Partie 9

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Narrateur externe

La première à se lever. La dernière à se coucher. Toujours à s'occuper des tâches ménagères de sa patronne. Voilà ce que vivait depuis une semaine déjà la pauvre Aïcha.
Elle dormait sur un petit matelas qu'elle étalait dans la cuisine. Celle-ci n'a rien d'une cuisine normale. Sans peinture, le toit en zinc, les trous de ses murs accueillaient toutes sortes d'insectes qui la piquaient le soir.
Les bols étaient disposés ça et là et l'empêchaient d'avoir de la place. Des écritures, des tâches de tomates, des dessins désastreuses étaient inscrits sur le mur.
Le matin, Aïcha se levait à six heures du matin pour préparer le petit déjeuner des neufs enfants de sa patronne qui allaient tous à l'école sauf les deux petits derniers. Puis, s'en suivaient le balayage, le nettoyage des chambres et du salon pour ensuite aller au marché, préparer le déjeuner, le dîner. Sans oublier les deux derniers qu'elle lave deux fois par jour, le linge de toutes ces têtes et de celui de monsieur et madame qu'elle lave tous les dimanches.

Madame elle, faisait les driankés (grande dame). Elle ne fait rien de ses journées et passe tout son temps à l'envoyer faire des commissions.
Pour tout dire, Aïcha ne ressemble plus à rien. Plus le temps de s'occuper d'elle. Plus le temps de s'occuper de son état de santé ni de sa grossesse. En y pensant, elle n'est toujours pas retournée à l'hôpital pour faire ses visites et éclaircir ses doutes par la même occasion.
Aujourd'hui, elle a demandé une avance sur son salaire pour pouvoir acheter un téléphone portable afin de joindre Khaled.
La dernière fois qu'il l'avait appelé sur le téléphone du gardien, il lui avait trouvé une solution pour sortir de ce mariage, mais cette grossesse est venue réduire tout à néant.

Aïcha

Avec les cinq milles francs que tata Fama a bien voulu me donner, je me suis achetée un téléphone simple et une puce.

J'enregistre le numéro de mon frère. À part le sien je ne connais que celui de mon père, ma mère et celui de Mamour. J'ai tellement envie de l'appeler, mais son numéro ne doit plus marcher.
J'hésite entre composer le numéro de Khaled ou celui de maman.
Je finis par choisir le premier, ma mère, je crois qu'elle ne prendra pas mon appel si elle sait que c'est moi.

Le téléphone sonne et il prend à la quatrième sonnerie.

Lui: Allô

Comme toujours, entendre sa voix me fait tellement de bien.

Moi: Allô frérot.

Lui: Aïcha !

Moi: Elle même.

Lui: Soeurette j'ai appris ce qui s'est passé, comment tu vas ? Où es-tu actuellement ? Est-ce que tu manges ? T'a un toit, de l'argent ?

Moi: Je vais bien grâce à Dieu. J'ai tout le nécessaire.

Lui: Je me suis tellement fait du souci pour toi quand maman me l'a dit, elle est inconsolable en ce moment. Papa n'aurait pas dû.

Moi: J'imagine.

Lui: T'inquiète pas, je vais lui parler, il est temps que quelqu'un le résonne.

Moi: D'accord, bon je te laisse. Je t'appelais juste pour te rassurer. Tu pourras me joindre sur ce numéro.

Lui: Ok ciao. Sois prudente

En fait j'ai raccroché parce que je ne pouvais plus continuer la discussion. Il se jette vraiment dans la gueule du loup. Essayer de résonner mon père équivaudrait à jouer avec le feu. Je pense que même si ses parents étaient sur terre, ils ne pourraient défier son autorité.
Et Khaled le pauvre, il se sent tellement impuissant de ne pas pouvoir m'aider financièrement. Il est étudiant et la petite somme qu'il perçoit tous les mois dans un pays si lointain ne couvre même pas ses dépenses.

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Un mois que je suis dans cette maison et rien a changé. La même routine chaque jour.
Khaled m'appelle fréquemment et la dernière fois, il m'a dit quelque chose qui m'a beaucoup surpris. Il dit avoir convaincu mon père de me reprendre. Mais c'est la condition qu'il lui a imposé qui me semble louche.
Il dit que papa lui a demandé de revenir au Sénégal d'abord. J'ignore ce qu'il manigance cette fois pour me nuire mais cela n'augure rien de bon.
Il dit qu'il va venir la semaine prochaine inchallah.

Concernant ma grossesse, à part les vertiges que j'ai par moments de la journée, tout va pour le mieux. Bien évidemment, personne n'est encore au courant dans cette maison. Mais je sais très bien que cela ne va plus passer inaperçu pour longtemps. Je compte bien aller à l'hôpital quand je percevrai mon salaire pour savoir comment se porte mon bébé. Car oui, même si je ne connais pas son origine, je commence à l'aimer et à m'habituer à lui.

Il y'a quelques jours, j'ai décidé d'aller rendre visite à ma mère pour la voir ne serait-ce qu'une fois et avoir une discussion.

J'ai passé toute la journée ce jour là devant la maison sans voir son ombre. J'y suis allée sans répit des jours après et j'ai fini par croiser le chemin de tata Awa. Elle m'a bien fait savoir que personne dans cette famille ne veut me revoir et que depuis mon départ, la maison est devenue plus calme et harmonieuse. Je ne la croyais pas jusqu'à ce que je vois ma mère sortir d'une maison, accompagnée d'une de ses amies riant aux éclats. L'expression de son visage ne ressemblait pas du tout à quelqu'un qui est affectée par la disparition de sa fille comme Khaled me le soulignait très souvent.
Au fond, sommes-nous réellement capables de connaître une personne en profondeur ?
À peine me fus-je posée cette question que je dus y répondre par la négative. D'ailleurs je pense avec désolation, si les gens sont souvent des mystères pour les autres, ils le sont parfois autant pour eux-mêmes.
Le comportement de ma mère me choquait au plus haut point.
Là je compris une chose, c'est que je devrais désormais vivre ma vie sans penser à ces parents irresponsables et cyniques dont Dieu m'a doté.

Khaled ne m'a pas appelé depuis le jour de son départ, il doit bien être au Sénégal mais je n'ai pas eu de ses nouvelles depuis. Je ne peux même pas l'appeler pour prendre de ses nouvelles, c'est écœurant.

Ce matin au réveil, mes vertiges ne me quittaient presque plus, j'ai faillit tomber en sortant de la douche. Tata Fama m'a bien sûr interpellé.

Elle: Hé tu ne peux pas faire doucement, tu as quoi ?

Moi: Rien tata j'ai juste mal à la tête.

Elle m'a regardé d'une de ces façons et a continué son chemin.
Tellement insolente cette dame.

L'après midi, après avoir servi le déjeuner, mes maux ne me quittaient toujours plus.
J'étais entrain de donner à boire à monsieur quand d'un coup, je me suis retrouvée par terre. Je sentais des gens me secouer, mais je ne pouvais bouger aucun membre. Je finis par fermer les yeux sans m'en rendre compte.

Tout d'un coup, je sentis quelqu'un me réveiller. Quand j'ai ouvert les yeux, je suis tombée sur un homme portant une blouse blanche.

C'est là que je compris que j'étais encore une fois dans la merde. Mes employeurs allaient découvrir ce que je leur cachait depuis le début.

Les Voix Du CoeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant