Chapitre 42

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— Je dors chez une amie ce soir. Oui, je rentrerai dans la semaine. Non, maman, je n'ai pas de petit-copain.

Son père se joignit à la conversation téléphonique.

— Jeune fille, je te signale que tu n'es pas majeure. Alors, la moindre des choses, ce serait de demander l'autorisation à tes parents.

Fleur soupira.

— Papa, maman, est-ce que je peux dormir chez une amie ?

— C'est d'accord, répondit Marc. Amusez-vous bien.

Elle leva les yeux au ciel et raccrocha. Dans le salon, elle s'assit à côté de Valentine sur le canapé. Son premier réflexe fut de se ronger les ongles. Ça ne lui était plus arrivé depuis le collège, signe que les évènements la dépassaient.

Valentine se pencha vers la table basse et saisit un verre d'eau dans lequel un cachet d'aspirine se dissolvait.

— Tu en veux un ?

Fleur accepta volontiers. Elle souffrait de maux de tête depuis le mauvais tour des sorciers.

Gabriel et Théo étaient installés sur un autre canapé en face de celui des filles. Théo aiguisait une dague en argent à la lame tortueuse, semblable à un éclair. Ses gestes étaient fluides et précis, pourtant son esprit était ailleurs. Avait-il réellement besoin d'affuter sa lame ou bien était-ce une manière de méditer, Fleur n'aurait su le dire. À sa droite, Gabriel avait les bras croisés et la tête baissée. Il donnait l'impression de dormir, mais ses yeux étaient ouverts. Il pensait, lui aussi.

Le sérieux dont ils faisaient preuve avait quelque chose de dérangeant. Fleur était difficilement impressionnable, pourtant, à cet instant, elle se sentait comme une enfant tombée dans la cour des grands.

— Ils font peur à voir, pas vrai ? lui glissa Valentine. Surtout le balafré...

Gabriel entendit la remarque, mais l'ignora.

À voix basse, Fleur demanda :

— Qu'est-ce qui lui est arrivé ?

— La cohabitation avec son démon est compliquée.

— C'est la sorcière qui lui a fait ça ?

Valentine confirma d'un hochement de tête, provoquant l'indignation de sa camarade.

— Et moi qui pensais qu'il y avait une forme de respect entre les hôtes et leur démon...

— Ma belle, au-dessus du rang B plus, aucun démon ne se soumet volontairement. Pour le faire plier, il faut être constamment sur ses gardes et repousser ses attaques. À mesure qu'il échoue, il finit par se montrer docile. Mais ça peut prendre du temps.

— Gabriel est le dernier à ne pas avoir maitrisé son démon ?

— Oui.

Fleur était abasourdie. Elle admettait qu'un démon perfide puisse tourmenter son hôte car celui de Clément passait son temps à le traiter de chiffon baveux, mais que certains attaquent physiquement leur hôte lui était impensable. Encore une fois, les Foladel l'avaient ramenée à un douloureux sentiment de naïveté.

— C'est récurrent ?

— Deux fois par semaine, environ. Le mois dernier, elle a essayé de le noyer dans une flaque d'eau. Si tu avais vu la tronche des passants dans la rue, c'était hilarant.

Clément arriva au manoir et sonna à la porte. Théo partit lui ouvrir.

— Salut. J'ai appris ce qui vous est arrivé au lycée. Comment vous vous sentez ?

La Famille Malcius - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant