant sur toi.

Moi: En tout cas c'est une longue histoire qui, malheureusement n'est pas prête d'être terminée.

Elle: Elle ne peut pas être aussi longue que celle d'une vieille de 60ans. Allez accouche.

On rigole et je lui relate tout. Depuis ma rencontre avec Karim jusqu'aux différents avec mon père en passant par mon mariage forcé, ma grossesse et les humiliations que j'ai subi chez mon ancienne patronne jusqu'à ce que j'arrive ici.

Elle: Wow. Je suis ébahie. Comment peut-on faire tout cela à une fille de ton âge. C'est écœurant. Mais je pense que tu as fait une erreur. Tu ne devais pas fuir. C'était faible de ta part. Concernant ta mère et ton frère, je pense qu'ils ne te détestent pas. Il s'agit certainement d'un malentendu. Tu devrais au moins essayer de renouer avec eux pour une dernière fois au moins.

Moi: Non ! Je suis radicale sur ce point. Je ne compte pas les revoir, en tout cas pas de si tôt. Ils m'ont renié, je vais faire la même chose. Je n'ai plus de famille, plus de mère.

J'ettoufais mes pleurs mais c'était peine perdue.

Ginette: Dis pas cela. Je suis là. Tu ne me considère pas comme un membre de ta famille? Ne pense tu pas que Dieu a scellé nos destins. On se ressemble tellement.

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Aïcha a une nouvelle maman on dirait.

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