Chapitre 50

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Maël ne s'était pas réveillé lorsque Félix avait été renvoyé dans son lit. Il avait dormi comme une pierre, d'un sommeil ininterrompu qui le berça jusqu'au petit matin. Tout l'inverse de Félix qui réussit seulement à fermer les yeux une poignée de minutes avant qu'un surveillant ne vienne frapper à leur porte pour les réveiller. Car le garçon avait passé la nuit à cogiter. Entre Namibe qui pouvait se téléporter dans le Contra comme on entre dans une boulangerie, le démon du Minotaure accompagné de sa peluche Thésée et une conversation insolite où il avait été déclaré témoin, Félix ne savait plus à qui accorder la palme de la bizarrerie. Témoin de mariage ? avait-il pensé. Non, ça n'avait pas de sens. Il était témoin de quelque chose, mais ne savait pas de quoi.

Avec du recul, Félix se demandait ce qui lui avait pris d'accepter l'invitation de Namibe. Et avec un peu plus de recul encore, il réalisait que son camarade ne l'avait jamais invité et que, par conséquent, il n'avait jamais rien accepté. Il s'était laissé embarquer dans un plan farfelu sans rien dire. Du Félix tout craché.

— Diantre ! Quelle mauvaise mine tu as ce matin, s'exclama Maël tandis qu'ils s'habillaient en vue de descendre prendre leur petit-déjeuner.

— Je n'ai pas réussi à fermer l'œil de la nuit, avoua Félix. Ce doit être le décalage horaire.

Dans l'escalier en colimaçon, ils croisèrent Emma en compagnie de la fille qui refusait de cohabiter avec son démon. Ils apprirent par la même occasion qu'elle s'appelait Sophie. Tous les quatre se rendirent au réfectoire où un quatrième année gourmanda Maël qui hésitait entre une salade de fruits et un yaourt. Contre toute attente, Emma prit sa défense.

— Eh, gros con. Si t'es pas content, tu passes devant.

L'élève poussa un juron et partit avec son plateau. Félix et Maël n'en crurent pas leurs oreilles. Ils adressèrent un regard appréciatif à la fille et celle-ci fit mine de les ignorer.

Pendant le petit-déjeuner, un démon en forme de tornade zigzagua entre les tables pour distribuer le courrier. Des enveloppes jaillirent de sa masse nébuleuse avant d'être rattrapées à la volée par les élèves. Félix et ses compagnons en reçurent une, eux aussi. À l'intérieur, ils trouvèrent un message de Madame Gaussin. Elle leur donnait rendez-vous aux cascades de l'école à neuf heures pétantes. « Pétantes » était surligné, entouré et encadré en rouge. Visiblement, leur professeure était à cheval sur la ponctualité.

Une fois le ventre plein, Maël dut retourner dans la chambre pour récupérer des affaires et Félix l'accompagna. Il l'observa soulever son oreiller et saisir un petit objet circulaire qu'il fourra dans sa poche.

— Me voilà prêt !

Bien entendu, ils arrivèrent en retard aux cascades. L'endroit était une salle immense avec des bassins en escalier alimentés par des chutes d'eau grandioses et vrombissantes. Les élèves de la classe étaient rassemblés au niveau du bassin le plus haut et une femme robuste leur donnait des consignes. Félix et Maël les rejoignirent discrètement.

— Ils n'ont pas l'air à leur aise, commenta Maël.

Félix perçut l'appréhension générale et comprit rapidement d'où venait le problème. Madame Gaussin inspirait la crainte. Elle était froide, cassante, et ne s'embarrassait d'aucune pédagogie. Un véritable dragon de l'enseignement. De ce qu'ils comprirent, elle attendait d'eux qu'ils se faufilent sous une cascade et empêchent l'eau de les toucher. Il était question de barrière démoniaque, un bouclier capable de repousser les attaques extérieures. Après plusieurs tentatives, tous les élèves réussirent à l'invoquer. Restait à la renforcer pour qu'elle résiste aux trombes d'eau.

— Vous deux, vos noms ! aboya Madame Gaussin.

La professeure braqua Félix et Maël de ses deux interstices hargneux, leur arrachant un frisson. Ces derniers se présentèrent subito.

La Famille Malcius - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant