55 / HEATHER

24 3 0
                                    

  Ça fait plusieurs jours que nous sommes en cocooning chez Eden... J'ai l'impression de revivre le même schéma qu'avec Sam. Mais c'est plus fort que moi, j'ai besoin de le sentir près de moi. Lorsque je suis seule, j'ai l'impression d'être vide, alors que dès que je le voie, j'avance et reprends vie. Eden est installé à son bureau, lisant du Jane Austen, que je lui ai prêté.

- Tu ne vois plus tes amis ?

- Si, si, répond-il d'un air détaché.

  Depuis que l'on s'est retrouvé, la seule personne avec qui il a eu contact était avec Ninja. Et si en m'envoyant bouler la dernière fois, il avait fait pareil avec ses amis ? Lui qui a toujours été entouré, sollicité, c'est bizarre qu'il passe tout son temps avec moi. Enfin je ne vais pas m'en plaindre, si tous les jours que je passe à ses côtés pouvaient durer jusqu'à ma mort, je ne dirais pas non.
  Mon téléphone se met à vibrer dans ma poche, la réalité reprend le dessus.

- Oui, papa ?

- Ma chérie, comment vas-tu ?

  C'est vrai que je ne lui ai pas vraiment donné d'explication, je ne passe à la maison qu'en coup de vent, j'ai fait une pause avec le restaurant pour me préparer au film d'Éric. Il se doute bien que j'ai rencontré quelqu'un, mais il est tellement pudique qu'il n'ose pas me poser la question. C'est aussi pour ça que je l'aime. Il ne s'immisce jamais dans ma vie, il attend toujours que je lui en informe.

- Ça va, je vais passer à la maison ce soir, tu y seras ?

- Évidemment, on est dimanche, est-ce que tu mangeras ici ?

  Je lance un regard à Eden, le nez plongé dans son bouquin, qui ne porte pas attention à ma conversation téléphonique.

- Euh... Oui avec plaisir ! Il y aura un couvert en plus.

- Très bien. À ce soir ma chérie.

  Eden n'a pas l'air d'avoir entendu.
Je m'approche de lui, retire son livre des mains et m'assieds sur le bureau pour lui faire face. Mes deux jambes se posent sur ses genoux, ce qui me donne une posture très sexy. Mon regard se plonge dans le sien, je sens que je l'excite, son souffle s'accélère, et son regard est beaucoup plus intéressé que lorsqu'il découvrait la vie de Marianne et Elinor Dashwood. Il ne peut s'empêcher de passer ses mains sur le bas de mon tee-shirt et de faire remonter ses doigts le long de mes côtes. Je le repousse doucement avec mon pied, de façon à ce que ma jambe soit tendue sur son torse. Mes mains agrippent le bureau, cette mise en scène me rend dingue, si je n'avais pas à aller chercher un dessert et une bouteille de vin pour ce soir, je lui sauterais dessus.

- Mon père nous invite ce soir.

- C'est ton père ou toi qui m'a invité ?

  Il me lance un sourire satisfait de sa remarque.

- Évidemment que c'est moi. Mais je veux que tu le rencontres.

- À vrai dire, je l'ai déjà rencontré, et plus d'une fois, rit-il.

- Cette fois, ce sera en bonne et due forme, je veux te présenter comme il se doit.

  Il attrape ma cheville et fait glisser mon pied sur son entre-jambe.

- Avec grand plaisir, alors, halète-t-il.

  Eden tient la bouteille de vin, tandis que je porte le gâteau.

- Stressé ?

- Pff, pas du tout, s'exclame t-il.

  Ses joues commencent à rosir. Bien sûr qu'il est stressé.
Mon père nous ouvre la porte et me serre dans ses bras en manquant de faire tomber le gâteau. Une fois rentrés dans l'appartement, il jette un œil à mon petit-ami et froncent les sourcils.

- Eden, c'est bien ça ?

  Il acquiesce sans dire un mot, je savais qu'il était stressé. C'en est presque comique. Mon père lui tend la main, Eden s'empresse de la serrer. Lui qui est toujours sûr de lui et très imposant, ressemble à cet instant à un petit garçon qu'on vient de prendre sur le fait. Il a l'air si vulnérable et impressionné. Il faut que je lui vienne en secours.

- Tiens, mon amour, tu peux déposer ça dans la cuisine.

  Ses yeux s'écarquillent et le sang lui monte aux joues. Il est aussi choqué que je ne l'ai été lorsqu'il me l'a dit pour la première fois. Je suis consciente que ce n'était pas le moment pour l'appeler comme ça, mais c'est sorti tout seul. Je lui dépose le gâteau dans les bras et il se dirige vers le fond du couloir.

- Bon, bah... Voilà, tu as compris.

- J'ai compris dès la première fois où je l'ai vu à la maison, Heath. Alors si tu es heureuse, je le suis aussi.

- Très bien, évite de le mettre mal à l'aise, s'il te plait.

- Il se met mal à l'aise tout seul, le pauvre petit ! éclate-t-il de rire.

  Finalement, la soirée se passe mieux que ce que je pensais, mon père et Eden s'entendent bien. Très bien, même. Je ne peux à peine en placer une, ils ne font que parler de foot (histoire de rester dans le bon vieux cliché). Au moins, maintenant je sais qu'Eden est un footeux, j'apprends même qu'étant petit il passait son temps à jouer au stade avec ses copains pour éviter ses parents. Du coup, étant plutôt sportif, je comprends mieux d'où vient son corps d'Apollon.

SOMETIMES (you bet)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant