40 - ENZO

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- Je bouge.

Un dernier coup d'œil au miroir et j'enfile mes baskets. Je vais pas vous mentir : je stresse à mort. Lorsque j'ai invité Sofia j'étais sûr de moi : c'était le moment alors j'ai fait le mec j'avoue. Maintenant je suis perdu un peu et les regards inquisiteurs de ma sœur sont bien loin de me rassurer.

Est-ce que la sortie va lui plaire ou je vais me ramasser ?

- Je peux venir ?

- Dans tes rêves.

Je me depêche de faire mes lacet car je sens qu'Emilie ne va pas facilement lacher l'affaire. Après tout c'est normal je ne sors pas souvent. En tout cas pas pour un date.

- Enzo steuplait ! Ca fait trois jours que je suis coincée dans l'appart !

- Hors de question. Tu veux aller dehors tu vas sur le balcon.

- T'es pas cool.

Ca tombe bien je suis pas fait pour l'être.

J'ai l'air relou, je le sais mais je remplis pas des billets d'absence pour le lycée pour qu'au final Em se balade tranquillement dans les rues de la capitale. Alors même si on est le soir je suis contre l'idée qu'elle prenne un risque. On sait jamais qui elle peut croiser, un de ses profs ou pire : le proviseur. Dans cette situation elle serait grillée et moi aussi par la même occasion. Je veux pas passer pour un menteur car j'en suis pas un.

- Bisous et pas de connerie.

Ma soeur souffle et je préfère claquer la porte avant qu'elle ne me réclame encore quelque chose. D'ailleurs je lui aurais bien donné ma CB sauf qu'il est inenvisageable que je laisse ma brunette payer le restau de ce soir. D'autant plus qu'elle a l'air de galérer avec la thune et c'est pas mon cas.

Je m'enferme dans ma voiture et regarde le siège passager. Il est vide pour l'instant : j'ai fait le choix de laisser mon perfecto à la maison. Je vous jure, je sens que je vais le regretter : il me manque déjà. Je mets le contact et attrape mon téléphone afin de démarrer le GPS mais avant j'ouvre une dernière fois le message que ma fleuriste m'a envoyé pour ne pas me tromper d'adresse.

13 rue Dupleix.

D'après google son immeuble est à cinq minutes de la gare d'Austerlitz pourtant c'est la première fois que j'entends le nom de ce lieu. Je lance quelque recherches sur un moteur de recherche et l'endroit où Sofia réside semble assez sympa. L'avenue est longue de treize mètres et - même si au premier regard ça ne paie pas de mine - c'est super bien desservi par le métro et pleins de petits commerces bordent la rue. Mes yeux dérivent et se posent sur l'écrand de mon portable, en haut à droite. Vingt heures sept.

Putain je suis déjà en retard.

J'espère que ma brunette va pas croire que je la plante alors pour la rassurer je lui envoies rapidement un texto. Je suis un boulet, dès le début je merde avec l'heure. Mes gars, Mike et Haks, sont habitués à mon manque de ponctualité mais ma fleuriste, elle, ne connait absolument pas ce trait de ma personnalité et j'aurais voulu qu'elle le découvre plus tard.

Ca fait pas du tout sérieux.

Je m'engage dans la circulation et jette des coups d'œil incessants dans le rétro. A chaque feu je replace une mèche échappée de ma casquette ou alors je lisse le col de ma chemise ouverte. A partir de quel moment j'ai fait autant attention à mon apparence au juste ?

Lorsque j'arrive devant l'immeuble miteux je me stationne en double file. Je pensais pas qu'elle vivait dans un truc pareil. Je ne la juge pas - rassurez vous - j'espère juste que son logement n'est pas insalubre.

Tu m'inquiètes pour une meuf à qui t'as à peine parlé ?

- Mais ta gueule gars !

Au passage j'ai claxonné et je voulais pas. C'est mort, là je vais carrément passer pour le mec macho, l'anti-romantique qui monte même pas chercher une femme. Ca craint vraiment je vous jure.

- Salut.

Je me tourne et remarque Sofia postée devant la vitre du véhicule. Elle sort d'où ? Même pas je l'ai entendu arriver.

- Tu m'ouvres ou alors je reste plantée ici toute la soirée ?

C'est marrant, dehors elle parait beaucoup moins timide que lorsqu'on se voit à la boutique. Je ne sais pas si c'est le fait qu'on sorte ou bien qu'on ne soit plus dans le cadre professionnel mais dans tous les cas c'est super agréable. Après, j'arrive encore à distinguer la teinte légèrement rosé que prennent ses joues.

- Montes, je souris.

Je la vois se poser sur le siège et elle ne dit rien. Elle se contente d'attendre que je démarre. A sa place j'aurai posé mille et une questions sur notre sortie. Genre : on va où ? on mange quoi ? Bref, les classiques. Mais au lieu de ça elle se contente d'ajouter :

- T'abuses pour le klaxon, t'aurai pu m'appeler.

Au début j'ai peur de l'avoir blaisée mais le sourire discret qu'habille ses lèvres me rassure : c'est juste une taquinerie.

- Bah écoute pas le temps pour ça.

Je devrai lui dire la vérité, je sais mais au lieu de ça je préfère conduire en silence et c'est pas génant, étonnament. Simplement l'ambiance est paisible, relaxante. J'espère que ça va lui plaire et c'est sincère. Pour le moment je l'observe scruter les rues qu'on traverse.

Pourquoi elle tient un Tupperware au juste ?


D'amour et de RapOù les histoires vivent. Découvrez maintenant