80 - ENZO

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Je le savais, qu'emmener Em à Disney était la pire idée que je puisse avoir alors j'y étais préparé. Seulement ce à quoi je m'attendais moins c'était de devoir faire face à ça seul. Je vous jure, j'ai l'impression d'être dans un cauchemar dont je ne sortirai jamais et je n'exagère pas.

Sofia a besoin de temps c'est tout.

J'aimerai tellement me dire que l'absence de ma fleuriste est uniquement dû au fait qu'elle ait eu peur de rencontrer ma sœur mais je sais au fond de moi que ce n'est pas la seule raison de sa disparition. La vérité c'est que ma brunette est timide et morte de peur. Pourquoi est-ce que notre relation ne fait que reculer ?

Alors c'est ainsi que je me retrouve à affronter une Emilie plus qu'hystérique totalement seul et croyez moi, je galère. Je vous jure, j'ai dépensé au moins la moitié de mon salaire dans ce foutu parc d'attraction tout bonnement car je suis incapable de refuser la moindre chose à ma sœur.

Et elle en profite, la garce.

- On fait quoi maintenant Schtroumpfette ?

- It's a small world.

- On l'a déjà fait trois fois Em.

- Et alors ? Tu dis pas ça quand tu te branle hein.

Je lève les yeux au ciel sans rien répondre. Allons voir les poupées puisque c'est la volonté de ma soeur. Je vous avez prévenu : cette gamine est insupportable lorsqu'on l'abandonne dans un monde peuplé de princesse et de souris flippantes qui parlent. D'ailleurs à cette pensée je rapproche ma main de ma tête, histoire de me rappeler à quel point j'ai l'air con : moi aussi j'ai eu le droit à un serre-tête oreille de Mickey.

Pourquoi j'ai encore cédé au juste ?

Mine de rien je m'en tire assez bien : j'ai eu le droit au noir. C'est sobre et plutôt passe partout, exactement le contraire du serre-tête que porte fièrement Emilie qui est plein de paillettes.

Je veux mourir sur place.

Heureusement c'est à cette instant que mon téléphone vibre et pendant une minute je m'autorise à penser que le message provient d'une petite brune aux cheveux bouclés. Je sens déjà apparaitre un sourire niais sur mon visage alors que je jette à peine un œil à l'écran mais il disparait bien vite : c'est juste Mike qui se fout de ma gueule.

- Dis Em, depuis quand t'as le numéro de mes potes ?

Elle balaie ma question d'un geste de la main et on s'engage dans la file d'attente. Sérieux qui est capable d'attendre trois-quarts d'heure pour seulement s'installer dans un bateau qui traverse un champs peuplé d'automates qui chantent et qui dansent, le tout accompagné par une musique horriblement enfantine ?

Et dire que c'est déjà la troisième fois qu'elle m'inflige ça.

- La prochaine fois on bouffe mcdo avant et on fait croire que t'es enceinte pour avoir les billets coupe-file.

- T'es malade toi, pourquoi ça serait à moi de mentir ?

- Je te rappelle que je suis ici contre ma volonté Em.

J'entends ma sœur soupirer face à mes conneries mais je vous jure que je pense sérieusement à utiliser cette technique un jour. Faire la queue est une torture encore plus grande que devoir porter des oreilles de rat et continuer d'agir normalement. Le pire ? Ca recommence à chaque nouveau manège et vous pouvez être certain que le temps d'attente double toujours.

Encore une fois je sens une vibration traverser la poche de ma veste. Sérieusement faut qu'Emilie arrête de m'afficher comme ça, puis les gars sont pas ses potes d'ailleurs : elle a pas intérêt à me les voler ces deux là.

Alors je sors mon portable de ma poche et en même lâche un soupir théâtral qui a pour unique but de faire passer un message à ma sœur. Déjà qu'elle me force à trainer dans un parc destiné au six-huit ans, elle ne va pas en plus m'afficher tout au long de cette journée.

- Je te jure, tu continue et on reste pas pour le feu d'artifice.

- C'est une menace ?

- Pas du tout.

Au final je regrette bien vite mes paroles lorsque le nom de l'expéditeur et d'ailleurs il me faut un certain temps pour bien comprendre que le message vient d'elle. Je suis tellement pressé de revoir ma fleuriste qu'à chaque message je ressens comme une petite vague déferler dans mon cœur. Et j'ai bien dû mal à cacher ma joie face à ma sœur.

- T'es vraiment un gamin.

- C'est toi qui dit ça ? C'est pas moi qui ai insisté pour avoir des oreilles Minnie sur la tête.

- Eh bah moi au moins je souris pas comme un débile quand je reçois une notif de ma meuf.

C'était bien mérité, j'avoue.

Je jette un coup d'œil à la file d'attente et constate qu'on a pas bougé d'un poil depuis le début : j'aurais donc tout le temps qu'il faudra pour me prendre la tête avec cette peste tout à l'heure. Alors pour le moment je décide de ne pas envenimer la dispute - même si ça serait beaucoup trop plaisant, je le reconnais - et choisis de me concentrer sur mon unique priorité.

Sofia.

Alors c'est impatient comme un ado, je presse le doigt sur l'icone doté du petit un rouge et attends que le fameux texto s'affiche. Je trouve d'ailleurs le temps trop long : la prochaine fois je changerai de téléphone, c'est décidé. Et lorsqu'enfin le message s'affixe une vague de chaleur me parcourt le corps.

« Viens à la boutique ce soir. Pas de jogging steup, c'est un date »

Finalement je crois bien que je vais partir avant le feu d'artifice, que ma sœur soit chiante ou pas.



D'amour et de RapOù les histoires vivent. Découvrez maintenant