76 - ENZO

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Je me penche encore une fois vers la feuille posée devant ma sœur. Promis cette fois c'est la dernière : je n'irais plus vérifier si elle avance ou non dans l'écriture de son refrain. Après tout si des paroles ne lui viennent pas tout de suite c'est parfaitement normal, moi aussi j'ai galéré pour faire naitre mon premier morceau. Néanmoins je m'inquiète et après tout normal : ça reste mon album.

- Tu veux de l'aide ?

- Non.

J'ai l'impression que c'est la énième fois que je pose cette question à Em et elle commence à s'énerver, je le sens or on ne produit rien de bien quand on a les nerfs à vifs. Impuissant je la regarde raturer un mot qu'elle avait griffonné à la va-vite. Même si ses phrases d'avant n'étaient pas très convaincantes j'aimerai encourager Emilie et lui dire de ne pas baisser les bras. Parce qu'on est pas obligé d'enregistrer ce morceau aujourd'hui si elle ne le sens pas. Seulement je sens que ce n'ait pas le bon moment pour lui parler, pas après toutes les remarques que je lui ai faite depuis une heure. Mais quand je l'aperçois qui mort son crayon j'hésite vraiment à intervenir.

Décidément, ma sœur est beaucoup plus douée lorsqu'il s'agit de prendre des photos.

- J'y arriverai jamais Enzo, c'est mort.

- Dis pas ça Schtroumpfette.

- Ca m'aide pas.

- Si c'est la langue qui te bloque t'as qu'à écrire en anglais.

- Mouais.

Malheureusement Em n'a pas l'air convaincue alors je soupire et fais la seule chose qui me parait efficace : je vais dans la cuisine. Mon but ? Ramener autant de sucreries qu'il faut pour remonter le moral de ma sœur. Je ne vous cache pas que j'ai espoir que ça la rebooste un peu aussi car elle n'est pas très motivée. Alors je fouille dans les placards jusqu'à trouver le saint graal : des cupcakes au chocolat. Je n'ai aucune idée si ce sont ses gâteaux préférés ou pas, simplement je sais que Em les bouffe l'un après l'autre.

D'ailleurs c'est pas très sain.

Après ça je fais chauffer un peu de lait et y ajoute du chocolat en poudre. Si là elle n'a pas sa dose de cacao pour le mois je n'y comprends plus rien. Maintenant que j'ai décidé de lui livrer un maximum de calories sur un plateau elle a intérêt à rester docile, je vous jure.

Ou je l'enferme dans la voiture.

- Devine ce que j'ai trouvé ?

- Des couilles ?

C'est moi ou Emilie n'y met vraiment pas du sien ? La crise d'ado ça craint et je crois bien trop connaître la raison de son manque d'enthousiasme. Elle m'en veut, tout ça parce que je lui ai dit qu'on ne pouvait pas rester quelques jours de plus.

Tout ça pour un mec.

- Si tu fais la gueule on arrête tout.

- C'est pas ça Enzo.

- Alors c'est quoi ?

Un silence s'installe et je n'ai jamais été aussi perdue avec elle, nos dialogues sont plus stériles que jamais et à l'instant je regrette d'avoir viré les gars de la maison tout à l'heure, j'aurais bien besoin d'eux au final.

- Je vais faire un tour.

- Em attend !

Bien évidemment elle a claqué la porte avant de m'avoir entendu. On est censé rentrer demain à Paris et j'espère sincèrement que ma sœur ne se comportera pas comme une peste devant Sofia. Pas que je n'assume pas ma sœur, nan, j'ai simplement pas très envie qu'elle gâche nos retrouvailles avec son tempérament grognon. D'ailleurs pour éviter de trop penser à ça je me laisse tomber dans le canapé du salon et sors mon téléphone portable.

Instagram soigne tous les maux, croyez moi.

Alors je fais doucement défiler le fil d'actualité jusqu'à ce que je ne tienne plus : faut que je sache comment ma grecque va. C'est devenu beaucoup trop simple de la stalker depuis que son pote black bosse à la boutique - ça aussi je l'ai appris via le réseau - et je dois dire que jamais je n'ai vu une personne aussi active sur les réseau. C'est bluffant.

Et ça m'arrange énormément, j'avoue.

Je presse mon doigt sur la story du magasin et apprends bien vite qu'une soirée Halloween est organisée à la boutique. Ma première pensée est littéralement c'est quoi ce bordel ? puis je me souviens que ma brunette à du mal à joindre les deux bouts dernièrement. Vu qu'un coup de pouce est toujours le bienvenu selon moi, je clique sur l'icone qui me permet de partager l'info. Je ne veux pas me venter - croyez moi, c'est la vérité - j'ai beaucoup plus d'abonnés sur l'appli que ma fleuriste et avoir fait circuler la publication fera venir une masse de personne en plus.

D'ailleurs mes notifications s'emballent et je peux déjà constater que certains jeunes sont pas mal intéresser. Soudain je me dis qu'on pourrait attirer encore plus de monde si on organise un concert au cours de l'évènement. Je vous l'accorde, un rappeur n'a pas grand chose à faire dans une fleuristerie en temps normal mais si je peux aider ma grecque à s'en sortir financièrement ce ne sont surement pas les apparences qui vont m'arrêter.

Alors sans plus réfléchir j'envoie un message à ma douce en espérant qu'elle valide l'idée. Après tout je ne vois pas pourquoi elle refuserait : ça lui ferait la pub du siècle.

Et moi encore une autre excuse pour la revoir.




D'amour et de RapOù les histoires vivent. Découvrez maintenant