6 / EDEN

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  Mon réveil sonne à dix heures. Il faut que je me prépare pour aller bosser. Une énorme flemme me remplit le corps, mais par-dessus tout, mon ventre cri famine. Je n'ai rien à bouffer chez moi. Il faut vraiment que je fasse des courses ce soir. J'enfile des fringues toujours plus ou moins propres, ma veste noire et verte fluo, et le sac UBER EATS.
  J'attrape mon vélo, parce que oui, je suis obligé de travailler à vélo. L'essence pour un scooter coûterait beaucoup trop cher.
  En descendant l'avenue de Clichy, je manque de me faire renverser par une bonne femme au volant de sa Fiat 500. Je suis toujours persuadé qu'elles ont eu leur permis en suçant le moniteur, c'est pas possible d'être aussi gourdes. Elle ne m'a pas touché, mais par peur j'ai quand même sauté de mon vélo et me suis éclaté au sol. Cette journée commence merveilleusement bien. Grosse conne.

  Vers midi, j'ai déjà livré trois personnes, dont un couple bien excité quand je suis arrivé. Le type était tout transpirant, avec juste un boxer comme habit. Il venait sûrement de baiser sa meuf, qui elle, criait dans le fond qu'elle avait la dalle. Je ne veux même pas savoir de quelle dalle elle parlait.
  Il me reste une commande à livrer avant de prendre ma pause dej'. J'arrive devant un petit restaurant qui fait de la bouffe ordinaire, genre des pâtes, des salades, quelques burgers. Je ne suis jamais passé par ce restaurant, mais ça m'a l'air convenable. Les gens qui ont commandé n'habitent pas très loin. Je pourrai donc manger là après.
  En entrant, je me sens un peu oppressé, il fait assez sombre, et ce n'est vraiment pas très grand. Un homme plutôt trapu se trouve derrière le comptoir. Il me fait signe de patienter, et me dit que mes commandes devraient arriver dans deux minutes. Je lui demande un verre d'eau, parce que le vélo c'est vraiment un sport d'enculé.
  Une fois mon verre fini, une petite brune s'approche de moi avec les sacs à livrer. Putain, c'est elle. Quelle est la probabilité que je me retrouve dans le resto où elle travaille, le lendemain de notre rencontre ?
  Elle me fixe un moment et ses yeux se mettent à grossir quand elle comprend qui je suis.

- Tu me suis ou quoi ? lance-t-elle sèchement.

- Ah non pas du tout, je bosse figure-toi.

  Sa manière de s'adresser à moi ne me plait pas. Pas de bonjour ou autre. Qu'elle aille se faire foutre.
Je prends donc les deux sacs qu'elle a dans la main, et me retourne sans lui dire au revoir. Elle reste plantée là à me regarder. Je ne la vois pas, mais je sens quand quelqu'un m'observe. Question d'habitude quand pas mal de filles se retournent sur mon chemin. Ce n'est pas de la fausse modestie, c'est la réalité des choses.
  J'enfourche mon vélo et fonce livrer cette bouffe de merde. Une fois en bas de l'immeuble, l'envie de gagner mon défi me revient à la gueule. Il faut que j'y retourne. Si je ne peux pas l'avoir dans mon pieux mon égo en prendrait un coup. Je dois tout tenter. Même si je me fais envoyer chier cent fois. Elle doit finir par craquer. Au moins pour lui faire payer son mauvais caractère, elle en bavera, je peux le jurer. Mais enfin merde, si ça c'est pas un signe de dieu !

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