89 - SOFIA

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Quelques jours plus tard.

- Depuis quand t'arrive à l'avance toi ?

Je passe la porte de la boutique et j'ai presque envie de me pincer pour être sûre que je ne rêve pas ce que je vois. Barack à l'heure, c'est déjà impossible mais Barack en avance c'est quasiment incroyable. Et dire que ça fait des jours que je me bas avec le rwandais, on dirait bien que ça a porté ses fruits.

- Ce soir on fait la fête, tu te souviens pas ?

Forcément.

La voilà la raison : notre soirée d'halloween. Je me disais bien que la perspective que le black m'écoute était louche, maintenant j'en ai la preuve. Un tour sur moi même et je réalise que Barack s'est vraiment investi dans l'évènement. Après les toiles d'araignées répugnantes présentes un peu partout et les citrouilles, je me cogne contre un bocal vraiment suspect.

- C'est des yeux ?

- Les nouveaux bonbons sont ouf, t'as vu.

Honnêtement ça me dégoute.

Je garde pour moi mon ressentiment et prie pour que les couleurs étranges soient simplement un mélange de confiture. Je ne vais pas vous mentir : l'ensemble rend assez bien. Mais ça reste dégueulasse. Pourquoi halloween n'est pas la fête des princesses au juste ? N'empêche je devrais payer double le rwandais pour tout le travail qu'il a fourni, d'ailleurs je vais éviter de penser trop fort : il serait capable de la réclamer, sa foutue paie en plus.

- T'es là depuis quelle heure au juste ?

Etant donné qu'aujourd'hui est un peu spécial, on était censé ouvrir la boutique que cette aprèm. Evidemment je ne suis pas dupe, le black est là depuis beaucoup plus longtemps.

- Je sais pas. Hier ?

- T'abuses frère.

J'ai le droit à un beau sourire hypocrite de sa part alors je lève les yeux au ciel. Je l'ai pas embauché pour qu'il fasse tout le boulot à ma place. D'ailleurs je dois bien avouer que ces derniers temps Barack se débrouille de mieux en mieux : même si ses débuts ont été un peu difficiles - on va pas se le cacher, c'est un boulet - maintenant il se débrouille presque mieux que moi.

Enfin, pour la compta surtout.

- T'as nourrit Lomepal ?

- De qui tu parles ?

Je souffle, décidément Barack ne s'est toujours pas remis de la trahison de ma boule de poil. J'ai beau expliquer au rwandais que la disparition de ratatouille était accidentelle, il n'en démords pas : il boude mon chat. Il peut continuer à l'ignorer autant de temps qu'il le voudra, ça ne change rien : on ne peut pas lutter contre l'instinct animal.

- A quelle heure ils arrivent ?

- Qui ça "ils" ?

Je vais commencer à paniquer. Je jure que si mon pseudo associé s'est permis de transformer toute cette soirée en grosse teuf je le tue. Cette boutique n'est pas censée servir de lieu de tournage au prochain projet X.

Décidément je hais instagram.

- Les potes de ton Enzo chéri, ils vont passer pour installer des trucs bébé.

- Je suis même pas au courant.

- C'est le genre de chose qui arrive quand on lâche plus la langue de son mec.

- C'est pas vrai !

Immanquablement je rougis. En plus Barack ne raconte que des bêtises : on est pas tout le temps collés avec Enzo, c'est pas vrai. Puis d'abord ça ne fait qu'une semaine qu'on sort ensemble alors on a pas encore trouvé le bon rythme, c'est tout.

- Meuf arrête de nier dans ta tête, je t'entends d'ici.

- T'es un sorcier.

- Ca tombe bien, c'est le thème de ce soir. Tu te déguises en quoi bébé ?

Je fais non de la tête car il est hors de question que je rentre dans ce délire. Si lui veut être ridicule c'est son problème, en attendant j'ai toujours une crédibilité et une dignité à conserver. C'est pas comme si la soirée se passait entièrement dans le noir, là les choses auraient été différentes.

- Attends, tu veux dire que t'as rien prévu ?

- Et je ne compte rien prévoir.

Pour rien au monde je cèderai.

Sauf que les pupilles brillantes du black me font peur à l'instant. Je ne sais pas ce qu'il a derrière la tête et ça me fait légèrement peur. Pitié si un dieu existe sur cette terre, faites qu'il m'entende : je ne veux pas me déguiser et ça ne changera pas, alors empêchez Barack de trop réfléchir. Ca serait cool.

- Tu me fais peur un peu.

- Sofia je peux partir une heure ou deux steuplait ?

- Ca dépend ce que tu comptes faire frère.

Croyez moi, il n'y pas de bonheur plus lisible que celui qui s'affiche actuellement sur le visage de Barack. Toujours campée sur mes positions, j'utilise toutes mes forces pour empêcher le sourire qui s'accroche à mes lèvres de s'afficher.

- Viens on fait un déguisement de couple.

Quoi ?

- Non. On est pas en couple d'abord.

Cette fois-ci j'ai le droit aux gros yeux. Ok, si je veux pas que ça se termine en autre boudin je vais devoir faire des concessions. Autrement dit, je suis en train d'accepter. Vous y croyez à ça, vous ?

- Juste une heure et pas trop chelou le costume !

Je m'embarque dans quoi au juste ?







D'amour et de RapOù les histoires vivent. Découvrez maintenant