Les voix se mélangeaient, valsaient autour des lustres de cristal.
Koja plongea ses doigts dans le bol d'acier doré avec une grimace de dégoût. Le riz, cuit si longtemps qu'il en était devenu collant, avait été mélangé à divers légumes et épices Maunes. Des morceaux de poulpes, marinés dans de l'huile d'olive et cuit au feu de bois avaient été rajouté, donnant ainsi au plat une consistance visqueuse. Si l'odeur était alléchante, Koja dû retenir un haut-le-cœur lorsqu'il avala sa première bouchée. Les épices lui brulèrent la langue et la gorge si vivement que même l'eau, pourtant glacée, ne put l'apaiser.
Réprimant un frisson, le corsaire jeta un regard à Belén qui, installé à ses côtés, observait l'étrange mélange d'un œil mauvais.
— C'est meilleur que ça n'y paraît, marmonna Koja d'une voix rauque.
— Je suppose qu'il serait impoli de ne y goûter... soupira le quartier-maître.
Koja esquissa une grimace et haussa les épaules. Assise en face de lui, Jeriko affichait un air sceptique, tandis qu'elle enfonçait ses doigts dans la montagne de riz. Imitant la jeune femme qui mangeait en silence à ses côtés, le visage tourné vers les membres de la Cour de l'Empereur, la Gāli prenait soin d'esquiver les lamelles de tentacules.
Attablés autour d'une longue table, croulant sous les plats en acier doré, Marwan et ses invités festoyaient. Le Roi, installé sur d'épais coussins de soie, riait aux éclats. Sa discussion avec le fils de l'Empereur semblait plus qu'amusante, bien que Constancio, dont le front plissé de rides trahissait sa nervosité, affichait une mine sombre.
La nuit était tombée depuis plusieurs heures déjà et les ombres, qui s'entremêlaient à l'éclat des centaines de bougies allumées, valsaient sur les visages souriants des convives. Installé dans un coin de l'immense salle, un groupe de musiciens jouait un air enjoué. Les voix, de plus en plus chargées d'ivresses, accompagnaient le chant des instruments.
La plupart des invités parlaient Maune. Noyé sous les accents exotiques des étrangers, Koja s'efforçait de trouver un sens à ces paroles vives et acerbes. Leurs mots semblaient si proches des siens et, pourtant, ils lui étaient inaccessibles.
Les invités de l'Empereur avaient tous été placés en bout de table, excepté Sa Majesté et son conseiller, qui avaient l'honneur de partager le plat de Marwan. Une dizaine de Maunes, tous vêtus de kimonos de soie, dont les motifs brodés en fil d'or reflétaient la faible lumière, séparaient les Woens de leur Roi. Aurell et Siegfried, étant considérés comme la garde rapprochée de Chad, patientaient debout, dans l'ombre, que le repas prenne fin. Ils n'avaient rien manger depuis qu'ils avaient quitter le port de Duḥkha pour rejoindre la résidence du fils du Cakravarti et leur regard pétillant d'envie faisait peine à voir.
Retenant un soupir dépité, Koja reporta son attention sur le plat à peine entamé qui lui faisait face. Son regard croisa celui de Jeriko. Son visage, étrangement éclairé par la flamme des bougies, était habité par un mélange d'émerveillement et de méfiance. Elle avait beau ignorer tout des règles d'usages Maunes, elle avait rapidement compris qu'ici, rien n'était semblable à la Cour de Woe.
Koja jetait une œillade intriguée à Belén qui avait enfin trouvé le courage de goûter l'étrange mixture, lorsque Jeriko prit la parole. Sa voix, trop discrète, se perdit dans le brouhaha ambiant.
— Pardon ? lança Koja.
— Où est Redha ? répéta-t-elle plus fort.
Koja fronça les sourcils, légèrement vexé. Belén, qui n'eut pas besoin d'échanger un mot avec son capitaine pour savoir ce qui lui traversait l'esprit, le devança et répondit :
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Samudra Nari [EN PAUSE]
Fantasy« Renard trop rusé pour tomber dans le premier piège, mais pas assez pour éviter le second. » Les légendes possèdent toujours une part de vérité, du moins, c'est ce qu'il croyait. Corsaire reconnu et émissaire personnel de Sa Majesté, Koja rentre un...