Épisode 207 : Imploration

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Je n'avais pas vu Rivaille depuis ce soir où j'étais allée le voir dans la Forêt des Géants. J'avais finalement passé la nuit dans la tente pour repartir le lendemain, avec une conversation houleuse avec Sieg la veille en prime.

Et quand nous nous étions quittés, jamais je n'aurais cru un seul instant que j'allais le revoir dans un état pareil. Ni même dans ces circonstances. Car quand enfin je le retrouvais, après des semaines séparées de lui et ces deux jours d'horreur et d'épouvante qui m'avaient fait nager en plein délire cauchemardesque, mon cerveau n'assimila pas tout de suite ce qui lui était arrivé.

Hanji avait délibérément omis les détails hier soir sur la condition dans laquelle était mon mari, mais même si elle me l'avait dévoilé, je ne l'aurais probablement pas cru.

Parce que comme tout le monde, moi aussi je prenais Rivaille comme un soldat invincible. Un soldat qu'on ne pouvait blesser facilement, et pendant ces années passées avec lui, pas une seule fois je l'avais vu sérieusement blessé. Bien sûr, il était souvenu revenu avec de nouvelles cicatrices, des éraflures, des muscles endoloris, mais il avait toujours été très vigilant pour revenir en un seul morceau. Et à force, cela avait laissé une marque indélébile dans mon esprit : l'idée que Rivaille puisse être touché au front avait presque été inenvisageable.

Ainsi, en arrivant enfin jusqu'à lui et en réalisant avec terreur son état grave, mes jambes flanchèrent et je tombais à genoux sur l'herbe, devant sa carriole, estomaquée.

Je venais de me prendre une gifle mentale monumentale.

Il était en vie oui.

Mais dans un état...

C'est encore un cauchemar hein...? C'est pas possible... C'est pas possible... Pas... Lui...!

- Nausha...

Je déglutis en entendant ce timbre familier.

À demi-assis sous une couverture, je ne voyais même pas son visage qui avait été bandé, laissant seulement son œil gauche visible. Je voyais encore moins ses lèvres qui venaient de prononcer mon prénom dans une voix rauque et étouffée.

Je restais figée au sol, fixant son corps, n'osant même pas imaginer ce que ses bandages cachaient. Je n'arrivais plus à penser. Je ne savais même plus comment me relever. Mon cerveau s'était arrêté sur lui, et j'étais incapable de prononcer la moindre parole.

C'est Sieg qui lui a fait... ça... ? Il l'a... Non... C'est pas possible...

Je n'en revenais pas.

Pendant ces deux jours je m'étais imaginée toute sorte de chose tout comme je l'avais cru mort. Mais ironiquement, je ne l'avais jamais imaginé une seule fois alité et recouvert de bandage.

Mes yeux le détaillèrent en passant de sa tête où son cuir chevelu demeurait intact, signe qu'il n'avait probablement pas été touché au crâne, à son œil, son nez et son oreille droite qui étaient emprisonnés sous les bandages, puis à sa compresse sur sa joue gauche qu'on avait coincée dans une bande. Et pendant que je le dévisageais, son sourcil gauche se fronça et son iris gris-acier me fixa à son tour... Avec une profonde douleur et une amertume sans nom.

-... Je suis désolé, continua-t-il, en voyant que j'avais perdu tous mes moyens. J'ai merdé. J'ai vraiment merdé, j'ai pas pu prévoir ce que ce fils de chien allait faire, et j'ai pas pu te protéger non plus Nausha...

De son visage, je passais ensuite à son corps, le cœur palpitant, et ma respiration redevint tout à coup plus lourde. Je voulais vérifier ses jambes, ses bras, tout son corps avec cet instinct de médecin, mais je demeurais paralysée. Car désormais, plus que le choc et la terreur de le voir dans cet état, un sentiment bien plus pesant s'était installé dans mon cœur, qui prenait la forme d'une détresse de réaliser que mon mari, l'homme que j'aimais, avait un pied dans la tombe.

[SNK - LEVI X OC] GUERRE ET PAIX IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant